Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Sibérie (suite)

Le minerai de fer est moins répandu ; on en trouve assez peu dans le Kouzbass. En revanche, les minerais non ferreux sont nombreux et abondants. On peut mettre à part l’or, le platine, le diamant, l’argent, connus surtout en Iakoutie et dans le nord-est, où de véritables mines sont en activité. Il y a d’assez grandes quantités de minerais d’alliage : Norilsk, ville polaire, commande à un des plus gros gisements de nickel du monde. Le chrome se trouve dans les montagnes du sud de l’Ob et de l’Ienisseï. Parmi d’autres métaux, on exploite le plomb et le zinc au sud du Kouzbass. Des minerais d’aluminium ont été découverts dans la région de l’Ienisseï inférieur. L’Altaï recèle du tungstène et du manganèse.

Une autre richesse énergétique est due aux fleuves sibériens. On envisage des « escaliers de centrales » sur les principaux fleuves. La première unité, la fameuse centrale de Bratsk, peut fournir 20 TWh par an.

La découverte des hydrocarbures est relativement récente : en faibles quantités à Sakhaline et dans la région d’Irkoutsk, très abondants dans l’Ob moyen et inférieur (le pétrole alimente par oléoduc de grandes villes de la Sibérie occidentale et de l’Oural).


Deux ou trois Sibéries

La conception officielle conduit à distinguer, dans le cadre du découpage dit « des grandes régions économiques », trois Sibéries (Sibérie occidentale, Sibérie orientale et Extrême-Orient), cadres de la planification et unités statistiques (v. Russie). Le degré de dépendance à l’égard de la Russie d’Europe croît à mesure qu’on se dirige vers le Pacifique.


La Sibérie occidentale

Elle compte plus de 12 millions d’habitants sur un peu moins de 2,5 millions de kilomètres carrés : la densité moyenne avoisine 5 hab. au km2. Les deux tiers de la population se concentrent dans le sud. Novossibirsk*, la capitale, est la seule ville de la Sibérie qui dépasse le million d’habitants.

Les facteurs d’expansion économique sont multiples : c’est, avant tout, l’exploitation du Kouzbass*, déjà connu à l’époque tsariste, mais prodigieusement développé au cours des plans. L’extraction de la houille dépasse 120 Mt aujourd’hui. La moitié est cokéfiable, une grande partie est exportée. Le fer est venu depuis longtemps de l’Oural, mais le Kouzbass a révélé des bassins productifs, et le Kazakhstan, proche, lui en envoie. Le Kouzbass est donc devenu la « troisième base sidérurgique ».

Les effets d’amont et d’aval se font sentir non seulement dans le bassin, mais aussi à sa périphérie. Ainsi Novossibirsk fabrique du matériel destiné aux mines et travaille des produits bruts ou semi-finis qui lui viennent du Kouzbass. Mais cette intégration, chaque année plus poussée, n’a été possible qu’à trois conditions : le ravitaillement en énergie, presque entièrement thermique jusqu’à la construction des barrages (notamment sur l’Ienisseï) ; l’amélioration des transports par la création du Srednessib (ou Transsibérien moyen), du Ioujsib (Transsibérien du Sud) et de nombreuses voies ferrées de desserte (le Transsibérien est électrifié et à double voie jusqu’à Irkoutsk) ; le renforcement administratif et technique de liaisons entre villes et bassins (la Sibérie occidentale présente ainsi les traits de l’Oural d’avant guerre).

De nombreuses villes produisent des turbines, des générateurs, des chaudières, etc., et des usines s’emploient à satisfaire les combinats du Kouzbass par la fourniture de machines et de matériel électrique. La branche des industries chimiques, fondée sur la carbochimie, est encore une industrie d’aval. Par contre, les premières usines textiles ou alimentaires qui se fondent ne doivent rien au Kouzbass, mais contribuent à accélérer sa cohésion.

Le rôle croissant de l’agriculture est évident. La Sibérie occidentale est de loin la plus agricole des Sibéries. L’agriculture utilise 9 p. 100 des terres cultivées en U. R. S. S. et fournit, en valeur, le dixième des produits (15 p. 100 pour le blé). Une partie des terres vierges s’étendait au sud, à la limite du Kazakhstan ou dans l’Altaï.

Des prospections, effectuées dans le bassin de l’Ob moyen et inférieur, ont décelé des quantités considérables, à l’échelle mondiale, d’hydrocarbures.

On extrait annuellement de 10 à 15 milliards de mètres cubes de gaz, mais les réserves autorisent à espérer, avant 1980, plusieurs dizaines de milliards de mètres cubes et, en ce qui concerne le pétrole, plus de 100 Mt chaque année.

Quant à Novossibirsk, elle fait figure de capitale de la Sibérie entière.

Il n’est pas étonnant que cette partie occidentale fournisse les deux tiers de la valeur de la production industrielle de toute la Sibérie.


La Sibérie orientale

Avec 7,5 millions d’habitants répartis sur 4 120 000 km2, la population de la seconde Sibérie est déjà moins dense. L’agriculture s’est singulièrement rétrécie, 80 p. 100 des superficies agricoles sont recensées à l’ouest du Baïkal, dans les îlots de steppes qui précèdent la montagne ou dans les vallées des monts les plus humides. À l’est, il n’y a plus que des éleveurs de moutons. C’est « la Sibérie qui se fait », la Sibérie qui se cherche, et les informations sur son économie sont d’ailleurs contradictoires ou parcimonieusement diffusées.

La Sibérie orientale est la « Sibérie de l’eau ». L’Ienisseï et ses affluents, les Toungouska et l’Angara, permettraient d’assurer une production annuelle de près de 1 000 TWh (actuellement 70). Le prix de revient de l’électricité y est extrêmement faible, mais il faut l’utiliser sur place.

D’autres ressources en sont au stade de la prospection plus que de l’exploitation : le charbon entre Atchinsk et Tcheremkhovo, le minerai de fer dans la région de Minoussinsk, les métaux non ferreux à l’est d’Irkoutsk (le plomb, le zinc, l’étain et le fameux cuivre d’Oudokan). On a repéré de grosses réserves de divers minerais d’aluminium (néphéline et bauxite), puis du titane, du molybdène, du wolfram. C’est dans les villes que se concentrent près des deux tiers de la population, mais les activités urbaines, comme les autres, n’ont pas la richesse de celles de la Sibérie occidentale. Cependant, Krasnoïarsk, avec plus de 700 000 habitants, fabrique des constructions mécaniques, des machines agricoles et on y construit un gros combinat d’aluminium. Irkoutsk n’atteint pas encore le demi-million d’habitants et est situé non loin du bassin de houille de Tcheremkovo. C’est un foyer industriel (mécanique, électrotechnique, textiles, depuis peu aluminium). Les deux villes reçoivent 87 p. 100 des investissements effectués en Sibérie orientale et fournissent 84 p. 100 de la valeur de sa production industrielle totale. C’est bien dire que les autres territoires restent sous-équipés ou inachevés, et que le développement se fait de manière ponctuelle. Le meilleur exemple est celui de Norilsk, ville de plus de 100 000 habitants, qui exploite charbon, nickel et cuivre. On doit espérer que, dans la région du Baïkal, tous les gisements seront exploités et donneront lieu à des industries de transformation. On attend avec intérêt le prolongement du second Transsibérien, celui du nord (le B. A. M., Baïkal-Amour-Magistral), qui, de Taïchet, atteint déjà Oust-Kout sur la Lena.