Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

Sesshū (suite)

L’aboutissement de son art est le Paysage d’Amano-hashidate (« le Pont du Ciel »), exécuté sur place l’année même de sa mort, en ce site célèbre de la mer du Japon. Construction solide, où tous les détails, jusqu’aux noms des villages, sont rendus par des traits nets, l’œuvre fait preuve d’un réalisme qui ne contrarie en rien l’aspect cosmique de l’ensemble. Elle témoigne d’une communion intense avec la nature, tout en renouant, par sa plasticité précise, avec le lyrisme traditionnel des paysagistes nippons.

L’influence de Sesshū s’est perpétuée à travers les siècles, car la technique et le talent qui le distinguent de ses contemporains ont trouvé leur prolongement dans des domaines très divers.

M. M.

➙ Tch’an et zen dans l’art.

Sète

V. du départ. de l’Hérault ; 40 179 hab. (Sétois).


C’est le premier port de pêche français de la Méditerranée, un pôle industriel du Bas-Languedoc (Sète-Frontignan-Balaruc-les-Bains) et un centre touristique.

Sète est un port pittoresque au cachet incontestable entre ses deux noyaux primitifs de la « Pointe Courte », sur la rive du bassin de Thau, et de la « Corniche », dominant, au pied du mont Saint-Clair, la « Marine ». Le panorama du haut de la « montagne » est un des plus beaux du Bas-Languedoc ; il porte sur le lido qui s’étend entre Sète et Agde, les salines et le vignoble, l’étang de Thau et ses élevages d’huîtres et de moules, la retombée de la garrigue à la Gardiole, l’ensemble industriel dominé par la raffinerie de pétrole de Frontignan. Le musée, le théâtre de la Mer, la tombe de Paul Valéry au « cimetière marin » constituent autant d’attraits supplémentaires pour le touriste.

Sète est également la dernière-née des villes languedociennes ; elle a été fondée en 1666 grâce à une initiative royale afin de ménager un débouché maritime à la province. Toutefois, les fouilles archéologiques révèlent une occupation ancienne au pied du Saint-Clair : propriétés gallo-romaines dissimulées par ce promontoire désert bien connu des navigateurs. Successivement, l’« île » est attribuée à l’abbaye d’Aniane, puis à l’évêché d’Agde et porte au début du xviie s. un fort vite démantelé. Dans le cadre des grands travaux d’aménagement, le percement du canal des Deux-Mers (ou canal du Midi) exige un port permettant l’exportation des produits ; le « colbertisme » préside à sa naissance. L’impulsion royale, les intérêts montpelliérains, la venue de Frontignanais voisins vont faire du bourg de mer une ville.

Aux pêcheurs utilisant un habitat temporaire de roseaux sur les rives de l’étang vont se joindre les ouvriers employés sur le chantier et les ruraux des bourgades voisines. Puis l’aire de recrutement s’élargit par les voies du commerce : c’est la descente des montagnards du Massif central, venus avec le bois et les châtaignes ; c’est l’arrivée des gens de l’Ouest grâce au canal ; puis c’est l’installation des Génois et des Catalans grâce au cabotage des Provençaux, ainsi que celle des Allemands et des Suisses grâce aux liens tissés par la banque protestante ; dernier trait concourant au cosmopolitisme de la ville, la colonie italienne et son monde de pêcheurs napolitains et calabrais, des golfes de Gaète et de Policastro.

Le port a d’abord marqué une hésitation entre l’étang et la mer ; le grau a été canalisé, les bassins ont été creusés, on a gagné peu à peu, et les travaux se poursuivent pour la réception de bâtiments de plus en plus importants en eau profonde. En dehors du port de plaisance, le port de pêche est actif (9 000 t de prises). La flottille de pêche en étang et les petits métiers ne fournissent qu’une part minime des prises ; les prises dues au chalutage et celles de poissons pélagiques par la technique du lamparo sont importantes. De nombreux bâtiments pratiquent la pêche au chalut en hiver et la prise des poissons pélagiques en été ; ce type mixte est le plus répandu.

Le trafic du port de commerce est notable : 6,2 Mt au total, dont près de 5 Mt débarqués et plus de 1,5 Mt embarqué. L’essentiel des produits importés se cantonne aux produits pétroliers (3,5 Mt), les engrais et les produits alimentaires représentant 500 000 t chacun. Aux exportations se retrouvent dans l’ordre les trois mêmes types de produits : 700 000 t de pétrole et 100 000 t d’engrais et de produits alimentaires.

Dans un premier temps, encore soumis aux commanditaires montpelliérains, le port exporte vins et alcools vers l’Europe du Nord, draps vers le Levant ; plus tard, des liens sont établis avec l’Amérique et les Antilles (importations du sucre, de tabac de Virginie) ; vers le milieu du xixe s., Sète est le cinquième port français ; son trafic représente le cinquième du tonnage de Marseille et la moitié de celui de Bordeaux. Sa croissance devient spectaculaire : entre 1816 et 1886, le mouvement du port est multiplié par 17. Plus que jamais, Sète est le port du vin ; la dévastation du vignoble languedocien par le phylloxéra assure sa fortune ; les vins d’Algérie et les vins d’Espagne sont importés dans ce qui est devenu le plus grand centre de tonnellerie du monde, parmi les quais encombrés par la « barriquaille ». Toute l’économie sétoise repose désormais sur le commerce du vin et sur les activités annexes, et plus spécialement la fabrication des apéritifs.

Le pôle industriel sétois est toujours marqué par les industries dérivées du vin et par la proximité du grand vignoble de masse. La naissance du centre industriel est, en effet, liée au départ aux besoins de la viticulture : fabrication d’engrais grâce aux importations de phosphates d’Afrique du Nord ou de produits anticryptogamiques (soufre, sulfate). Si la tonnellerie a désormais disparu, la fabrication d’apéritifs et de vermouths ainsi que la confiserie d’olives et l’élaboration de produits laitiers subsistent. Mais le pétrole domine l’ensemble par la raffinerie de la Mobil Oil (6 Mt de capacité), implantée à Frontignan. La réparation navale, la confection et la production du ciment complètent l’ensemble industriel, qui peut bénéficier de gains possibles sur les étangs. Mais, si l’industrie marque le paysage sétois, il reste à rappeler tout l’aspect culturel et artistique d’une ville inspirée, de Joseph Vernet à Jongkind, d’Albert Marquet à François Desnoyer, sans oublier Jean Vilar et Georges Brassens.

R. D. et R. F.

➙ Hérault.

 L. Dermigny, Esquisse de l’histoire d’un port. Sète de 1666 à 1680 (Impr. Causse, Montpellier, 1955). / L. Dermigny, R. Ferras, G. Galtier et coll., Sète (Socedim, Marseille, 1967).