Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Action catholique (suite)

Depuis lors, d’ailleurs, l’épiscopat a favorisé la séparation entre la jeunesse universitaire — où plusieurs mouvements catholiques, dont la J. E. C. universitaire (J. U. C.), ont été regroupés dans la Mission étudiante — et la J. E. C. du secondaire et du technique. Il a laissé les organisations universitaires se politiser et aussi s’atomiser, surtout depuis la révolte étudiante de mai 1968.

Le refus de la J. O. C., de la J. O. C. F. et de l’A. C. O. de se laisser noyer dans des organisations visant à coordonner l’action de mouvements agissant dans des milieux divers a provoqué, en janvier 1969, la paralysie du Conseil français de l’apostolat des laïcs (C. F. A. L.), où se retrouvent de nombreux mouvements de jeunes et d’adultes, qui, comme l’A. C. J. F. après 1950, envisagent d’élaborer une certaine politique commune de l’apostolat des laïcs.

Hors de France, des mouvements de l’Action catholique spécialisés se sont constitués et se sont fédérés dans des organisations internationales de mouvements ouvriers, ruraux, etc. Toutefois, il est rare que l’on y sépare, aussi nettement qu’en France, l’Action catholique proprement dite de l’action sociale et civique. Ainsi, tandis que des militants français de l’Action catholique appartiennent à la plupart des partis politiques, l’Action catholique italienne reste, en dépit d’une certaine évolution récente, très liée à la démocratie chrétienne. Dans certains pays d’Afrique noire francophone où les missionnaires avaient implanté des mouvements spécialisés par milieux, l’épiscopat a supprimé ou regroupé certains de ces mouvements — notamment au sein de l’Action catholique des familles — en arguant du fait que les structures sociales africaines ne correspondent pas aux structures françaises. Enfin, si le concile Vatican II a insisté sur l’importance de l’Action catholique, certains évêques, appartenant notamment à des pays anglo-saxons, avaient critiqué la conception, à leurs yeux trop étroite, de l’épiscopat français en la matière.

A. S.

➙ Catholicisme social / Église catholique / Pie XI.

 P. Tiberghien, l’Action catholique (Éd. soc. du Nord, Lille, 1946). / J. Guitton, l’Action catholique dans les milieux intellectuels (Aubier, 1950). / R. Podvin, l’Action catholique : son organisation dans l’Église (Lethielleux, 1957). / M. J. Mossand, Vers un monde nouveau. L’épopée jociste (Éd. de Fleurus, 1959). / La J. A. C. féminine (J. A. C. F., 1960). / M. Zinty, l’Élan jociste à l’heure de l’Europe (Éd. ouvrières, 1962). / A. Vial, la Foi d’un paysan, l’A. C. J. F. dans l’impasse (Éd. de l’Epi, 1967). / Ch. Molette, l’Association catholique de la jeunesse française, 1886-1907 (A. Colin, 1968).

Action française

Nom pris, au temps de l’affaire Dreyfus, par un comité nationaliste fondé par Henri Vaugeois et Maurice Pujo.


Le 20 juin 1899, au cours d’une conférence publique présidée par François de Mahy, Vaugeois présente le « groupe d’action française » ; le 10 juillet suivant paraît le premier numéro du bulletin bimensuel du mouvement, bulletin appelé familièrement la « Petite Revue grise », de la couleur de sa couverture.

L’Action française n’est alors qu’un mouvement républicain et patriote ; seul, parmi ses premiers membres, Charles Maurras est monarchiste. Son action personnelle, son argumentation à la fois rigoureuse et pressante — celle qui éclate dans son Enquête sur la monarchie (1900-1909), bible de l’Action française — finissent par convertir au monarchisme tous les chefs de ce mouvement, qui devient, en 1905, la Ligue d’action française. Celle-ci se développe rapidement dans les milieux nationalistes, catholiques et antisémites, bénéficiant de la dislocation des troupes de la Ligue de la patrie française (1904-1905) et profilant, après l’échec de Drumont aux élections de 1902, de la décadence de la Libre Parole, dont beaucoup d’admirateurs passent dans le camp maurrassien.

La pensée de Maurras, qui forme l’essentiel de la doctrine de l’Action française, est substantiellement contre-révolutionnaire et antiparlementaire. Il s’agit, pour lui et ses disciples, de rétablir la monarchie héréditaire tout en faisant sauter le dur appareil napoléonien, centralisateur. Dans l’univers maurrassien, les corps intermédiaires, les corporations retrouvent une place privilégiée, ce qui doit permettre au régionalisme de s’épanouir à l’aise. Mais le nationalisme intégral de Maurras ne tolère pas l’immixtion de corps « étrangers » : juifs, protestants, francs-maçons, socialistes internationaux, ceux qu’il appelle les « métèques », sont à rejeter ou à surveiller. Il écrit : « Au rêve oriental, germano-judaïque, rêve individuel, libéral et mystique, nous opposerons la pensée occidentale, la pensée classique traditionnelle [...] ; aux nuées subversives, la civilisation helléno-latine, l’ordre français. » Tout naturellement, Maurras fait une place à l’Église romaine — l’« Église de l’ordre » —, mais l’ambiguïté de l’Action française en matière religieuse réside dans le fait que l’agnostique Maurras prône un catholicisme sans racines dans le judaïsme, sans références à l’évangile, bref ce que certains n’ont pas hésité à appeler un « catholicisme sans christianisme ».

L’entrée du truculent Léon Daudet dans la Ligue d’action française s’accompagne d’un regain d’activité. Daudet, en effet, est le premier bailleur de fonds et le premier directeur-rédacteur en chef de l’Action française, journal quotidien à partir du 21 mars 1908. Quelques mois plus tard, Maurice Pujo et le sculpteur Maxime Réal del Sarte fondent les Camelots du roi, troupes de choc de l’Action française où dominent les étudiants et dont l’action s’exerce surtout contre les socialistes et les démocrates-chrétiens.

Depuis 1906 fonctionne, sous la direction de Louis Dimier — qui quittera la Ligue en 1920 —, un Institut d’action française destiné à dispenser un enseignement parascolaire sur tous les aspects de la doctrine néo-royaliste : les chaires les plus importantes sont occupées par Léon de Montesquiou (positivisme), Charles Maurras (politique), Lucien Moreau (nationalisme), Dom Besse (l’Église, le Syllabus), le P. de Pascal (sciences sociales).