Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
T

Tchaïkovski (Petr Ilitch)

Compositeur russe (Votkinsk 1840 - Saint-Pétersbourg 1893).


Son père est ingénieur des mines ; sa mère, d’origine française, lui révèle la musique. Dès ses premières années, l’enfant montre un goût très vif et de grandes dispositions pour l’art des sons, mais il n’étudie qu’assez irrégulièrement le piano et le chant. À douze ans, il entre à l’école de droit de Saint-Pétersbourg, dont il sortira diplômé en 1859. Il trouve alors un emploi au ministère de la Justice. En 1862, il s’inscrit au Conservatoire de Saint-Pétersbourg, nouvellement créé. L’année suivante, il quitte le ministère, afin de se consacrer entièrement à la musique. Ses maîtres sont Nikolaï I. Zaremba (1821-1879), formé à l’école allemande, et Anton G. Rubinstein (1829-1894). Tchaïkovski achève ses études en 1865 avec la composition d’une cantate sur l’Ode à la joie de Schiller. Ses premières œuvres ne rencontrent guère de succès. Malgré sa nomination au conservatoire de Moscou en 1866, comme professeur de théorie, il mène une existence précaire jusqu’en 1876, où une admiratrice très fortunée, Nadejda von Meck, lui verse régulièrement une pension annuelle de 6 000 roubles. Il peut alors se livrer entièrement à la composition. Il quitte son poste au conservatoire et fait de fréquents séjours à l’étranger : Suisse, Italie, France. Jamais il ne rencontrera sa bienfaitrice, mais il échangera une abondante correspondance avec elle jusqu’en 1890, année où celle-ci rompra avec lui.

En 1877, il a épousé une de ses anciennes élèves pour faire taire les bruits désobligeants circulant à son sujet. Cette union se termine très vite par une tentative de suicide du compositeur.

Les relations de celui-ci avec le groupe des Cinq* ne sont guère chaleureuses. Tchaïkovski méprise l’art de Moussorgski et n’apprécie que celui de Rimski-Korsakov et de Balakirev. Vers 1880, à quarante ans, il commence à être considéré comme compositeur ; il reçoit des commandes officielles, dirige ses œuvres en Russie et à l’étranger. Il entreprend une tournée européenne en 1888 et obtient un très grand succès au cours d’un voyage aux États-Unis en 1891. Deux ans plus tard, il meurt, emporté par le choléra.

Dès ses premières années, Tchaïkovski fut atteint par des troubles dus à une hypersensibilité maladive et à un tempérament volontiers dépressif, qu’il conserva toute son existence. Son œuvre reflète sa personnalité et se présente comme l’écho douloureux de sa propre lutte contre ce qu’il pense être un destin impitoyable. Aussi s’attache-t-il aux formes occidentales de la symphonie et du concerto, qui lui permettent de développer son idée fixe. S’il veut mettre en musique des personnages, il choisit de préférence ceux qui sont marqués par la destinée : Roméo et Juliette, Hamlet, Eugène Onéguine, la Dame de pique. La mélodie populaire russe illustre abondamment sa musique, mais Tchaïkovski lui enlève une partie de sa couleur nationale en la soumettant à une rythmique et à une harmonie occidentales. Les thèmes qui lui appartiennent sont toujours amples, d’un lyrisme qui confine parfois à la mièvrerie. Ses rythmes s’apparentent souvent à la danse, et le principe du leitmotiv se retrouve dans toute son œuvre. Orchestrateur remarquable par le chatoiement du coloris instrumental, Tchaïkovski est aussi le représentant le plus important de la symphonie en Russie à son époque.

Les œuvres de Tchaïkovski

• piano : une centaine de compositions, dont 2 sonates (1865, 1878).

• musique de chambre : 3 quatuors à cordes (1871, 1874, 1876) ; 1 trio pour violon, violoncelle et piano (1882) ; 1 sextuor à cordes (1887-1892 [Souvenir de Florence]).

• musique symphonique : 5 ouvertures, dont l’Orage (1864), Ouverture solennelle « 1812 » (1880) ; 7 symphonies : 1re (1866 [Songes d’hiver] ; 3e version, 1874), 2e (1872 ; 2e version, 1879), 3e (1875), 4e (1877), Symphonie Manfred (1855), 5e (1888), 6e (1893) [Symphonie pathétique]) ; Fatum (1868), poème symphonique ; 4 fantaisies-ouvertures : Roméo et Juliette (3 versions : 1869, 1870, 1880), la Tempête (1873), Francesca da Rimini (1876), Hamlet (1888) ; 4 suites (1879, 1883, 1884, 1887 [Mozartiana]) ; Capriccio italien (1880) ; suite du ballet Casse-Noisette (1892) ; 3 concertos pour piano (1875, 1880, 1893) ; Concerto pour violon (1878) ; Variations sur un thème rococo pour violoncelle et orchestre (1876) ; etc.

• musique vocale : nombreuses mélodies ; œuvres de musique d’église ; Moscou (1883), cantate pour mezzo-soprano, baryton, chœur et orchestre ; Roméo et Juliette (1893), pour soprano, ténor et orchestre.

• musique théâtrale : 10 opéras, dont le Voïvode (1868 ; 1re représ., 1879), Opritchnick (1872 ; 1re représ., 1874), Eugène Onéguine (1878 ; 1re représ., 1879), la Pucelle d’Orléans (1879 ; 1re représ., 1881), Mazeppa (1883), l’Ensorceleuse (1887), la Dame de pique (1890), Yolanta (1891 ; 1re représ., 1892).

• ballets : le Lac des cygnes (1876), la Belle au bois dormant (1889), Casse-Noisette (1892).

• musique de scène : Snegourotchka (1873), Hamlet (1891), etc.

Y. de B.

 B. P. Jurgenson, Catalogue thématique des œuvres de P. Tchaïkovsky (Moscou, 1897 ; nouv. éd. par H. Baron, Londres, 1965). / M. I. Tchaïkovsky, la Vie de P. I. Tchaïkovsky (en russe, Moscou et Leipzig, 1900-1902 ; 3 vol.). / R. Hofmann, Tchaïkovski (Éd. du Seuil, coll. « Microcosme », 1959). / G. Erismann, Tchaïkovski (Seghers, 1964). / G. Juramie, Tchaïkovski (Hachette, 1970).

tch’an et zen dans l’art

Pendant environ dix siècles, la Chine, la Corée et le Japon connaissent une doctrine religieuse qui pénètre tous les domaines de leur culture. Le bouddhisme* chan (tch’an) apparaît en Chine au début du vie s. et devient dans la seconde moitié du ixe s. l’institution spirituelle la plus influente dans le développement de la culture chinoise. Il atteint son apogée sous la dynastie des Song du Sud (1127-1279). C’est à cette époque que Dōgen (v. 1200-1253) et Eisai (1141-1215) arrivent du Japon, suivis bientôt par de nombreux moines-lettrés japonais venus s’initier au chan. Cette doctrine pénètre au Japon, sous le nom de zen, à l’époque Kamakura (1192-1333) et y trouve une terre d’élection. Elle y connaîtra son plein épanouissement aux xve, xvie et xviie s., transformant l’esthétique et la vie japonaises.