Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

Stradivarius

Luthier italien (près de Crémone 1644 - Crémone 1737).


La célébrité et le mystère auréolent encore Antonio Stradivari (dit Stradivarius) plus de deux siècles après sa mort. En effet, si l’excellence de ses instruments s’impose à l’admiration, si la lutherie* vit toujours des principes qu’il a établis, le secret de cette transcendance se dérobe aux investigations scientifiques, celui de sa vie à la curiosité de l’historien.

Stradivarius naît en 1644 dans un petit village près de Crémone au foyer d’Alessandro Stradivari et d’Anna Moroni. Pas de luthiers parmi ses ancêtres. Est-ce une vocation déjà affirmée qui incite ses parents à le placer vers sa quatorzième année en apprentissage auprès de Nicola Amati (1596-1684), seul représentant, vers 1656, d’une des familles de luthiers les plus prestigieuses ? Chez lui, Stradivarius rencontrera d’autres élèves promis à la célébrité : Andrea Guarneri (v. 1626-1698), Giovanni Battista Rogeri (v. 1650 - v. 1730), Francesco Ruggieri (1650-1720). Il commence à produire vers 1665, sans prendre encore son autonomie, car N. Amati exerce son activité presque jusqu’au terme de sa longue vie ; le rayonnement du maître dut freiner au moins jusqu’en 1680 l’épanouissement de l’élève.

On distingue trois périodes dans l’œuvre de Stradivarius. La première, de 1680 à 1700, est une ère de recherche : grande mobilité dans les formes et les contours des instruments, influences de N. Amati et de Giovanni Paolo Maggini (1580 - v. 1632). La deuxième période, de 1700 à 1730, est celle de la maturité. Les modèles ne cessent de varier, mais une largeur de conception, un aspect solide et viril, les unissent, les libèrent des influences précédentes. Entre 1710 et 1720 naissent les instruments les plus célèbres. Les sept dernières années sont celles de la vieillesse. Stradivarius se contente de diriger la marche de son atelier, animé par ses deux fils et son dernier élève, Carlo Bergonzi (1686-1747), de conseiller, de dessiner filets ou F, dont l’irrégularité trahit une main moins sûre. Sa nouvelle étiquette ne porte plus que « Sotto la disciplina di Antonio Stradivari », en mentionnant parfois son âge : « de anni 89, 91 », etc.

Le 18 décembre 1737, Stradivarius s’éteint avant d’avoir atteint quatre-vingt-quatorze ans, laissant une production de plus de 1 100 instruments, dont 540 violons, 12 altos et 50 violoncelles.

On a attribué l’excellence de cette œuvre à un vernis dont la recette reste auréolée de mystère et de légende : le dernier héritier l’aurait découverte inscrite à la date de 1704 sur la couverture intérieure d’une Bible. Avant de la détruire, il en prit une copie qu’il n’a jamais divulguée. Certes, le vernis est l’un des facteurs sonores les plus importants, tant par les produits qui le composent que par le soin apporté à son séchage. Mais une œuvre d’art est une somme de perfections de détail. Le choix des bois, la construction, le réglage des proportions furent les constants soucis du maître. Aussi les sonorités varient-elles au sein d’une même qualité : pures, fines, d’émission aisée dans la première période ; plus graves, d’émission moins facile chez les « longuets » ; pleines, distinguées, brillantes et tendres enfin à partir de 1690. Parmi les onze enfants que Stradivarius eut de ses deux femmes, seuls ses fils Francesco (1671-1743) et Omobono (1679-1742) devaient continuer son œuvre, mais sans jamais retrouver son génie.

S. M.

➙ Lutherie / Violon.

 W. H. Hill, A. F. Hill et A. E. Hill, Antonio Stradivarius, his Life and Work (Londres, 1902, 2e éd., 1909 ; trad. fr. A. Stradivarius, sa vie et son œuvre, 1644-1737, Fischbacher, 1908). / S. F. Sacconi, I « Segreti » di Stradivari (Crémone, 1972).

Strasbourg

Ch.-l. du départ. du Bas-Rhin* et capit. de la Région Alsace* ; 257 303 hab. (Strasbourgeois). L’agglomération dépasse 370 000 hab.



La situation

Préfecture de Région, siège d’un évêché, d’une université renommée et de la Commission centrale du Rhin, Strasbourg est la métropole économique et culturelle des deux départements du Rhin. L’implantation du Conseil de l’Europe et du Parlement européen lui permet de renouer avec le cosmopolitisme médiéval.

Ville rhénane, Strasbourg s’est, toutefois, développée à l’écart du grand fleuve : le site primitif est une légère surélévation sur les bords de l’Ill, à 4 km à vol d’oiseau du Rhin. En réalité, le Strasbourg historique s’est installé sur une île formée par deux bras de l’Ill, ce qui facilitait la défense de la cité. C’est là que, vers l’an 15 av. J.-C., les Romains ont fondé un poste militaire. La vieille ville présente encore aujourd’hui certains aspects de l’agglomération romaine : le carrefour rue des Hallebardes - rue du Dôme, à proximité de la cathédrale, était le croisement des deux principales voies romaines. Le castrum n’avait guère plus de 500 m sur son côté le plus développé.

Au Moyen Âge, Strasbourg est englobée, sur le plan économique et sur le plan culturel, dans l’espace rhénan : le commerce fait alors sa richesse. La fin du Moyen Âge et la Renaissance sont des périodes importantes, grâce à l’essor de l’humanisme et de la Réforme.

Si l’Alsace devient française en 1648, lors des traités de Westphalie, Strasbourg, par contre, n’intègre la monarchie française qu’en 1681. De ce fait, les liens avec les pays rhénans pourront se consolider. L’importance quantitative et qualitative de la population protestante va marquer Strasbourg. L’annexion de 1871 survient en pleine période d’essor économique : Strasbourg renoue alors plus fortement que jamais avec l’espace économique allemand. L’occupant construit les nouveaux quartiers de l’Université et de la Gare : le style architectural est celui qui domine dans bien des villes rhénanes. Une demi-ceinture est établie autour de la vieille ville. Le Strasbourg monumental s’enrichit de quelques grands édifices : université, gare, poste, actuelle préfecture, conservatoire, trésorerie générale, palais du Rhin. La « Neustadt », plus fonctionnelle, avec ses larges avenues, s’oppose à la « Altstadt », aux ruelles médiévales.

La fin du siècle enregistre l’essor de la navigation rhénane. Tout au long du Moyen Âge, le trafic fluvial s’est fait dans le port urbain, quai des Bateliers, non loin de la cathédrale. Un premier déplacement a lieu vers l’actuel bassin d’Austerlitz. Finalement, c’est à la fin du xixe s. qu’est aménagé l’actuel port du Rhin.