Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

sève (suite)

Il apparaît, à la suite d’expériences récentes, que la circulation dans les tubes criblés n’est véritablement polarisée que pour les substances de croissance (v. auxines), dans les coléoptiles d’avoine par exemple, tandis que les autres produits (nutritifs...) peuvent, suivant les conditions et le moment, circuler dans un sens ou dans l’autre. Alors que, généralement, on observe une circulation vers une concentration décroissante, dans quelques cas (évacuation du sucre du limbe vers la tige ou accumulation de réserves dans la graine) on a remarqué une translocation du saccharose en sens inverse.

On a évoqué, pour expliquer les déplacements de substances dans les tubes criblés, de nombreux phénomènes. Certains auteurs pensent que le transport de l’eau et des diverses substances dissoutes se fait en masse sous l’influence de la pression osmotique. Mais cette hypothèse ne s’accorde guère avec les différences de vitesse observées entre les diverses substances. Les phénomènes de diffusion et de dialyse joueraient un rôle primordial dans les vacuoles et entre les cellules. Cependant, on ne peut expliquer ainsi les déplacements dans le sens des concentrations croissantes, et, d’autre part, les vitesses observées sont considérablement supérieures à celles que donnerait la diffusion, lente par nature (même si l’on fait intervenir les mouvements de cyclose à l’intérieur des cellules), surtout lorsqu’il y a passage à travers des membranes du cytoplasme.

On met également l’accent sur le rôle que doit jouer le cytoplasme vivant. Ce dernier est obligatoirement traversé par la sève au niveau des cribles et il constitue autour de la zone de conduction une véritable gaine. Ce cytoplasme est riche en enzymes, et celles-ci sont la preuve de l’existence d’un métabolisme actif. D’autre part, l’influence de la température sur la vitesse de réaction s’explique très bien s’il s’agit d’un mécanisme enzymatique. Aussi, les théories modernes, dites « métaboliques », invoquent-elles ce phénomène.

Cependant, il faut avouer que rien d’absolument certain ne permet d’expliquer la conduction de la sève élaborée dans son ensemble.

J.-M. T. et F. T.

 P. Binet et J.-P. Brunel, Biologie végétale. Physiologie végétale (Doin, 1967-68 ; 2 vol.). / R. Heller, Précis de biologie végétale, t. II : Nutrition et métabolisme (Masson, 1969). / A. S. Crafts et C. E. Crisp, Phloem Transport in Plants (San Francisco, 1971).

Sévère Alexandre

En lat. M. Aurelius Antoninus Severus Alexander (Arca Caesarea, Phénicie, 205 ou 208 - Germanie 235), empereur romain (222-235).


Son père, Gessius Marcianus, n’était qu’un haut fonctionnaire, plusieurs fois procurateur. Mais sa mère était Julia Mammaea, de la famille de ces énergiques princesses syriennes qui s’emparèrent de Rome sous Septime* Sévère, à la suite de l’impératrice Julia Domna. Elle était la tante de l’empereur Élagabal (218-222), prêtre du bétyle d’Émèse représentant le Soleil, proclamé empereur par les soldats alors qu’il n’était qu’un adolescent et qui fit régner à Rome la superstition, la débauche et l’extravagance. Méprisant Élagabal, la mère et la grand-mère (Julia Maesa) du jeune homme le couvèrent et le confièrent à d’excellents maîtres, qui lui inspirèrent un goût prononcé pour les lettres grecques. La formation morale du futur empereur fut assez solide pour que celui-ci résistât ensuite à l’exemple des turpitudes impériales. Les femmes réussirent à persuader Élagabal d’adopter son jeune cousin, qui prit alors le nom de M. Aurelius Alexander (221). L’empereur, jaloux de la popularité de celui-ci auprès des prétoriens, s’en repentit aussitôt et tenta de le faire assassiner. Ses plans furent déjoués ; on se réconcilia, mais de nouvelles querelles s’ensuivirent, Élagabal fut tué dans une émeute, et M. Aurelius Alexander, intercalant le cognomen Severus dans son nom, lui succéda. Au vrai, ce furent les deux princesses qui régnèrent et imprimèrent un style nouveau à la monarchie en remettant à l’honneur les vertus antiques. Elles surent assurer au jeune empereur les avis d’hommes compétents, ce qui retirait à l’Empire ce qu’il avait eu de despotique dans les règnes précédents. Un conseil du prince fut formé de sénateurs et de jurisconsultes, et pourvu d’une autorité réelle. Pour les affaires de la ville, une douzaine de curateurs de rang consulaire assistèrent le préfet de la ville. La jurisprudence fut à l’honneur et représentée par plusieurs noms qui sont passés à la postérité. Le plus célèbre de ces juristes fut Ulpien, à qui fut attribuée la préfecture du prétoire ; mais, en 228, Sévère Alexandre le laissa assassiner par les soldats. Vis-à-vis de l’armée, sa mère eut une politique de parcimonie, mais sans fermeté. Ni elle ni l’empereur ne purent empêcher les nombreuses mutineries qui éclatèrent tant chez les prétoriens que dans les légions. Dion Cassius (v. 155 - v. 235), historien de l’époque, conseiller du prince, consul avec lui en 229, dut rester éloigné de Rome pendant un an pour éviter de subir le même sort qu’Ulpien. Au demeurant, la monnaie fut assainie, les taxes furent allégées, des bureaux de prêt à taux d’intérêt modique furent institués, les lettres et les arts furent encouragés. Dans le domaine religieux, l’empereur fit preuve d’un éclectisme extrême, eu égard à la tolérance du paganisme et au syncrétisme à la mode en ce temps-là. Un sanctuaire du palais impérial contenait notamment les figures d’Orphée, et d’Apollonios de Tyane, ce philosophe néo-pythagoricien du ier s. qu’on disait faire des miracles et que certains divinisèrent. Sévère n’était pas hostile aux chrétiens ; il les ménagea même, et le christianisme profita de ces bonnes dispositions.

Vers la fin du règne, le pays des Parthes* fut secoué par un changement de dynastie : aux Arsacides succéda Ardachêr Ier (v. 226-241), le premier souverain des Sassanides*, qui poursuivit la tradition d’hostilité au gouvernement romain, pour lequel les guerres frontalières furent pendant tout le iiie s. une constante préoccupation. Il contraignit Sévère à partir pour la guerre (232-33). À son retour d’Orient, l’empereur dut gagner la Rhénanie pour faire face à une invasion germanique. Il fut tué, ainsi que sa mère, qui l’accompagnait, lors d’une mutinerie de soldats. Celle-ci porta au pouvoir un soldat thrace, Maximin (235). La famille syrienne était éliminée de l’Empire. Mais les habitants de Rome regrettèrent l’empereur disparu, et on lui décerna les honneurs divins.

R. H.