Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Testament (Ancien et Nouveau) (suite)

Des quatorze épîtres attribuées par la tradition à Paul, les trois épîtres dites « pastorales » (I et II Timothée, Tite) ne sont certainement pas écrites par lui, non plus, d’ailleurs, que l’Épître aux Hébreux. En outre, l’authenticité paulinienne de l’Épître aux Éphésiens est aussi mise en question. En effet, le contexte historique de ces cinq lettres n’est pas celui de l’époque où vécut saint Paul ; les conceptions théologiques, le style et le vocabulaire diffèrent notablement de l’ensemble des autres épîtres. Elles sont l’œuvre d’auteurs nourris de la pensée de Paul, qu’on adapte à des circonstances nouvelles. Notons que la tradition catholique considère comme pauliniennes toutes les épîtres de Paul, sauf l’Épître aux Hébreux, dont on fait l’œuvre d’un proche disciple.

Compte tenu de ces divergences et des difficultés rencontrées pour établir une chronologie précise de la vie de l’apôtre (v. Paul), on ne saurait donner pour la date de composition des épîtres qu’un schéma général : entre 50 et 61, composition des Épîtres aux Thessaloniciens, Philippiens, Galates, Corinthiens, Romains, Colossiens, Philémon ; fin du ier s., Éphésiens, Timothée, Tite, Hébreux. Ces dernières épîtres, contestées, sont placées par l’exégèse traditionnelle dans l’intervalle des années 65-70.

Les deux Épîtres aux Thessaloniciens nous livrent la pensée de Paul sur la parousie, ou retour du Christ à la fin des temps. L’Épître aux Galates traite des rapports entre la loi et la grâce, les œuvres et la foi : sujet primordial qui sera repris et développé dans l’Épître aux Romains. Les deux Épîtres aux Corinthiens opposent la sagesse de Dieu à la sagesse de l’homme et montrent comment la résurrection du Christ est le garant de notre propre résurrection. C’est dans la première aux Corinthiens (xiii) que se trouve l’hymne célèbre à la charité. L’Épître aux Philippiens est une exhortation à la pratique de la vie chrétienne et un appel à l’unité dans l’humilité, dont le Christ par son abaissement a donné un grand exemple. L’Épître aux Colossiens met en évidence la relation entre l’histoire du salut dans le Christ et la création tout entière. Par ses développements sur l’œuvre cosmique du Christ, elle étend l’horizon chrétien à l’univers. L’Épître à Philémon est un geste de charité de Paul, qui recommande à un chrétien un esclave fugitif. L’Épître aux Éphésiens a pour sujet l’Église et les rapports du Christ avec elle. Les Épîtres à Timothée et à Tite sont des écrits de discipline ecclésiastique touchant la situation spirituelle et matérielle des Églises. Enfin l’Épître aux Hébreux est une exhortation adressée à des Juifs convertis, nostalgiques de la liturgie du Temple. Pour les affermir dans leur foi, l’auteur leur montre dans le Christ le Souverain Prêtre du culte nouveau, préfiguré dans les Écritures et dont la venue sur terre constitue l’événement central de l’histoire du monde.


Les écrits narratifs : les Évangiles et les Actes des Apôtres

Le terme d’évangile (du grec euaggelion, bonne nouvelle) désigne dans son usage chrétien tantôt le message chrétien, tantôt les écrits où il se trouve consigné. C’est dans ce dernier sens que l’on parle des quatre Évangiles attribués par la tradition à Matthieu, Marc, Luc et Jean. Ces trois premiers sont dits « synoptiques », parce que leur confrontation sur trois colonnes parallèles fait apparaître des ressemblances précises dans le fond et dans la forme. Marc, le deuxième dans l’ordre traditionnel, est en réalité le plus ancien et constitue avec un recueil des « paroles du Seigneur » une des principales sources utilisées par les deux autres.

En effet, si, au début de l’Église, il y eut une prédication uniquement basée sur des traditions orales, on sentit bientôt la nécessité de composer de petits aide-mémoire pour faciliter la tâche des prédicateurs et des catéchistes. C’est ainsi que se constituèrent peu à peu des recueils de « paroles du Seigneur », des récits de miracles ou d’épisodes importants de la vie de Jésus. Ces recueils sont au point de départ de la formation des Évangiles. Mais il faut se garder de lire les Évangiles comme s’ils n’étaient que des comptes rendus de la vie et de l’œuvre de Jésus. Ils sont des livres destinés à propager la foi chrétienne et écrits par des hommes de foi, qui choisissent leurs documents, les résument ou les développent, les organisent dans un cadre répondant à leurs intentions et à leur perspective théologique. Ils sont composés pour et par des croyants des premières communautés chrétiennes, dont ils reflètent la pensée. Les paroles et les œuvres de Jésus sont vues et senties à travers le prisme de la Résurrection. Le Christ de la foi prend le pas sur le Jésus de l’histoire. Ne disons pas qu’il le détruit (v. Jésus).

La rédaction des Évangiles se situe autour de la décennie 70-80 pour les trois premiers, vers l’an 100 pour le quatrième. L’exégèse traditionaliste remonte ces dates aux années précédant la prise de Jérusalem en 70 pour les Synoptiques.

Dès le début, l’Évangile de Marc précise son intention. « Commencement de l’évangile de Jésus-Christ, Fils de Dieu. » Cette introduction est tout un programme, et le dessein de Marc est de montrer aux chrétiens venus du paganisme et aux païens que Jésus « est vraiment le fils de Dieu ». Tels sont d’ailleurs les mots que prononce le centurion romain au pied de la croix sur laquelle Jésus vient d’expirer.

L’Évangile de Matthieu, par contre, s’adresse à des croyants issus du judaïsme, donc pétris de la pensée de l’Ancien Testament. L’évangéliste s’attache à montrer en Jésus le Messie prédit par les prophètes. Le règne de Dieu annoncé et préparé par l’Ancienne Alliance est arrivé avec Jésus de Nazareth, qui, dans sa personne et dans son œuvre, « accomplit » les Écritures.

L’Évangile de Luc, plus littéraire et plus soucieux d’information historique, reprend dans ses grandes lignes le plan de l’Évangile de Marc. Il insiste davantage sur l’universalisme du message évangélique, montrant en Jésus non seulement le Messie d’Israël, mais aussi la « lumière des nations ». Il se plaît à souligner la tendresse de Jésus pour les humbles et les pauvres, sa miséricorde pour les pêcheurs. Dante appelait l’autour du troisième Évangile l’« écrivain de la bonté de Dieu ».