Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

scintigraphie (suite)

La dose traceuse à administrer doit être attentivement considérée. Pour un test de fixation thyroïdienne étudié par scintiscanner à multisondes ou gamma caméra, quelques microcuries suffisent. Pour les explorations humérales ou celles du système osseux (recherche de métastases), une dose d’une centaine de microcuries peut être considérée comme un minimum. Au-delà du millicurie, les effets biologiques ne sont plus négligeables. Compte tenu des doses de radiotraceurs qu’il importe de ne pas dépasser, les explorations isotopiques faites chez le vivant présentent un intérêt considérable. Nous ne ferons que rappeler l’étude du corps thyroïde par l’iode 131, qui est la plus connue. Cet isotope est obtenu par irradiation de tellure stable dans le flux de neutrons d’une pile atomique. Sa période de demi-désintégration, qui est de huit jours, convient parfaitement aux explorations physiopathologiques. C’est ainsi que les grandes indications de ce test de fixation sont les dysthyroïdies (maladie de Basedow ou, à l’inverse, myxœdème), les hypertrophies sans troubles endocriniens (goitres et nodules), le diagnostic des tumeurs et des cancers thyroïdiens aberrants. Rappelons les explorations du foie par l’or colloïdal, l’albumine iodée, le rose bengale 131 ; comme pour la thyroïde, les zones muettes ou froides sur les cartographies, c’est-à-dire dépourvues de « frappes », correspondent à des masses néo-formées, qui peuvent traduire l’existence d’un abcès, d’un kyste hydatique, d’une tumeur bénigne ou maligne, primitive ou secondaire. L’exploration isotopique des poumons se fait par macro-agrégats d’albumine marquée, qui, se bloquant dans les capillaires, mettent en évidence la circulation pulmonaire. Il est possible de combiner l’exploration anatomique aux études fonctionnelles : un soluté de xénon 133 injecté par voie veineuse permet d’obtenir une scintigraphie du tissu pulmonaire par les vaisseaux. On fait ensuite inhaler au patient de l’air chargé du même xénon 133 et l’on pratique une nouvelle scintigraphie, qui donne une image des espaces aériens et qui, comparée à la précédente, donne des indications sur la physiologie pulmonaire. Dans le cancer bronchique, la scintigraphie pulmonaire révèle une zone muette. Une scintigraphie tumorale sélective peut donner des résultats remarquables avec le gallium (67 Ga). Il est possible, enfin, d’apprécier l’envahissement du médiastin. Au niveau des hiles pulmonaires, alors que toutes les explorations semblent donner des résultats négatifs (tomographies et angiographies), l’exploration isotopique par la bléomycine marquée permet de mettre en évidence des adénopathies néoplasiques. La lymphographie isotopique découvre des envahissements ganglionnaires néoplasiques jusqu’au niveau de l’étage respiratoire. La scintigraphie de la moelle épinière par sérum-albumine marquée à l’iode 131 contribue à la mise en évidence de tumeurs médullaires et à l’étude dynamique du liquide céphalo-rachidien. La scintigraphie cardiaque est obtenue dans un premier temps au cours d’une scintigraphie pulmonaire qui délimite la loge cardiaque. En ce qui concerne les cavités cardiaques, on peut obtenir une image scintigraphique par injection intraveineuse d’un indicateur radioactif et comparer cette image à celle de la loge cardiaque (mise en évidence d’un épanchement péricardique). Par la gamma caméra, on peut suivre le passage d’un indicateur radioactif injecté par voie veineuse, d’abord dans les cavités droites, puis dans les cavités gauches du cœur. On visualise ainsi les aspects pathologiques et les augmentations de volume des cavités cardiaques. Pour la scintigraphie myocardique, on utilise le césium 131. Les infarctus se traduisent par une image d’amputation qui contraste avec la radioactivité normale du muscle cardiaque voisin. Il est intéressant de coupler cette scintigraphie avec la mesure du débit coronaire, ce qui donne des indications diagnostiques et pronostiques importantes. Rappelons l’étude du squelette, des métastases osseuses et de la maladie de Paget par le radiogallium, qui se fixe électivement sur le tissu osseux. La physiologie et le renouvellement de ce dernier ont pu être mis en évidence par le radiocalcium 45 et le radiophosphore 32. La scintigraphie rénale permet des explorations inoffensives lorsque l’urographie et, plus encore, la pyélographie rétrograde sont contre-indiquées. Elle peut donner des éléments déterminants sur l’appréciation des fonctions rénales. Le technétium 99 m permet de faire des scintigraphies des vaisseaux cérébraux (angioscintigraphies) et tend à remplacer les autres isotopes dans les scintigraphies thyroïdiennes, osseuses, etc.


Mesures « in vitro »

Des prélèvements de sang étudiés en scintigraphie permettent d’apprécier la physiologie des globules rouges, leur durée de vie, d’étudier le cycle de la vitamine B12, de déceler les anémies hémolytiques, de faire des dosages hormonaux. Ces test in vitro sont appelés à un considérable développement, l’interprétation des résultats mettant à profit des programmateurs et des calculateurs électroniques.

Disons, en conclusion, que, lorsqu’on utilise un élément chimique présentant une affinité sélective pour l’organe ou le tissu pathologique à explorer et que le radio-isotope employé s’élimine d’une façon satisfaisante, cette méthode est inoffensive et permet d’obtenir des informations quantitatives et morphologiques de la plupart des tissus de l’organisme. Complétant les méthodes radiologiques, les dépassant dans des cas déterminés, la scintigraphie permet d’apprécier la dynamique cardiaque, les fonctions rénales, la pathologie pulmonaire et hépatique, les métabolismes endocriniens, et notamment celui du corps thyroïde, qui fut le premier à être exploré.

E. W.

➙ Isotopes / Radioactivité / Radioéléments / Radiologie.

 B. Delaloye, P. Magnenat, B. Scazziga et G. Gautier, Introduction à la scintigraphie clinique. Atlas (Masson, 1966). / U. Feine et coll., Nuklear Medizin. Szintigraphische Diagnostik (Stuttgart, 1969). / D. Baillet et F. C. Hugues, Atlas de scintigraphie pulmonaire (Éd. scientif. internat., 1972).