Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

atome (suite)

En ce qui concerne la description de l’atome, le principe d’incertitude entraîne une conséquence importante : il est vain de vouloir assigner aux électrons gravitant autour du noyau des trajectoires linéiques sur lesquelles la vitesse de ces électrons serait à chaque instant parfaitement connue. Prenons par exemple l’atome d’hydrogène de Bohr, dans lequel l’électron parcourt la plus petite orbite circulaire, de rayon r1 = 0,53 Å, avec la vitesse v1 = h/2πr1m, c’est-à-dire avec l’impulsion p = h/2πr1 ; une incertitude relative de 1/100 sur la détermination de cette impulsion, c’est-à-dire Δp = 10–2 h/2πr1, entraîne, d’après le principe de Heisenberg, une incertitude minimale sur la position de l’électron sur son orbite :
Δx = hp = 200πr1 = 628 r1 ;
l’incertitude sur la position de l’électron atteint plus de 600 fois le rayon de l’orbite ! C’est dire que la notion d’orbite perd toute signification. C’est un des caractères fondamentaux de la mécanique ondulatoire de ne pas chercher une localisation précise de l’électron dans son mouvement autour du noyau ; le renseignement que nous fournit cette mécanique sur la position de l’électron peut paraître bien mince, puisqu’il se borne à l’indication, pour chaque élément de volume de l’espace, de la « probabilité de présence » de cet électron ; cette probabilité est un nombre compris entre 0 et 1, 0 correspondant à l’absence certaine et 1 à la présence certaine de l’électron dans le volume considéré ; une probabilité de 0,1, par exemple, signifie qu’une expérience qui permet de montrer la présence de l’électron dans ce volume donnera une fois sur dix en moyenne un résultat positif.

Cette probabilité de présence de l’électron, considérée comme une fonction des coordonnées, est obtenue par la résolution de l’équation fondamentale de la mécanique ondulatoire, dite « équation de Schrödinger », adaptée au problème particulier envisagé. Cette équation joue en mécanique ondulatoire un rôle comparable à celui que joue en mécanique classique l’équation cependant, compte tenu de la dualité onde-corpuscule affirmée par de Broglie, l’équation proposée en 1927 par Schrödinger est une équation d’onde, qui s’apparente dans sa forme aux équations de propagation des ondes en mécanique classique : c’est une équation aux dérivées partielles du second ordre. Elle s’écrit

avec

quant à U, c’est l’énergie potentielle de l’électron. La solution générale de cette équation est une fonction, de caractère ondulatoire, des coordonnées d’espace et de temps, et dénommée fonction d’onde. Cette fonction, notée Ψ et ordinairement complexe, c’est-à-dire renfermant le symbole , n’a par elle-même aucune signification physique ; mais le carré de son module, |Ψ|2, est proportionnel à la probabilité de présence de l’électron en chaque région de l’espace. Dans un certain nombre de cas, et en particulier quand il s’agit du comportement d’un électron dans l’atome, U n’est pas fonction du temps, mais seulement de la position de l’électron ; on montre alors que Ψ est de la forme Ψ(x,y,z,t) = ψ(x,y,z) × Φ(t). Il en résulte dans l’équation de Schrödinger une séparation des variables d’espace et de temps ; il en résulte aussi, en particulier, que la fonction ψ(x,y,z) est solution de l’équation

dans laquelle E est l’énergie totale de l’électron ; il en résulte enfin, Φ(t) étant alors de la forme

que |Ψ|2 = |ψ|2 et que, par suite, la probabilité de présence de l’électron peut être calculée à partir de ψ. Soit alors dv un élément de volume infiniment petit entourant le point de coordonnées x, y, z ; la probabilité de trouver l’électron dans cet élément de volume est proportionnelle à |ψ|2, mais aussi à dv, donc de la forme k|ψ|2dv ; si, maintenant, on fait la somme, étendue à tout l’espace, des probabilités de présences élémentaires, on doit évidemment trouver 1, puisque l’électron est forcément quelque part. L’équation de Schrödinger en ψ étant une équation linéaire par rapport à ψ et à ses dérivées partielles, la fonction ψ, solution de cette équation, n’est définie qu’à une constante multiplicative près ; on peut dès lors la choisir pour que ∫ |ψ|2dv, étendue à tout l’espace, soit égale à l’unité ; on dit alors de la fonction ψ ainsi choisie qu’elle est normalisée. S’il en est ainsi, |ψ|2dv est la probabilité de trouver l’électron dans le volume dv ; on dit de |ψ|2 qu’il représente la densité de probabilité de présence de l’électron au point de coordonnées x, y, z ; c’est naturellement de façon générale une fonction de ces coordonnées. Bien entendu, la solution ψ doit satisfaire, ainsi que ses dérivées, à certaines conditions générales de continuité et, en outre, dans chaque problème particulier, à certaines conditions aux limites.

Il est alors remarquable de constater que, dans chaque cas, la recherche des solutions ψ physiquement acceptables, c’est-à-dire qui doivent satisfaire à l’ensemble des conditions précédentes, introduit, de façon logique et nécessaire, un ou plusieurs nombres, dont chacun ne peut, pour que la solution soit acceptable, que prendre certaines valeurs entières ; ainsi, les solutions ψ de l’équation de Schrödinger forment une suite discrète (et non pas continue), comme sont également discrètes les valeurs de l’énergie E correspondant aux diverses solutions. Cela est un caractère extrêmement important de l’équation de Schrödinger et, avec elle, de la mécanique ondulatoire : elle ne fait appel, de façon explicite, à aucun principe de quantification, et, cependant, une telle quantification résulte mathématiquement des solutions auxquelles elle conduit. Ces nombres entiers, dont dépend toute solution de l’équation de Schrödinger, sont dits « nombres quantiques » ; ils jouent un rôle très important, en particulier dans la description de l’atome.

L’équation de Schrödinger trouve une application importante dans l’étude de la structure des atomes ; cependant, cette équation ne peut être résolue complètement et de façon rigoureuse que dans le cas le plus simple, celui de l’atome d’hydrogène ; dans tous les autres cas, la difficulté mathématique est telle que l’on est contraint de faire appel à des méthodes d’approximations.