Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

Stroheim (Erich von)

Metteur en scène et acteur de cinéma américain d’origine autrichienne (Vienne 1885 - Maurepas, France, 1957).


Il fait ses études dans divers établissements militaires autrichiens avant de devenir, à dix-sept ans, officier de cavalerie. En 1909, il émigré aux États-Unis, où il fait rapidement partie de la cavalerie américaine. Il débute au cinéma en 1914 comme figurant dans Naissance d’une nation (de D. W. Griffith). Il est ensuite assistant de Griffith* dans Intolérance (1916) et Hearts of the World (1918), puis d’A. Dwan, de J. Emerson, de W. Ruggles, de G. Fitzmaurice et de A. Crosland.

Après avoir collaboré à plusieurs films comme directeur artistique ou conseiller militaire, il débute dans la mise en scène en 1919 avec Maris aveugles ou la Loi des montagnes (Blind Husbands), alors qu’il est déjà très connu comme comédien. Après un film mineur, le Passe-Partout du diable (The Devil’s Passkey, 1920), il connaît un triomphe international avec Folies de femmes (Foolish Wives, 1922), où il décrit avec cruauté l’Europe des années 20. Réputé metteur en scène dispendieux, il est chassé du tournage de Chevaux de bois (Merry-Go-Round, 1923), mais peut, cependant, entreprendre les Rapaces (Greed, 1925), où il donne libre cours à ses excès et à son naturalisme poétique. Tourné peu avant l’écroulement de Wall Street, ce dernier film apparaît aujourd’hui comme un modèle du cinéma réaliste, peignant la dégradation et l’ignominie de l’être humain, mais aussi sa tendresse, sa noblesse et sa pureté. L’œuvre ayant été massacrée au montage par June Mathis (qui la réduit de huit heures à trois heures de projection), Stroheim, désespéré, abandonne le réalisme pour tourner une commande, la Veuve joyeuse (The Merry Widow, 1925), qui remporte un succès considérable.

Sa réalisation suivante, la Symphonie nuptiale (The Wedding March, 1928), film en deux parties qui devait durer onze heures, lui fut enlevée pour être montée par J. von Sternberg*. Une fois de plus brimé par des producteurs tyranniques, Stroheim voit son œuvre déformée, mutilée, amoindrie. Projetée en France, celle-ci est interdite aux États-Unis. Malgré tout, Stroheim entreprend Queen Kelly (1928), film produit et joué par la star Gloria Swanson, et dont il ne peut mener à bien que le prologue. Non exploité en Amérique, ce film inachevé (notamment à cause de l’avènement du cinéma parlant) est sans doute l’œuvre la plus parfaitement maîtrisée, dans son délire, du cinéaste. De l’aveu même de celui-ci, Queen Kelly, plus encore que ses films précédents, visait à « raconter par le film un grand sujet de telle manière que le spectateur croie que ce qu’il regarde est réel ».

Stroheim réalise encore un film, Walking down Broadway (1932), que l’on dit assez anodin, puis abandonne à jamais sa carrière de réalisateur. Amer et désabusé, il écrit plusieurs livres, Poto-Poto, Paprika, les Feux de la Saint-Jean, qui prolongent tant bien que mal sa passion pour le ciné-roman, issu de la tradition littéraire du xixe s., puis il se consacre exclusivement à l’interprétation, imposant peu à peu un personnage antipathique, maniaque et mystérieux qui, tant aux États-Unis qu’en France, fera son succès. Pour le présenter au public, un slogan de l’époque le décrit ainsi : « L’homme que vous aimerez haïr. »

Cet homme vaincu par la dictature des studios (même son ultime film comme metteur en scène est monté par un autre que lui, le cinéaste A. Werker) sera le partenaire de G. Garbo dans Comme tu me veux (de G. Fitzmaurice, 1932, d’après L. Pirandello), l’officier allemand de la Grande Illusion (de J. Renoir, 1937), le criminel trouble de l’Alibi (de P. Chenal, 1937) et de nouveau un officier allemand, Rommel, dans les Cinq Secrets du désert (Five Graves to Cairo, de B. Wilder, 1943). Il jouera aussi au théâtre Arsenic et vieilles dentelles, croyant toujours, malgré tout, à son retour possible comme metteur en scène.

Retiré en France, où il tourne de nombreux films, de moins en moins intéressants au fur et à mesure qu’il avance en âge (de Pièges [1939], de R. Siodmak, à la Madone des Sleepings [1955], de H. Diamant-Berger, il tient des rôles souvent très brefs dans toute une production médiocre, comédie et films policiers), il ne franchit plus l’Atlantique qu’une seule fois, en 1950, pour tourner sous la direction de B. Wilder Sunset Boulevard, où il retrouve G. Swanson et B. Keaton*, à qui Wilder rend hommage. Ce film fait office de chant du cygne pour le star-system tel qu’on le pratiquait au temps du muet et dans lequel, somptueux, généreux et féroce, Erich von Stroheim occupait une des premières places.

Stroheim laisse peu de films, mais les innombrables projets qu’il formulait sans cesse prouvent bien que le cinéma, en voulant le limiter dans ses normes les plus commerciales, s’est privé d’un géant, auquel, parmi d’autres, O. Welles* et Fellini* doivent beaucoup. Son sens de l’espace, la profusion de ses thèmes et de ses personnages, et surtout sa vision du monde, cynique, avec de brusques flambées sadomasochistes, élégante et baroque, humaine en dépit de tout, font aujourd’hui de lui un visionnaire, dont chaque film dressait un réquisitoire sans appel contre une société, celle de l’argent, de la facilité et des compromissions, qui l’a brisé.

L’officier jeté dans l’égout à la fin de Folies de femmes symbolise bien la méfiance de Stroheim vis-à-vis de l’apparence et de l’hypocrisie des honneurs. Auteur maudit par excellence, Stroheim annonçait la décadence de notre civilisation, qui n’aime pas les prophètes. Mais le vol des Rapaces n’a pas fini de nous tourmenter.

M. G.

 D. Marion et B. Amengual, Stroheim, le mythe et la réalité (Lettres modernes, 1966). / T. Q. Curtiss, Erich von Stroheim (Éd. France - Empire, 1970). / F. Buache, Erich von Stroheim (Seghers, 1972).

structural (relief)

Relief dont les formes sont commandées par la nature et la disposition des roches qui en constituent l’ossature. L’étude des reliefs structuraux est appelée géomorphologie structurale.


Deux types d’influences de la structure sur le relief se manifestent.