Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

sélection végétale (suite)

Une œuvre continue aux objectifs multiples et évolutifs

Procédant par les étapes que constitue la création de chaque nouvelle variété, la sélection améliorante est une entreprise sans cesse renouvelée en raison de :
— la recherche constante de nouveaux facteurs de productivité ;
— la modification incessante des objectifs d’amélioration due à l’évolution des exigences des transformateurs et des consommateurs de la production agricole ;
— la dégradation biologique possible du matériel génétique préexistant (apparition de nouvelles races de parasites, variations génétiques) ;
— l’obsolescence rapide des variétés due à la compétition et à l’émulation entre les sélectionneurs dans des cadres géographiques de plus en plus vastes.

Dans ce contexte, les objectifs de la sélection demeurent divers dans la recherche d’une meilleure adaptation :
— au milieu physique, les méthodes actuelles de travail du sol, les techniques modernes de culture et de récolte étant dominées par la recherche de la mécanisation du maximum d’opérations et requérant l’amélioration de la résistance des plantes aux adversités naturelles (froid, chaleur, vent) ;
— au milieu biologique, la multiplication et l’agressivité des parasites pouvant être favorisées par la concentration des cultures, la modification du faciès rural et les transformations des méthodes culturales ;
— au milieu économique, à la suite de l’évolution des besoins, des goûts ou des habitudes des consommateurs.


Les principes de la sélection améliorante

L’amélioration génétique n’est possible que si l’espèce présente une variabilité potentielle qui pourra être utilisée par la sélection. Ainsi, le potentiel d’amélioration et, par conséquent, les progrès possibles par sélection dépendent de :
— la variation génétique de l’espèce pour les caractères d’intérêt agronomique ;
— sa réceptivité génétique à la sélection naturelle ou artificielle.

• La variabilité génétique doit être préservée. La sélection implique un choix de reproducteurs et entraîne généralement une perte de gènes. Cet appauvrissement du stock génétique de l’espèce peut devenir inquiétant.

La préservation nécessaire de la variabilité génétique des grandes espèces cultivées est entreprise par l’entretien de grandes collections mondiales, réalisées par les sélectionneurs ou gérées par des organismes internationaux (F. A. O., O. C. D. E., Eucarpia [Association européenne pour l’amélioration des plantes]...).

Ce matériel en réserve constitue de véritables « banques de gènes », dont dépendent les progrès futurs.

• La variabilité génétique est utilisée. L’exploitation de la variation exprimée s’opère par sélection d’individus particuliers dans des populations hétérogènes. Mais les différences présentes peuvent être des apparences dues à l’effet du milieu.

La recherche des variations héréditaires, seules utiles, est réalisée par l’étude des descendances des individus sélectionnés (sélection généalogique).

La révélation de la variabilité potentielle des espèces est obtenue par les hybridations entre individus ou groupes d’individus choisis pour la complémentarité de leurs caractères. La fixation de cette variation introduite et le choix des nouvelles associations génétiques favorables sont gouvernés par le mode de reproduction naturel ou imposé à l’espèce et recherchés par la sélection sur le comportement des descendances (sélection généalogique après hybridation).

• Une variabilité nouvelle peut être créée. Lorsque le potentiel de variation d’une espèce se montre insuffisant pour un objectif d’amélioration particulier, la modification génétique peut être recherchée par les croisements interspécifiques et par les mutations.

• Les croisements interspécifiques
Les espèces sauvages ou les espèces cultivées génétiquement voisines peuvent parfois contenir les gènes qui font défaut à la plante à améliorer.

Mais les recombinaisons génétiques entre espèces différentes présentent certaines difficultés.

Il est très fréquent que la disharmonie entre les stocks chromosomiques des espèces soit telle que l’hybride, s’il peut être réalisé et est viable, est stérile.

Lorsque l’hybride interspécifique est ou a été rendu fertile, il importe de le débarrasser des gènes gouvernant les caractères indésirables de l’espèce sauvage.

Les progrès de la cytogénétique ont rendu possible l’introduction élective, dans le génotype de l’espèce cultivée, de chromosomes isolés, voire de courts fragments de chromosomes portant les gènes dont la capture est souhaitée. Cette introgression génétique peut se faire par addition ou par substitution à une partie équivalente du génotype de la plante hôte.

L’hybridation interspécifique peut également conduire à la création de nouvelles espèces. En effet, l’évolution naturelle a souvent utilisé cette voie de diversification, couplée à la polyploïdisation spontanée, qui rend les hybrides fertiles. Ainsi, de nombreuses espèces actuelles ont une origine composite allopolyploïde (Blé, Colza...). Cette synthèse d’hybrides interspécifiques a permis jusqu’à présent la création de quelques nouvelles espèces, telles que les Triticale : Blé-Seigle provenant de l’hybridation entre Triticum (Blé) et Secale (Seigle). Elle a été utilisée également pour la reconstruction d’espèces qui s’étaient spontanément formées de cette manière : synthèse du Colza pour l’amélioration de la résistance au froid (Suède) et pour l’abaissement de la teneur en acide linolénique (France).

• Les mutations
La domestication des espèces végétales et leur amélioration ultérieure se fondent essentiellement sur l’exploitation par l’Homme des mutations génétiques naturelles ou provoquées. Celles-ci demeurent le moyen ultime pour créer une variabilité qui se révélerait insuffisante dans l’espèce telle qu’elle nous est parvenue.