supraconductivité (suite)
Ce champ magnétique, susceptible de faire cesser la supraconductivité, peut être extérieur au supraconducteur ou être produit par le courant électrique qui y circule. Or, tout champ magnétique créé par un courant est proportionnel à l’intensité de ce dernier ; il existe donc une limite à l’intensité du courant qui peut parcourir un supraconducteur ; elle est directement liée à la valeur du champ magnétique critique. Par exemple, l’alliage niobium-titane, dans l’hélium liquide, ne peut être parcouru par un courant dépassant 2.104 A/cm2, alors que, dans les mêmes conditions, l’alliage niobium-étain peut supporter une densité de courant dépassant 106 A/cm2.
La compréhension du mécanisme de cette « superfluidité » des électrons du supraconducteur, ainsi que celle de la propriété complémentaire du diamagnétisme parfait, n’a été obtenue qu’en 1957 par trois physiciens de l’université de l’Illinois, John Bardeen, Leon N. Cooper et John Robert Schrieffer (prix Nobel de physique en 1972). Le mécanisme proposé par ces trois auteurs met en jeu la formation de « paires » d’électrons responsables de l’état supraconducteur, l’énergie de couplage d’une paire étant supérieure à l’énergie d’agitation thermique, qui est proportionnelle à la température absolue. On peut alors dire, en simplifiant, que l’un des électrons attire l’autre dans son « sillage ». Plusieurs mécanismes ont été proposés pour expliquer une interaction attractive suffisamment forte pour vaincre la répulsion coulombienne entre électrons. Certains permettent même d’envisager la possibilité d’un état supraconducteur à la température ordinaire. Par contre, la prédiction de la présence ou de l’absence de supraconductivité d’un corps donné reste encore très partielle.
Les applications de la supraconductivité commencent seulement à se développer. On peut citer :
— les électro-aimants supraconducteurs, étudiés en particulier pour les nouveaux accélérateurs de particules et qui permettent d’obtenir des champs magnétiques de 5 à 20 teslas ;
— le Cryotron, qui entre dans la réalisation de circuits complexes, et notamment des calculateurs électroniques. Un fil de tantale, par exemple (Tc = 4,25 K), est entouré par un enroulement réalisé avec un fil de niobium-titane (Tc = 9,7 K), et le tout est placé dans de l’hélium liquide (T = 4,2 K). Un courant passant dans l’enroulement de niobium-titane peut créer un champ magnétique capable de faire cesser la supraconductivité du fil de tantale sans faire cesser celle du niobium-titane. Ainsi, avec très peu d’énergie, puisque l’enroulement de commande reste supraconducteur, on peut contrôler et même annuler le courant passant dans le fil de tantale en faisant varier la résistance de celui-ci dans un rapport énorme.
On songe même à utiliser la supraconductivité pour supprimer les pertes dans le transport d’énergie électrique à grande distance.
A. T.
E. A. Lynton, Superconductivity (Londres et New York, 1962, 2e éd., 1964 ; trad. fr. la Supraconductivité, Dunod, 1964). / M. Tinkham, Superconductivity (New York, 1965). / A. W. B. Taylor, Superconductivity (Londres, 1970).