Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

sûreté de l’État (atteintes à la) (suite)

Le régime des peines

Tous les crimes et délits contre la sûreté de l’État doivent être considérés comme des infractions politiques. Il s’en déduit qu’en cas de crime le coupable encourra l’une des peines politiques prévue par le Code pénal : la mort (par fusillade), la détention* criminelle à perpétuité, la détention criminelle à temps, le bannissement ou la dégradation civique. En cas de délit, il sera passible de l’emprisonnement et de l’amende, comme en droit commun, sous réserve de certaines faveurs concédées par la pratique administrative en matière de détention : dispense de travail pénal et de costume pénal, détention dans des locaux distincts, droit (sur autorisation du ministre de la Justice) de faire venir du dehors à ses frais des livres ou des journaux.

La détention, inconnue du Code pénal, a été prévue par la loi du 28 avril 1832. L’ordonnance du 4 juin 1960 lui fait remplacer la déportation, la détention pouvant, dans ce cas, être perpétuelle. C’est une peine afflictive et infamante, dont les peines accessoires sont celles qui sont attachées à la réclusion criminelle à temps (en cas de détention temporaire) ou celles qui sont attachées à la peine de mort (en cas de détention perpétuelle).

Il faut ajouter qu’en dehors des peines accessoires attachées par le droit commun aux condamnations criminelles le Code pénal assortit les crimes et délits contre la sûreté de l’État de peines complémentaires : interdiction de séjour, privation des droits de l’article 42 du Code pénal, confiscation spéciale ou confiscation générale.

Les règles générales concernant la tentative, la complicité et le recel sont applicables à ces infractions, sous réserve de quelques particularités en ce qui concerne la complicité et le recel. Les circonstances atténuantes et le sursis simple sont aussi applicables dans les conditions du droit commun. La contrainte par corps n’existe pas en matière politique, et l’extradition ne joue pas pour les infractions contre la sûreté de l’État, sauf entre pays alliés ou en cas de guerre contre un ennemi commun. Enfin, le législateur accorde une exemption de peine à l’individu qui, avant toute exécution ou tentative d’un crime ou d’un délit contre la sûreté de l’État, en donne, le premier, connaissance aux autorités administratives ou judiciaires ; il s’agit là d’une excuse légale absolutoire, qui exempte de peine le coupable, mais le laisse passible de l’interdiction de séjour ainsi que de la privation des droits de l’article 42 du Code pénal.

En temps de paix, les infractions contre la sûreté de l’État sont jugées par la Cour de sûreté de l’État (v. justice [organisation de la]). L’action publique est mise en mouvement par le ministère public près cette Cour, sur ordre écrit du ministre de la Justice. Certaines règles particulières de procédure sont applicables. En temps de guerre, les infractions sont jugées par les tribunaux des forces armées (v. justice [organisation de la]). Le ministre des Armées, et, sous son autorité, les commissaires du gouvernement, exercent l’action publique.

J. B.

sûretés

Garanties spéciales d’exécution des obligations offertes par les débiteurs à leurs créanciers.


Tout créancier a un droit de gage général sur le patrimoine* de son débiteur ; mais ce droit n’est pas une bonne garantie d’exécution de l’obligation par le débiteur : il ne confère au créancier aucun droit particulier sur les biens composant ce patrimoine ; le débiteur malhonnête peut organiser son insolvabilité avant l’échéance ou le débiteur malchanceux peut tomber dans la misère ; en outre, tous les créanciers ordinaires sont placés sur un pied d’égalité : il n’existe aucune cause de préférence entre eux ; sont payés ceux qui se présentent les premiers. Le créancier avisé ne se contente donc pas de son droit de gage général et demande au débiteur de lui fournir une meilleure garantie d’exécution de son obligation : il s’agit des sûretés.


Les sûretés personnelles

Le créancier peut d’abord demander au débiteur de trouver une tierce personne qui accepte de s’engager à ses côtés. La garantie de paiement est donc ici fournie par cette tierce personne, sur le patrimoine de laquelle le créancier acquiert un droit de gage général, qui s’ajoute au gage sur le patrimoine du débiteur principal. Le meilleur exemple est offert par le cautionnement, contrat* par lequel une personne appelée caution promet au créancier d’exécuter les obligations du débiteur principal si celui-ci ne tient pas ses engagements. Il peut y avoir plusieurs cautions pour une même dette. L’engagement de la caution est plus ou moins complet : on distingue le cautionnement simple et le cautionnement solidaire.

Dans le cautionnement simple, la caution est tenue d’exécuter l’obligation en cas de carence du débiteur principal, quitte à exercer un recours contre ce dernier au cas où elle paierait à sa place. Le créancier qui se heurte à un refus d’exécution du débiteur principal s’adresse donc à la caution. Celle-ci peut invoquer le « bénéfice de discussion » : il s’agit du droit pour la caution poursuivie de demander au créancier de saisir d’abord les biens du débiteur principal. S’il y a plusieurs cautions, celles-ci disposent aussi du « bénéfice de division », qui oblige le créancier à les poursuivre séparément, chacune pour sa part.

Dans le cautionnement solidaire, la ou les cautions perdent le bénéfice de discussion et celui de division, de telle sorte que la situation du créancier est très simplifiée.

Les sûretés personnelles ne sont pas de bonnes sûretés : le créancier, à l’échéance de sa créance*, peut très bien se trouver en face d’un débiteur principal et d’une caution se révélant tous d’eux insolvables.


Les sûretés réelles

Elles résultent de l’affectation par le débiteur d’un ou de plusieurs biens à la garantie du créancier. À partir de cette affectation, le créancier devient titulaire sur ce ou ces biens d’un droit réel que les autres créanciers du même débiteur n’ont pas. Ce droit réel lui permet, en effet, de retenir la chose qui lui a été affectée, si elle se trouve entre ses mains (droit de rétention) ; mais surtout le créancier a le droit de faire vendre cette chose et d’être préféré à tous les autres créanciers du débiteur sur le prix de vente (droit de préférence) ; et il a le droit de suivre la chose entre les mains des tiers acquéreurs (droit de suite). Il n’a donc à craindre ni la concurrence des autres créanciers du débiteur, ni la malhonnêteté de celui-ci. Plusieurs classifications des sûretés réelles peuvent être opérées : il faut retenir surtout la distinction entre les sûretés qui entraînent la dépossession du débiteur et celles qui laissent le débiteur en possession du bien objet de la sûreté (ces dernières, économiquement plus commodes, ont pris le pas sur les précédentes).