Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

superfluidité (suite)

L’observation, grâce à l’atténuation du second son, des étapes successives de la déformation des tourbillons créés par rotation, mais soumis également à l’action supplémentaire d’un courant superfluide de vitesse vs, perpendiculaire ou parallèle à l’axe de rotation et auquel on peut associer une longueur d’onde de De Broglie λ = h/mvs, a permis d’établir ou de confirmer par l’expérience un certain nombre de propriétés fondamentales du réseau formé par ces tourbillons et des déformations que ceux-ci subissent en présence de courants superfluides superposés à la rotation.

En effet, le Soviétique V. K. Tkatchenko a établi que le réseau de tourbillons rectilignes, parallèles à l’axe, dans l’hélium en rotation, devait posséder une maille triangulaire et pouvoir propager le long des tourbillons des ondes collectives de torsion du réseau de tourbillons avec une vitesse de propagation ν est le nombre de tours par unité de temps.

Or, la mesure, par un groupe de chercheurs français, de l’atténuation du second son a montré récemment que la déformation des tourbillons apparaît lorsque la longueur d’onde λ associée au courant superfluide, devient égale à la distance d entre tourbillons, et que les étapes suivantes de la déformation débutent pour des valeurs simples du rapport d/λ. De même, dans le cas où l’écoulement superfluide est parallèle à l’axe de rotation et si l’on introduit la longueur d’onde associée aux ondes de torsion, c’est le nombre λs/λ qui joue un rôle simple, semblable à celui qui est joué par d/λ dans le cas précédent. Le phénomène de déformation est alors analogue à l’effet Tcherenkov en optique ou au phénomène de Mach en aérodynamique supersonique.

De plus, les valeurs des atténuations mesurées ont entre elles des rapports très simples aux points de changement de pente ou sur les paliers des courbes obtenues dans deux directions respectivement normale et parallèle à l’axe de rotation. Ces rapports ont pu être comparés à des expressions théoriques tirées des propriétés déjà citées de l’atténuation du second son et de l’hypothèse que les tourbillons deviennent des hélices faisant des angles simples avec l’axe de rotation, cette déformation étant la manifestation macroscopique de la quantification spatiale du moment angulaire.

L’existence, dans l’hélium liquide II, de ces tourbillons quantifiés est d’ailleurs l’une des manifestations les plus profondes des analogies existant entre la superfluidité de l’hélium liquide et le phénomène de superfluidité des électrons couplés par paires, qui constitue la supraconductivité*. Dans un grand nombre de métaux et surtout d’alliages supraconducteurs, il existe également, en effet, en présence d’un champ d’induction, des « tourbillons », qui sont ici des tubes de flux d’induction quantifié, le quantum de flux étant h/2e, où e est la charge de l’électron. Ces tourbillons, dont le mouvement (sous l’action d’une force exercée par un courant électrique et qui est analogue à la force de Magnus) ou, au contraire, l’absence de mouvement, grâce à des « forces d’ancrage », revêtent une grande importance technologique, forment également un réseau triangulaire.

De cette analogie découle une caractéristique des systèmes superfluides, qu’il s’agisse des supraconducteurs ou de l’hélium II : l’existence des effets Josephson (du nom du chercheur britannique Brian D. Josephson, qui les a prévus théoriquement en 1962). L’un de ces effets, l’effet Josephson alternatif, se manifeste, pour des supraconducteurs, par des paliers dans les courbes du courant en fonction de la tension, en présence d’un champ électrique alternatif superposé à un champ continu et peut être interprété comme dû à des synchronisations de l’apparition et de la disparition des tourbillons, dont le défilement est associé à la tension continue, avec leur vibration imposée par le champ alternatif.

Un analogue de tels effets a pu être observé très récemment dans un écoulement vertical d’hélium liquide en présence du second son, dans lequel la pesanteur joue vraisemblablement un rôle analogue à celui d’un champ continu, le second son jouant le rôle du champ alternatif. L’atténuation du second son, qui se développe par paliers en fonction de la vitesse superfluide et qui mesure la densité de tourbillon, présente alors une allure analogue à celle de la tension en fonction du courant.

M. L. R.

 C. T. Lane, Superfluid Physics (New York, 1962). / I. M. Khalatnikov, Introduction to the Theory of Superfluidity (trad. du russe, New York, 1965). / R. J. Donnelly et coll., Experimental Superfluidity (Chicago, 1967).

superparamagnétisme

Sorte particulière de magnétisme.


Lorsqu’une substance ferromagnétique est subdivisée en grains suffisamment fins, de dimensions inférieures à l’épaisseur d’une paroi de Bloch, c’est-à-dire quelques centaines d’angströms pour le fer, chaque grain ne contient qu’un seul domaine élémentaire, puisque les parois n’ont pas la place de se former. L’aimantation est alors uniforme dans tout le grain et égale à l’aimantation spontanée Js. Un grain de volume v possède ainsi un moment magnétique MT de grandeur vJs.

En général, le grain est anisotrope, qu’il s’agisse soit d’une anisotropie propre à la substance elle-même, comme l’anisotropie magnétocristalline, soit d’une anisotropie de forme : plus ou moins grand allongement du grain. L’énergie du grain dépend donc de l’orientation de MT. Les directions d’énergie minimale sont dites « de facile aimantation » : ce sont celles que MT occupe aux très basses températures. Pour sauter d’une de ces directions à une autre, MT doit franchir une barrière de potentiel de hauteur W proportionnelle au volume du grain.

Deux éventualités se présentent alors, selon les valeurs comparées de W et de l’énergie d’agitation thermique kT (k étant la constante de Planck et T la température absolue).