Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Terre (suite)

Formation

Il est admis, actuellement, que la Terre et son satellite la Lune* se sont formés en même temps que l’ensemble du système solaire, selon un processus qui relève des théories cosmogoniques. La Terre se serait ainsi formée au sein d’une masse gazeuse, condensée sous les effets combinés ou successifs de divers processus mécaniques et énergétiques : gravité, réactions nucléaires, force centrifuge, phénomènes magnéto-hydrodynamiques, etc. Mais la Lune se serait-elle détachée d’une Terre déjà formée (hypothèse qui est peu à peu abandonnée) ou l’ensemble Terre-Lune a-t-il pris naissance conjointement ? Comment expliquer la formation originelle du magnétisme terrestre ? Enfin, comment s’est effectué le refroidissement de la matière terrestre initiale, puis celui du globe lui-même ? On cherche à répondre à ces questions en tâchant de concilier les théories générales cosmiques avec des preuves tangibles de telle ou telle évolution, susceptibles d’être décelées par des observations directes (d’ordre géologique ou géophysique) faites sur la Terre ou sur la Lune.

Deux théories contraires se sont particulièrement affrontées : la Terre a-t-elle pris sa surface et son volume actuels par contraction ou par expansion ? Pendant longtemps on avait tablé sur un processus du premier type, avec formation de la croûte et de son relief, liée aux plissements correspondants, mais le processus par expansion paraît maintenant plus justifié, en dépit de son aspect paradoxal. Les causes déterminantes de ce choix sont, d’une part, une estimation plus correcte de l’ordre de grandeur de l’âge* de la Terre et, d’autre part, l’intervention des processus de libération d’énergie radioactive. En effet, livrée à un processus unique de refroidissement de l’intérieur vers l’extérieur, avec contraction et formation correspondante de la croûte, la Terre n’aurait dû mettre qu’une quarantaine de millions d’années pour atteindre son état actuel (problème de lord Kelvin) ; or, cette hypothèse s’oppose à un ensemble d’évidences géologiques (fossiles datables maintenant par l’analyse faisant appel aux radio-isotopes, durées des transformations géologiques, etc.). On admet, au contraire, que l’âge réel de la Terre et du système solaire est de l’ordre de 4,5 milliards d’années. Une théorie récente s’accorde avec ces nouvelles données : celle de l’expansion des fonds océaniques et de la dérive des continents, en développement des idées initiales d’Alfred Wegener (1880-1930). Selon cette théorie, la croûte qui forme le fond des océans (sous une couche d’épaisseur très variable de sédiments) émanerait d’une remontée continue d’un magma de caractère basaltique, s’épanchant en surface à partir des dorsales océaniques, que l’on trouve en alignements plus ou moins continus ou ramifiés dans les zones médianes de la plupart des océans. C’est la poussée exercée par ces épanchements qui écarterait lentement les continents les uns des autres, de quelques centimètres par an, tout en participant à l’expansion générale de la surface du globe. Ce processus a pu être vérifié expérimentalement, bien qu’indirectement, par les anomalies magnétiques que présentent, d’une façon très générale, tous ces fonds marins, qui sont distribuées symétriquement (d’une façon trop systématique pour que l’on puisse invoquer le hasard) par rapport aux dorsales correspondantes. La datation de ces fonds a permis de préciser les correspondances chronologiques entre leur formation et les variations paléomagnétiques du champ terrestre. Ces phénomènes sont liés aux processus dynamiques qui conditionnent, d’une part, les relations entre la croûte et les couches plus profondes de la Terre, et, d’autre part, la séparation de la surface du globe en océans et en continents.


Constitution interne

Bien que proche, la portion de l’espace située « sous nos pieds » s’est révélée d’une exploration beaucoup plus difficile que celle de l’espace proprement dit, même lointain. On ne connaît du globe terrestre, physiquement, qu’une épaisseur assez faible de sa croûte extérieure. Les sondages les plus profonds n’ont pas dépassé 8 000 m, et l’homme est descendu un peu au-delà de 3 500 m. Nos connaissances procèdent de moyens indirects et, presque uniquement, des méthodes sismiques en ce qui concerne les couches très profondes. On peut y ajouter les méthodes de prospection gravimétriques, magnétiques, électriques, électromagnétiques, thermiques, dont certaines peuvent pousser leurs investigations assez profondément (100 km ou même plus), mais seulement pour des caractères physiques déterminés (résistivité électrique par exemple).


Croûte

Cette appellation est ancienne, car elle a déjà été utilisée par Descartes, mais sa signification exacte a considérablement évolué. Actuellement, sa définition la plus précise s’appuie sur la discontinuité de Mohorovičić, le « Moho », que l’on retrouve tout autour du globe, bien qu’à des profondeurs variables et beaucoup plus faibles sous les océans (entre 5 et 15 km) que sous les continents (entre 30 et 50 km). De plus, le Moho s’enfoncerait, à divers degrés, sous les montagnes (exemple « racines des Alpes »), L’ensemble est lié à la théorie de l’isostasie*, rendue possible par l’assez faible densité de la croûte, composée en majeure partie de silice et d’alumine (sial). Il existe également un défaut d’uniformité de cette couche, même si on laisse de côté dans sa définition les zones sédimentaires proches de la surface. Enfin, la croûte subit continuellement des transformations profondes : plissements, formation et déformation du relief (orogenèse), érosions de toutes sortes, éruptions volcaniques avec montées de magma sous-jacent et épanchements de lave, etc.


Manteau

Il est subdivisé en manteau supérieur et en manteau inférieur. Seul le manteau supérieur paraît être affecté par les ruptures d’équilibre correspondant aux séismes. De plus, dans ses parties les moins profondes, au-dessus d’une région située vers 100-200 km, dite « zone à faible vitesse », et qui correspondrait à des températures élevées, il participerait à la dynamique de la croûte, notamment sous les océans. Cela explique l’importance donnée depuis quelques années aux études correspondantes, y compris le projet Mohole, en vue de forer à travers la croûte sous-marine jusqu’au Moho.