Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Suisse (suite)

 P. Godet, Histoire littéraire de la Suisse française (Fischbacher, 1889 ; nouv. éd., 1894). / V. Rossel, Histoire littéraire de la Suisse romande (Kahn, Neuchâtel, 1889 ; nouv éd., 1904). / G. Decurtins, Rätoromanische Chrestomathie (Erlangen, 1896-1919 ; 13 vol.). / G. de Reynold, Histoire littéraire de la Suisse au xviiie siècle, t. II (Bridel, Lausanne, 1912). / J. Nadler, Literaturgeschichte der deutschen Schweiz (Zurich et Leipzig, 1932). / E. Ermatinger, Dichtung und Geistesleben der deutschen Schweiz (Munich, 1933). / J. Moser, le Roman contemporain en Suisse allemande de Carl Spitteler à Jacob Schaffner (Freudweiler-Spiro, Lausanne, 1934). / Scrittori della Svizzera italiana (Bellinzona, 1936 ; 2 vol.). / P. Kohler, Histoire de la littérature française, t. III ; Du milieu du xixe s. à nos jours avec une histoire de la littérature romande (Payot, Lausanne, 1949). / C. Clerc, l’Âme d’un pays (Delachaux et Niestlé, Neuchâtel, 1950). / F. Filippini, Una corona di ricci (Bellinzona, 1950). / P. Lansel, Musa Romontscha (Anthologie) [Coire, 1950]. / A. Zäch, Die Dichtung der deutschen Schweiz (Zurich, 1951). / M. Weber-Perret, Écrivains romands, 1900-1950 (Éd. Vie, Lausanne, 1952). / F. Jost, la Suisse dans les lettres françaises au cours des âges (Éd. universitaires, Fribourg, 1956) ; Essais de littérature comparée (Éd. universitaires, Fribourg, 1964). / G. Calgari, Storia delle quattro letterature della Svizzera (Milan, 1958). / C. Guyot, Écrivains de Suisse française (Francke, Berne, 1961). / A. Berchtold, la Suisse romande au cap du xxe siècle (Payot, Lausanne, 1964). / K. Marti, Die Schweiz und ihre Schriftsteller (Zurich, 1966). / J. Chessex, les Saintes Écritures (Lausanne, 1972). / M. Gsteiger, Die zeitgenössischen Literaturen der Schweiz (Zurich et Munich, 1974). / G. Mützenberg, Destin de la langue et de la littérature rhéto-romanes (Lausanne, 1974).


L’art en Suisse


La préhistoire et la protohistoire

À la fin de l’ère paléolithique (v. 50000-8000 av. J.-C.), dans les parties non recouvertes de glace du Jura, apparaissent, sous forme de dessins rupestres découverts dans les cavernes de Wildkirchli, de Kesslerloch, de Veyrier-du-Lac, les premières manifestations d’un art qui ne trouvera son développement que plusieurs millénaires après, au Néolithique (v. 5000-1800 av. J.-C.), avec l’apparition des monuments de la civilisation mégalithique (dolmens, cromlechs...) et des cités lacustres, dont des vestiges ont été mis au jour au lac de Pfäffikon, à Steckborn, à Obermeilen (sur le lac de Zurich) et à Morges. Aux outils rudimentaires de silex poli du Paléolithique et du Néolithique succèdent, à l’âge du bronze et des métaux (à partir d’environ 1800 av. J.-C.), des armes, des parures et toutes sortes d’objets en bronze, fer, cuivre et or richement ornés, tels que les précieux spécimens découverts à la station de La Tène, petite rivière du lac de Neuchâtel (ve-ier s. av. J.-C. ; v. Celtes).


La conquête romaine et le haut Moyen Âge

C’est cependant lors de l’occupation de tout le pays des Helvètes par les Romains, durant un demi-millénaire, que l’art prit un essor qui ne devait plus se ralentir. Des fouilles à Avenches, à Augst, à Windisch, près de Brugg, à Martigny dans le Valais indiquent que des villes importantes s’édifièrent en ces lieux, suivies par des monastères, tels ceux de Saint-Maurice en Valais et de Saint-Victor à Genève.

Afin de contenir la poussée des Barbares, Rome fortifie le Rhin vers 270 et fonde Baie (Basilea) en 374. Cependant, v. 440, les Burgondes et les Alamans font, en occupant tout le pays, s’écrouler la puissance romaine. Les premiers, convertis au christianisme, s’installent dans la région de Genève et adoptent les coutumes gallo-romaines, les seconds, encore idolâtres, occupant l’actuelle Suisse alémanique. Ces deux peuples ont laissé des tombeaux, des ornements stylisés ayant appartenu à des chaires et à des chœurs d’églises, des manuscrits, des armes et des bijoux champ-levés, des boucles de ceinture incrustées d’argent. Le blockhaus est un type d’habitation de bois en grande partie dû aux Alamans. De l’architecture des Burgondes subsiste le baptistère de Riva San Vitale (Tessin), construit en l’an 500.

Vers 612, des moines venus d’Irlande, ayant à leur tête les missionnaires Colomban (v. 540-615) et Gall, introduisent le christianisme dans les régions occupées par les Alamans. L’abbaye fondée à l’emplacement de l’actuelle ville de Saint-Gall* deviendra au ixe s. un haut lieu spirituel et artistique. De l’époque carolingienne (viiie-xe s.) subsistent de petites églises à trois absides et nef unique de la région rhétique (Saint-Jean de Munster), dans lesquelles apparaissent les premiers éléments de l’art roman primitif, ainsi que les couvents alpins de Pfäfers, de Disentis, celui d’Einsiedeln, reconstruit au xviiie s. À ce groupe se rattache l’église de Zillis, dont le plafond peint est le plus ancien conservé en Europe.


L’art roman

Le roman se développe sur tout le territoire avec des caractéristiques diverses dues aux influences des pays limitrophes. Une place à part doit être faite à l’église abbatiale de Romain-môtier (début du xie s.), monument de l’art roman le plus célèbre en Suisse, et à celle de Payerne (fin du xe s.-xiie s.), toutes deux inspirées de l’architecture clunisienne. Mais, alors que la cathédrale de Schaffhouse (abbatiale de l’ancien couvent Allerheiligen, xiie s.) perpétue l’art roman allemand, que Saint-Pierre de Clages en Valais, la cathédrale de Coire, le chœur de la cathédrale de Genève subissent l’influence du roman français, le style lombard imprègne par contre les églises tessinoises de Giornico, de Muralto, près de Locarno, le Grossmünster de Zurich et certaines parties de la cathédrale de Bâle*, qui, avec sa porte Saint-Gall et ses six figures d’apôtres, conserve quelques-uns des plus beaux spécimens de la sculpture romane.


L’art gothique

Les Cisterciens vont dès le xiie s. introduire l’art gothique, ses hardiesses, son élégance. C’est sous l’influence de la Bourgogne que s’érigent en Suisse romande l’église Notre-Dame-de-Valère, à Sion, la collégiale de Neuchâtel et surtout les cathédrales de Genève et de Lausanne, cette dernière appartenant pour l’essentiel au xiiie s. avec son portail méridional richement sculpté. Les cathédrales de Berne et de Fribourg (xiiie-xve s.), les anciennes abbatiales de Königsfelden (en Argovie) et de Kappel (canton de Zurich) appartiennent par contre à un gothique tardif, de même que les églises monumentales valaisannes de Glis, de Rarogne, de Saint-Théodule de Sion, construites au xvie s. par l’architecte Ulrich Ruffiner. Alors que les églises de la région de Winterthur se signalent par leurs fresques, celles de Königsfelden et de Kappel possèdent de remarquables vitraux. L’art gothique se retrouve encore dans la dalle funéraire du chevalier Ulrich II von Regensberg (Musée national, Zurich), les statues du portail sud de la cathédrale de Fribourg, le mausolée de François de La Sarraz († 1363) à La Sarraz, au gisant d’un réalisme effrayant, ou encore dans les fontaines du marché aux poissons de Bâle, du marché aux vins de Lucerne.

Mais les ordres religieux et l’Église ne sont pas les seuls à adopter le gothique. Les militaires, l’aristocratie, puis les bourgeois l’accaparent à leur tour, modifiant ou construisant, entre autres, les châteaux forts de Chillon, sur le Léman, de Grandson, sur le lac de Neuchâtel, de Gruyères, les hôtels de ville de Zoug et de Bâle...