Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

scaphandre (suite)

Un autre effet de la pression est dû à la dissolution des gaz sous pression dans l’organisme. Cette dissolution est plus ou moins rapide suivant les tissus : os, graisse, muscles, moelles, mais, au bout d’un certain temps de séjour (de 12 à 24 h), on arrive à la saturation. Lors de la remontée, la pression des gaz respires diminue et le processus inverse se produit, les gaz diffusent des tissus vers le sang, du sang vers les alvéoles pulmonaires et de là à l’extérieur. Si la décompression est trop rapide, on risque des accidents dus à des embolies gazeuses vasculaires ou tissulaires. Il faut donc remonter lentement et selon un protocole précis, par exemple par paliers. En cas de remontée rapide accidentelle, il importe de recomprimer le scaphandrier ; c’est pourquoi il est recommandé de disposer de caissons de recompression lors de plongées profondes. Depuis Haldane, il existe des tables de plongée et des tables de décompression qui sont calculées par les différentes marines. En France, c’est le Groupe d’études et de recherches sous-marines (G. E. R. S.) qui est chargé de ces questions, comme de l’étude et de la mise au point des équipements de plongée pour la Marine nationale.

Pour les plongées profondes, le temps de décompression est important, et le rendement du scaphandrier, c’est-à-dire le rapport du temps de séjour au fond (donc du temps de travail) au temps total passé pour descendre, travailler et remonter, est très faible pour ce qu’on appelle les plongées d’intervention. Or, on a constaté la possibilité de faire vivre des hommes à des pressions très largement supérieures à la normale pendant des jours, voire des semaines, sans dommage pour leur organisme, sous réserve de respecter impérativement certaines précautions. Aussi tend-on à organiser des plongées à saturation.

L’exploitation des océans a commencé. Le rôle des scaphandriers est devenu de plus en plus important et étendu et ils sont maintenant océanautes. La plongée, qui reste encore, pour les faibles profondeurs, un sport et un plaisir, devient une tâche industrielle. La plongée simulée en caisson sous contrôle médical ou la plongée en mer sont l’objet d’études dans tous les pays. Les records de profondeur atteinte dépassent 600 m. Le milieu hostile est vaincu, mais les moyens technologiques qu’on doit mettre en œuvre à cet effet sont considérables.

E. G.

➙ Archéologie / Barotraumatisme / Gaz inertes / Océanographie et océanologie / Oxygène / Pression / Respiration.

 Ministère des Armées, Instruction sur la plongée en scaphandre à l’air (Impr. nat., 1956). / La Plongée (Arthaud, 1961). / W. Penzias et M. W. Goodman, Man beneath the Sea. A Review of Underwater Ocean Engineering Technology (New York, 1971).

Scaphopodes

L’une des plus petites classes de Mollusques, caractérisée par le test tubuleux et par l’anatomie des parties molles. Le Dentale de nos côtes en est le représentant le plus connu.


Tous les Scaphopodes ont adopté le même mode de vie sédentaire dans le sable vaseux ; mais, si le Dentale commun s’éloigne peu des rivages, d’autres formes ont été récoltées à de grandes profondeurs.

En dépit de grandes variations de détail, la coquille, dans laquelle l’animal peut se rétracter en totalité, consiste en un tube plus ou moins long, régulièrement effilé vers le sommet, légèrement arqué (genre Dentalium), parfois renflé dans sa région moyenne, ou en une formation utriculaire ; mais, dans tous les cas, elle est ouverte à ses deux extrémités. Les coquilles, allongées, à section circulaire ou polygonale, ont une surface lisse ou parcourue de fines côtes longitudinales, auxquelles se superposent parfois de petites costulations transversales.

Dans leur jeune âge, les Dentales s’abritent dans une coquille en forme de cloche allongée, ouverte à ses deux extrémités, mais la portion apicale se brise et disparaît. Au fur et à mesure de l’accroissement, d’autres ruptures se produisent de proche en proche, sans doute sous l’effet d’une digestion dont serait responsable la région postérieure du manteau. Cependant, le bord de l’orifice supérieur offre souvent un aspect très spécifique ; il est denticulé, festonné régulièrement, ou même fendu sur une distance plus ou moins grande.

Lorsqu’on extrait un Dentale de son tube, il est aisé de voir que le manteau, fixé à la coquille le long de sa face dorsale, concave, forme en arrière du pied un étui tégumentaire complet, par suite de la fusion de ses deux lobes sur la face ventrale.

En arrière, cependant, le manteau se prolonge par le « pavillon », tube court affleurant l’orifice postérieur, par où s’effectuent l’entrée et la sortie de l’eau.

Le pied, long cylindre musculeux qui émerge de l’avant du tube palléal, se découpe en trois petits lobes (Dentalium), ou bien (Siphonodentalium) il se prolonge en un pédoncule à disque terminal lobé. Dorsalement, à sa base, s’allonge un mufle à bouche terminale flanqué sur ses côtés de deux bourrelets d’où naissent de très nombreux captacules, fins filaments ciliés très mobiles, dilatés à leur extrémité, qui sont des organes de capture des proies. En arrière du pied s’ouvrent l’anus, ventral, médian, et deux orifices rénaux, dont le droit seul assure l’évacuation des produits génitaux.

La zone palléale ventrale et antérieure serait la principale région respiratoire ; il s’y trouve aussi deux zones de crêtes à longs cils, qui semblent intervenir dans la conduction des proies vers la bouche. Certaines de celles-ci sont apportées par le courant d’eau que créent les zones ciliées, du pavillon vers la bouche. Le rejet de l’eau se produit par des contractions rythmiques du pied.

Les œufs du Dentale sont fécondés en mer ; ils se développent en larves de type trochophore à trois couronnes de cils.

Les Dentales vivent enfouis dans le sable vaseux. Ils y sont comme fichés à 45°, mais leur pavillon affleure au niveau du substrat. Lors des grandes marées, par suite de l’exondation assez prolongée, ils émergent lentement de leur retraite, basculent et tombent sur le sable ; mais dès le retour de l’eau, grâce à leur pied très mobile, ils s’enfoncent de nouveau.

Les Siphonodentaliidés s’ancrent plus solidement par leur disque pédieux.

Dans la vase même, les Dentales capturent des Foraminifères, des Diatomées, dont ils se nourrissent. Ces petites proies, saisies par les captacules, sont conduites à la bouche directement ou par les aires ciliées avant d’être broyées par la puissante radula.

Les Scaphopodes ont un certain nombre d’ennemis ; ils sont consommés par quelques Mollusques, par des Poissons et ils hébergent aussi très souvent des parasites : Cercaires, Haplosporidies, Coccidies. Les Cercaires peuvent envahir une grande partie de la masse viscérale et détruire complètement la gonade.

Les Scaphopodes habitent tous les océans ; des Siphonodentalium ont été capturés vers Java à des profondeurs voisines de 7 000 m.

A. F.

 H. Lacaze-Duthiers, Histoire de l’organisation, du développement, des mœurs et des rapports zoologiques du dentale (Masson, 1858). / H. Hoffmann, « Scaphopoda » in Bronns Klassen und Ordnungen des Thier-Reichs (Leipzig, 1930). / E. Fischer-Piette et A. Franc, « Classe des scaphopodes », in Traité de zoologie sous la dir. de P.-P. Grassé, t. V, fasc. 3 (Masson, 1968).