Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
T

tégument (suite)

Avec les Homéothermes (Oiseaux, Mammifères), un nouveau problème doit être résolu par le tégument : participer au maintien de la constance de la température interne, qui, suivant les circonstances, est plus élevée que celle du milieu extérieur (lutte contre le froid) ou moins élevée (lutte contre la chaleur). La lutte contre le froid est assurée d’une part grâce au rôle d’isolation thermique joué par des phanères denses : pelage des Mammifères, plumage des Oiseaux, et d’autre part grâce à la vaso-constriction, qui abaisse la température cutanée et, par suite, les pertes de chaleur. Ces mêmes processus interviennent dans la lutte contre la chaleur : pouvoir isolant des phanères, dilatation des vaisseaux cutanés, qui augmente la circulation tégumentaire, d’où élimination de la chaleur par radiation et convection. Cela suffit aux Oiseaux, dont la température corporelle est élevée, mais, chez les Mammifères, s’y ajoute l’abaissement de température obtenu par vaporisation de la sueur (sécrétion des glandes sudoripares, qui manquent chez les Oiseaux).

Le tégument peut encore intervenir efficacement contre l’agressivité physique du milieu grâce à sa pigmentation propre ou à celle des phanères (lutte contre l’insolation) ou contre l’agressivité « biologique » (v. homochromie, mimétisme). Dans la lutte contre les prédateurs, le tégument peut aussi jouer un rôle grâce à la présence de glandes venimeuses cutanées, fréquemment associées à des épines (notamment chez les Poissons). D’autres sécrétions cutanées interviennent dans le marquage du territoire ou la reconnaissance individuelle (glandes odoriférantes de nombreux Reptiles et Mammifères), tandis que chez les Poissons abyssaux des glandes tégumentaires lumineuses peuvent jouer le rôle de pièges.

J. Ch.

Téhéran

En persan Tehrān, capit. et v. principale de l’Iran ; 2 720 000 hab.



La métropole iranienne


La situation. Conditions et étapes du développement

La croissance de Téhéran a été tardive, même après son élévation au rang de capitale de l’Iran. Sa situation, trop excentrique dans l’ensemble du plateau iranien, n’était pas favorable au développement d’une métropole rayonnant sur la totalité du pays. Pourtant, ce sont bien les conditions générales de la vie de relations qui ont fixé l’emplacement de la ville, sur le piedmont méridional de l’Elbourz, à l’endroit précis où la route est-ouest se scinde en deux variantes de part et d’autre de la petite chaîne de l’Anti-Elbourz (parallèle au bourrelet principal) et à mi-chemin entre deux vallées (celles du Harāz à l’est et du Karadj à l’ouest, donnant accès à la Caspienne). Par ailleurs, les relations vers les grandes oasis de l’Iran central — Qom, puis Ispahan et les bassins du Fārs — restent relativement faciles, à l’ouest du Grand Kavir.

La ville importante qui s’était développée là, à Rey (Rayy) [aujourd’hui englobée dans l’agglomération téhéranaise, à une dizaine de kilomètres au sud du centre], accrochée à l’extrémité occidentale de l’Anti-Elbourz, fut ruinée par l’invasion mongole au xiiie s., et le centre urbain migra alors vers Téhéran, jusque-là gros village spécialisé dans les cultures maraîchères pour l’alimentation de la ville voisine, sur le glacis irrigué du pied de la montagne.

Dès le début du xve s., Téhéran fait figure de ville, bien que le trait final de la structure urbaine, la première muraille, ait été édifié seulement en 1553 par Chāh Ṭahmāsp Ier.

Les raisons précises qui conduisent Ārhā Muḥammad Chāh Qādjār (1779-1797), fondateur de la dynastie Qādjār, à fixer sa capitale dans la petite ville, qui devait compter alors une quinzaine de milliers d’habitants, ne sont pas connues. Mais on peut y voir la conjonction de plusieurs facteurs : proximité des terrains de parcours de sa tribu d’origine, turque, qui nomadisait dans le Gorgān et l’Elbourz ; intention stratégique face au danger russe, déjà perceptible au nord-ouest à cette époque, et à la menace des Turcomans de l’Atrek au nord-est ; poursuite d’une tradition de capitale nordique constante dans la politique iranienne et particulièrement dans les dynasties d’origine turque. Malgré sa valeur stratégique indiscutable, cette position restait trop excentrique pour que les tendances centrifuges ne fussent pas prépondérantes tant qu’une vigoureuse centralisation politique ne venait pas assurer le succès définitif de la nouvelle capitale. Or, l’unification de l’Iran restait encore bien faible sous les Qādjārs, l’autorité centrale, souvent contestée. La croissance de la ville, très lente (sans doute 60 000 hab. en 1820, 120 000 en 1860, 210 000 en 1922), exprime cette absence réelle de fonction de métropole. Le grand marché économique de l’Iran demeure par ailleurs, à l’époque, Tabriz, qui assure les liaisons avec l’Europe.

C’est l’œuvre unificatrice et réformatrice de Rezā Chāh Pahlavi qui provoque, à partir de 1925, les conditions politiques indispensables à l’essor d’une métropole. La population passe ainsi à 540 000 habitants en 1939, à 1 600 000 en 1956, à 2 700 000 au recensement de 1966, et dépasse sans doute 4 millions en 1977. Il s’agit d’une croissance inégalée dans tout le Moyen-Orient et d’un phénomène urbain à tous égards exceptionnel.


Rayonnement et activités

L’origine de la population n’est connue que de façon imparfaite. Il semble néanmoins, malgré cette croissance extraordinairement rapide, que le rayon de recrutement ne se soit élargi que progressivement et que le pouvoir d’attraction ne soit encore qu’à peine étendu à l’ensemble du pays. Si, en ce qui concerne les classes moyennes et supérieures, vite attirées par le siège du pouvoir qui s’affirmait avec force, Téhéran a été un centre d’appel pour la plus grande partie du pays et a vu se rassembler dès les années 1930 la plus grande partie de l’aristocratie foncière, des sondages effectués dans la main-d’œuvre ouvrière entre 1950 et 1960 montraient que le cercle d’immigration des classes inférieures était beaucoup plus localisé. Il se limitait à l’époque aux régions du nord et du nord-ouest du pays (régions de la Caspienne et Azerbaïdjan) et aux oasis du plateau jusqu’à Hamadhān et Ispahan, à l’exclusion totale du Zagros, tourné davantage vers les villes du Khuzestān et le bassin pétrolifère, et de tout l’est et le sud-est du pays. Téhéran ne remplissait encore que très imparfaitement sa fonction de métropole et portait toujours le poids de sa position excentrique dans le pays. À l’intérieur de cette zone d’attraction s’opérait une certaine ségrégation professionnelle, les iranophones du plateau central ou de l’Elbourz s’employant plus volontiers dans la domesticité, le petit commerce, les fonctions exigeant une certaine qualification, au moins linguistique, tandis que les Azéris constituaient plutôt la main-d’œuvre la plus fruste, notamment dans les entreprises de construction, et la grande masse des immigrants temporaires des chantiers. C’est seulement depuis les années 1960 que le rayon d’influence semble s’être élargi, englobant maintenant le Kurdistān, dont les rudes montagnards relaient les Azéris pour les gros travaux, et le Khorāsān occidental. L’influence semble encore très faible sur l’extrême sud et le sud-est du pays.