Tcheou et Royaumes combattants (suite)
À partir du viiie s., les Zhou perdent peu à peu toute autorité politique. L’art subit des changements plus profonds : le décor s’aplatit, les motifs en relief des bronzes sont moins aigus et, se détachant sur un fond nu, se réduisent parfois à des bandes ceinturant le col et la base des vases. Le masque de taotie (t’ao-t’ie), élément essentiel de la grammaire décorative Shang, est relégué sur les anses. Les inscriptions des vases rituels s’allongent : plus explicites, elles donnent des renseignements qui permettent de les dater (circonstances de la fonte, nom du destinataire). La céramique blanche, faite au tour, disparaît complètement, cependant que des vases en céramique revêtus de couverte indiquent des recherches techniques de plus en plus poussées. Les sculptures zoomorphes en ronde bosse des Shang n’ont pas d’équivalent dans l’art des Zhou. Dans le travail du jade, on voit apparaître des copies de l’outillage néolithique (houes, haches). L’art du laque* se développe de plus en plus.
À l’époque des Royaumes combattants (453-221 av. J.-C.), de grandes principautés groupées autour du royaume Zhou, comme celle de Qin (Ts’in) à l’ouest, de Chu (Tch’ou), de Wu (Wou) et de Yue au sud, s’organisent et se disputent âprement le pouvoir. Ces luttes se termineront par le triomphe du prince de Qin.
L’économie et l’ancienne civilisation chinoises subissent de profondes transformations, dues en partie à l’emploi de la fonte de fer dans l’outillage agricole et à l’extension de l’irrigation. Les différentes cours princières rivalisent de luxe. L’art devient plus profane, plus individuel, il dénote un goût plus marqué pour l’ornementation et un progrès du sens de l’observation. Dans le cadre d’un style commun, des variantes régionales se dégagent. On remet en honneur certaines formes et motifs Shang : le vase tripode, le masque de taotie, les incrustations de turquoise et de malachite. À celles-ci s’ajoutent celles de cuivre, d’argent et d’or. En bandes plates et souples, elles animent la surface des vases, des armes et d’ornements divers. Par ailleurs, un élément nouveau, le « crochet en forme de virgule », souvent disposé en tous sens, crée dans le décor une impression de vie intense. Les agrafes et les miroirs en bronze, originaires d’Asie occidentale, présentent un répertoire très varié qui permet de suivre l’évolution des techniques et du goût de cette période.
La pression des peuples nomades septentrionaux s’accentue à tel point que, pour lutter contre eux, les Chinois sont conduits à adopter leur cavalerie, leurs armements et leurs harnachements. On voit alors se développer dans le décor de nouveaux motifs, animaux à la tête retournée, cordelettes tordues ou tressées. Les couvercles réversibles des vases sont surmontés d’animaux, d’oiseaux traités dans un style naturaliste. Cet intérêt pour la représentation humaine et animale se retrouve sur des vases dits « de chasse », dont la décoration en registres représente le plus souvent des scènes de tir à l’arc, de chasse et de cueillette des feuilles de mûrier.
Dans le royaume de Chu (Chine centrale), à Changsha (Tch’ang-cha), les fouilles archéologiques ont livré un matériel fort intéressant : objets en bronze, figurines en bois, céramiques, etc. Des boîtes, des coupes, des cercueils, des ornements divers en bois revêtus de laque polychrome sont parmi les pièces les plus belles. En effet, l’art du laque a connu dans cette région un raffinement très particulier. Il influence les motifs décoratifs appliqués sur les bronzes. En 1949, dans une tombe de Changsha, on a découvert la plus ancienne peinture chinoise sur soie, représentant une femme en prière. Et une autre sépulture, fouillée en 1954, a révélé le premier pinceau connu, encore conservé dans son étui de bambou laqué.
C. V.
➙ Chine.
W. Watson, China before the Han Dynasty (Londres, 1961). / Cheng Te-k’un, Archeology in China, tome III : Chou China (Buffalo, N. Y., 1963).