Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

statistique (suite)

Au xviie s. se dessinent nettement les concepts relatifs aux bases et aux moyens des études statistiques : deux écoles se forment, généralement connues sous le nom d’« école descriptive allemande » et d’« école des arithméticiens politiques ». L’école allemande, à laquelle il semble que l’on doive le mot statistique, est fondée par Hermann Conring (1606-1681), dont les travaux seront poursuivis par Gottfried Achenwall (1719-1772), qui publie en 1749 les Éléments de la statistique des États d’Europe. John Graunt (1620-1674) et sir William Petty (1623-1687) doivent être considérés comme les fondateurs de l’école des arithméticiens politiques, cette dénomination venant du titre d’un ouvrage de Petty, Political Arithmetic. Cette école va au-delà de la description : elle met en évidence certaines permanences statistiques, par exemple celle qui existe dans le rapport des nombres de naissances masculines et féminines (Graunt, 1662). Un peu plus tard, à partir des registres de naissances et de décès de la ville de Breslau, Edmund Halley (1656-1742) présente une table de mortalité que l’on peut considérer comme la base des travaux actuariels contemporains, puis Johann Peter Süssmilch (1707-1767) publie d’importants travaux sur le taux de masculinité à la naissance et son évolution jusqu’à l’âge de vingt ans.

Au début du xixe s., la statistique entre dans une nouvelle phase de son développement : Pierre Simon de Laplace* (1749-1827) doit être mis au premier rang de ceux qui ont fait du calcul des probabilités l’outil fondamental de l’analyse statistique. Dans sa Théorie analytique des probabilités (1812), il met en évidence les avantages que l’on en peut tirer dans l’étude des phénomènes naturels, dont les causes sont trop complexes pour qu’on puisse les connaître toutes et les analyser individuellement.

S’inspirant des travaux de Laplace, Adolphe Quételet (1796-1874) étend le champ d’application de la méthode à l’étude des qualités physiques, intellectuelles et morales des êtres humains, élaborant ainsi une sorte de physique sociale d’après laquelle ces diverses qualités, considérées dans la masse, se répartiraient autour d’un être fictif, l’« homme moyen ». Sur son initiative se réunit à Bruxelles, en 1853, le Ier Congrès international de statistique, précurseur de l’actuel Institut international de statistique, fondé à Londres en 1885. Depuis la fin du xixe s., les méthodes de l’analyse statistique se sont étendues à tous les domaines d’investigation scientifique, les problèmes nouveaux ainsi étudiés entraînant des progrès rapides et considérables de la théorie statistique.

À la suite des travaux de Quételet et de ceux de sir Francis Galton (1822-1911), Karl Pearson (1857-1936) est conduit à fonder cette branche nouvelle qu’est la biostatistique, ou biométrie, prolongée maintenant dans le domaine de l’expérimentation thérapeutique. De même, la liaison entre l’observation statistique et l’économie s’est poursuivie par la création d’une discipline scientifique nouvelle, l’économétrie*, à laquelle il convient de rattacher les noms des précurseurs Antoine Augustin Cournot* (1801-1877), Vilfredo Pareto* (1848-1923), Léon Walras* (1834-1910), ainsi que ceux de François Divisia (1889-1963) et de Ragnar Frisch (1895-1973), prix Nobel d’économie politique en 1969, tous deux fondateurs de la Société internationale d’économétrie.

Les travaux de James Clerk Maxwell* (1831-1879), aboutissant à la théorie cinétique des gaz, ont été le point de départ de la mécanique statistique et de la physique nucléaire. Dans le domaine technique, les travaux de sir Ronald Aylmer Fisher (1890-1962) sur l’expérimentation en agronomie ont été à la base d’une théorie générale des plans d’expérience, de même que ceux de Walter A. Shewhart (1891-1967) ont été largement étendus aux méthodes utilisées dans l’industrie pour le contrôle statistique de la qualité et de la fiabilité.

Dans le domaine des sciences humaines, les études de Charles Edward Spearman sur le comportement des individus, développées par la suite en psychologie appliquée, humaine et animale, ont conduit aux méthodes de l’analyse factorielle, prolongement logique de l’étude des corrélations.

La méthode statistique s’est aussi révélée un auxiliaire indispensable pour la gestion des entreprises : études de marché, contrôle budgétaire, gestion des stocks. Prolongée par la théorie des jeux* et la théorie de la décision*, puissamment épaulée par les moyens modernes de calcul, elle a donné naissance aux méthodes de la recherche* opérationnelle.

Dans tous ces domaines et dans beaucoup d’autres, les travaux des dernières décennies de Fisher, d’Egon Sharpe Pearson (né en 1895), de Jerzy Neyman (né en 1894) sur la théorie des tests* et celle de l’estimation*, nés de recherches empiriques sur l’application de la méthode des sondages*, ont fait de la méthode statistique un outil puissant de recherche scientifique et technique, dont le champ d’application ne cesse de s’étendre.

E. M.

➙ Ajustement statistique / Association statistique / Contrôle statistique / Corrélation / Démographie / Distribution statistique / Enquête par sondages / Estimation / Graphique statistique / Indice statistique / Régression / Série chronologique / Sondage / Test statistique.

 G. Darmois, Statistique et applications (A. Colin, 1934). / C. Fourgeaud et A. Fuchs, Statistique (Dunod, 1967).


Quelques savants


Ludwig Boltzmann.

V. l’article.


Satyendranath Bose,

physicien indien (Calcutta 1894 - id. 1974). Il imagina un appareil producteur d’ondes électriques ultra-courtes et créa une mécanique statistique, perfectionnée plus tard par Einstein* et destinée à remplacer la mécanique de Boltzmann dans le cas du photon.


Paul Dirac.

V. l’article.


Albert Einstein.

V. l’article.


Enrico Fermi.

V. l’article.