Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
S

scandinaves (littératures) (suite)

C’est au cours des premières décennies du xxe s. que les îles Féroé connaissent leur véritable essor littéraire. Jens Hendrik Oliver Djurhuus (1881-1948) est le premier à faire sentir la valeur de la langue féringienne dans ses propres recueils de poèmes et dans ses traductions. Son frère, Hans Andreas Djurhuus (1883-1951), reprend des motifs féringiens dans ses contes. Son recueil de Chants pour enfants (1914) est touchant par sa simplicité. Mikkjal Dánjalsson a Ryggi (1879-1956) compose des poèmes sur la pêche ou les travaux à la ferme, ainsi que la célèbre ballade intitulée Brestikvaeði. Le premier roman féringien, la Tour de Babel (1909), est dû à Rasmus Rasmussen (1871-1962). Heðin Brú (né en 1901) décrit dans un style très personnel la vie des vieux insulaires ; il publie des romans, dont Mirages (1930), suivi de Étreinte (1935), et des nouvelles, dont le recueil intitulé l’Ombre de la montagne. Deux autres romanciers écrivent pour leur part en danois, mais restent fidèles à leurs sources : Jørgen-Frantz Jacobsen (1900-1938), auteur de Barbara (1939), et William Heinesen (né en 1900), dont les meilleurs ouvrages sont la Marmite noire (1949) et le Bon Espoir (1964).

En Islande, la poésie néo-romantique revit grâce à Stefán frá Hvítadal (1887-1933), dont le meilleur recueil s’intitule les Chants du voyageur (1918), et à Davíð Stefánsson (1895-1964), qui adopte la langue courante dans sa poésie à la fois libre et imagée (les Plumes noires, 1919). À la scène, Jóhann Sigurjónsson (1880-1919) s’intéresse avant tout à la psychologie et prend volontiers ses sujets dans le passé islandais. Gunnar Gunnarsson (1889-1975) écrit des romans naturalistes, comme l’Église sur la montagne (1923-1928), en partie autobiographique, puis des romans historiques, comme la Terre (1933). Cependant, un courant socialiste s’accentue et prend sa véritable ampleur avec Þórbergur Þórðarson (Thórbergur Thórdarson, né en 1889). Ses Lettres à Laura (1924) sont des essais brillants et délibérément anticonformistes tant par le fond que par la forme. Le romancier Halldór Laxness* (né en 1902 ; prix Nobel en 1955) bénéficie d’une audience internationale. Il relate ses expériences religieuses dans le Grand Tisserand de Cachemire (1927), puis, attiré par le communisme, exalte le courage du peuple islandais avec Salka Valka (1931-32) et les Gens indépendants (1934-35). Il consacre un cycle romanesque, Lumière du monde (1937-1940), au poète Ólafur Kárason Ljósvíkingur, une trilogie, la Cloche d’Islande (1943-1946), à la domination danoise du xviiie s., et un roman, Gerpla (1952), au temps des sagas. Son œuvre, en perpétuelle évolution, contribue à un renouveau stylistique de l’islandais.


De nos jours

De la Seconde Guerre mondiale à nos jours, les littératures scandinaves se placent sous le signe du modernisme, qui triomphe à peu près dans tous les genres.

En Suède, Gunnar Ekelöf (1907-1968), qui a été le premier poète à adopter des positions nettement surréalistes dans son recueil Tard sur la terre (1932), revient ensuite au symbolisme. Erik Lindegren (1910-1968) compte parmi les plus grands poètes suédois, grâce à son recueil l’Homme sans voie (1942). Stig Dagerman* (1923-1954) exprime dans son œuvre l’angoisse de vivre et le désespoir, tant avec ses romans (l’Enfant brûlé, 1948) qu’avec ses drames (l’Ombre de Mart, 1938). Lars Ahlin (né en 1915) renouvelle le roman prolétarien avec Tåbb et le manifeste (1943). Lars Gyllensten (né en 1921), romancier existentialiste, est l’auteur de Senilia (1956) et de la Mort de Socrate (1960). Enfin, Sara Lidman (née en 1923) revient pour un temps au récit paysan avec le Pays des ronces (1955), tandis que Per Olof Sundman (né en 1922), au plus haut point partisan de l’objectivité, est célèbre pour sa nouvelle les Chasseurs (1957).

Au Danemark, Paul La Cour (1902-1956) reste fidèle à son humanisme, qui s’exprime notamment dans ses recueils de poèmes : La neige tombe (1938), Entre l’arbre et l’écorce (1950). Kjeld Abell (1901-1961) renouvelle la technique dramatique avec Anna Sophie Hedvig (1939) et Jours dans un nuage (1947). Hans Christian Branner (1903-1966) écrit des romans psychologiques particulièrement pénétrants, surtout Nul ne connaît la nuit (1955), ainsi que des nouvelles et des pièces de théâtre. Martin A. Hansen (1909-1955) souligne l’importance des valeurs traditionnelles, pour un monde déchiré, dans ses nouvelles et ses romans, comme Christophe l’heureux (1945) et le Menteur (1950). Le modernisme est représenté par Ole Sarvig (né en 1921), qui s’impose dès son premier recueil (Poèmes verdoyants, 1943), puis avec ses romans (la Rose de pierre, 1955) ; par Thorkild Bjørnvig (né en 1918), dont la poésie hermétique peu commune se retrouve dans ses recueils (Anubis, 1955 ; le Corbeau, 1968) ; par Klaus Rifbjerg* (né en 1931) enfin, qui, dans ses romans (Amateur d’opéra, 1966), ses recueils de poèmes (Camouflage, 1961) et ses pièces (Voks, 1968), utilise tous les moyens à sa portée pour créer l’inattendu.

En Norvège, la langue néo-norvégienne est mise à l’honneur par quelques poètes, notamment par Tor Jonsson (1916-1951), mais avant tout par Tarjei Vesaas* (1897-1970), romancier et auteur dramatique, qui dépeint de façon très impressionniste la lutte entre l’angoisse de la vie et la croyance en la vie (la Maison dans la nuit, 1945 ; les Oiseaux, 1957 ; le Bateau du soir, 1968). Aksel Sandemose (1899-1965), d’origine danoise, expérimente également les formes du modernisme : citons parmi ses romans Nous nous mettons des cornes (1936) et le Mariage de Felicia (1961). Le romancier Arthur Omre (1887-1967) continue la tradition réaliste avec la Fuite (1936). Johan Borgen (né en 1902) touche à tous les genres sans avoir de tendance littéraire bien précise. Kåre Holt (né en 1917) représente l’existentialisme avec La vengeance m’appartient (1953) et écrit par ailleurs des romans historiques. Jens Bjørneboe (né en 1920) est l’auteur de romans que nourrissent l’indignation et la satire : Jonas (1955), le Moment de liberté (1966).