Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Suisse (suite)

Le commerce extérieur

Malgré des exportations industrielles nombreuses, le bilan du commerce extérieur est négatif. Les productions de la construction électrique et mécanique, de la chimie industrielle constituent plus des deux tiers des exportations, bien loin devant les traditionnelles ventes de produits laitiers et de tabac. L’Allemagne est nettement le principal partenaire commercial (surtout aux importations), devançant d’autres pays limitrophes (France et Italie). La place du commerce extérieur est bien marquée par le fait que les exportations suisses représentent au moins en valeur le quart du produit national brut. Toutefois, les revenus des capitaux suisses à l’étranger et le tourisme permettent à la Suisse d’équilibrer sa balance des comptes.


Les villes suisses

Il peut paraître anormal de séparer l’étude urbaine de l’étude régionale. Cette séparation se justifie cependant, car les villes, tout en imprégnant leur environnement de leurs caractères propres, expriment aujourd’hui plus que jamais l’originalité de la Suisse. Aussi doit-on considérer les villes sous un quintuple aspect : elles concentrent de plus en plus la population suisse (sans oublier la main-d’œuvre étrangère) ; elles sont les foyers de la prospérité nationale, l’industrie suisse étant une industrie des villes ; le système bancaire, qui permet les relations internationales, est un phénomène urbain ; les villes suisses ont évolué dans un cadre cantonal, ce qui a favorisé le maintien de leur originalité politique, économique et culturelle ; cependant, les nécessités de la vie moderne engendrent une unification, une certaine centralisation au niveau des décisions économiques, voire politiques, et la centralisation fédérale gagne du terrain. Les grands industriels et les grands financiers regardent aujourd’hui plus volontiers vers Berne que vers leur canton d’origine.


Les facteurs d’urbanisation

• Évolution de la population urbaine et industrialisation. Le rôle croissant joué par la Suisse à partir de la fin du xixe s. est lié au développement de l’armature urbaine. Ne disposant d’aucune matière première importante, la Suisse ne présente pas de régions industrielles du type anglais ou allemand. L’industrie, d’un niveau technologique élevé, a été un facteur d’urbanisation, comme en témoigne l’horlogerie. Activité rurale d’appoint pour les paysans ayant des loisirs forcés en hiver, la fabrication des horloges et des montres a d’abord été le fait des campagnes. Puis, surtout dans la seconde moitié du xixe s., elle s’est concentrée dans des ateliers spécialisés qui se développèrent dans les bourgs et les petites villes. Le Locle, La Chaux-de-Fonds sont des villes nées de l’industrie horlogère, des villes industrielles sans fumées. Bien que 50 p. 100 des actifs travaillent dans l’industrie (et l’artisanat), les zones industrielles, mis à part quelques exceptions, marquent moins les villes suisses que les villes industrielles allemandes ou anglaises. La plupart des villes horlogères sont des villes de montagne : La Chaux-de-Fonds est située à 997 m et est une des plus hautes cités d’Europe, Le Locle est à 925 m et Saint-Imier à 826 m.

Les Alpes sont plus pauvres en villes. Le ferment industriel y a été moins actif. Fonction de passage, rôle administratif et tourisme l’emportent sur le travail industriel. Coire, Gruyères, Glaris, Sargans, par exemple, doivent leur importance à leur situation sur les grandes voies européennes. Il en va de même des villes du Tessin, où la fonction touristique, de création plus récente, s’est greffée sur les activités traditionnelles. L’arrivée du chemin de fer, au xixe s., a accentué l’importance de maint bourg alpin. Cependant, ce sont les villes du Mittelland qui en ont le plus profité.

Au milieu du xixe s., les quatre grandes villes actuelles (Zurich, Berne, Bâle, Genève) n’étaient encore que des cités de moyenne importance. Leur influence s’exerçait, avant tout, à l’intérieur du canton. Le chemin de fer leur a permis de déborder très largement le cadre administratif traditionnel. C’est à partir de 1880 que l’industrialisation et l’urbanisation de la Suisse ont fait de rapides progrès ; cette époque marque aussi l’internationalisation du pays avec la naissance du tourisme et des sports d’hiver, ainsi qu’avec l’essor de la banque internationale.

• Rôle des grandes percées alpines. La percée des tunnels alpins fit de la Suisse la zone de passage obligatoire pour les relations ferroviaires entre le nord et le sud de l’Europe de l’Ouest. Le premier tunnel creusé fut celui du Hauenstein, en 1852 (longueur 2 495 m) qui, terminé en 1857, était alors le plus long d’Europe. Le tunnel du Saint-Gothard fut commencé en 1872 et achevé en 1882. C’est le type du tunnel de base, par opposition aux premiers ouvrages, qui se situaient plus haut. En effet, il s’ouvre à 1 109 m à Göschenen et à 1 142 m à Airolo, et sa pente est faible (longueur 14,9 km).

Le tunnel du Lötschberg, sur la voie du Simplon, fut creusé entre 1906 et 1911. Les issues se trouvent respectivement à 1 243 et à 1 218 m (longueur 14,6 km). Le Simplon relie la vallée du haut Rhône et l’Italie (longueur 19,7 km). En réalité, il s’agit de deux tunnels à une voie chacune, séparés par un intervalle de 17 m ; au centre, un croisement permet de passer de l’un à l’autre tunnel. Si le Saint-Gothard a été financé par l’Allemagne et l’Italie, la ligne (et les tunnels) du Berne-Lötschberg-Simplon l’ont été, principalement, par la France. Le financement des grandes percées alpines est une autre illustration de l’« internationalisation » de la Suisse à la fin du xixe et au début du xxe s.

Au total, les voies ferrées comptent près de 230 tunnels. Grâce à ces gigantesques travaux d’infrastructure, la traversée des Alpes est relativement aisée. Au lieu d’être des régions d’émigration, les cantons montagnards ont même vu leur population augmenter. Il y a un lien direct entre l’essor ferroviaire, le percement des grands tunnels et l’urbanisation. Grâce aux grandes percées alpines, la Suisse n’est pas contournée, mais littéralement irriguée à partir de tous les pays de l’Europe de l’Ouest.