Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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São Paulo (suite)

Les fonctions et la population

De nos jours, São Paulo est une très grande métropole industrielle, la plus grande du Brésil : à elle seule, elle représente plus de 40 p. 100 de la valeur industrielle totale de cette nation, et 34 p. 100 de sa population du secteur secondaire. Le Grand São Paulo emploie près de 900 000 personnes dans l’industrie. Toutes les branches industrielles sont représentées, depuis celles de pointe, électronique, électrométallurgie, chimie, jusqu’aux branches plus traditionnelles du cuir, de la chaussure, du meuble ou du textile. Il existe encore de petits établissements appartenant à des entreprises familiales, mais, de plus en plus, ce sont les filiales de grandes entreprises américaines qui ont créé de grandes usines de production automobile, métallurgique ou chimique. São Paulo, d’autre part, assure un rôle dirigeant sur l’ensemble de l’espace brésilien. Bien des usines qui se localisent dans les autres villes dépendent de sièges sociaux installés dans la cité pauliste.

En effet, plus encore qu’une métropole industrielle, São Paulo est la métropole nationale du secteur tertiaire pour l’ensemble du Brésil. Celle-ci abrite environ 35 p. 100 des établissements bancaires du pays, et surtout les directions des banques d’affaires, particulièrement de celles qui sont reliées aux grandes banques américaines et européennes. C’est également dans cette ville que sont installés les bureaux d’études, qui apportent leur appui technique au développement de l’économie moderne, et toutes les sociétés financières, qui confèrent à São Paulo un pouvoir fondamental dans le domaine de l’argent. De ce fait, la prépondérance de cette cité s’affirme aussi dans le domaine du grand commerce, avec l’implantation des directions des sociétés d’import-export. Cette fonction commerciale s’appuie sur le port de Santos, qui, bien que situé à une cinquantaine de kilomètres de la ville, peut être considéré comme une sorte d’annexe technique de la grande métropole et se trouve être aujourd’hui le deuxième port du Brésil avec un trafic de 14 Mt en 1972 ; celui-ci repose d’abord sur les exportations, dont le café représente encore 36 p. 100 des recettes totales, mais Santos reçoit aussi de très nombreux produits des grands pays industriels.

Cet essor des fonctions dirigeantes et l’accumulation de gens riches qui en découle et renforce le noyau traditionnel de l’aristocratie pauliste font de la ville un très grand foyer de services et d’activités tertiaires induites de ce pouvoir de consommation diversifié. Aussi y trouve-t-on toute la gamme des commerces de luxe, toutes les fonctions médicales jusqu’aux spécialités les plus rares, ainsi qu’un très grand nombre d’instituts de recherches, liés à la fonction universitaire de la ville également très développée : de ce point de vue, São Paulo n’a guère à envier aux plus grandes villes du continent européen ou de l’Amérique du Nord. Ces diverses activités de services sont d’autant plus développées qu’elles répondent non seulement aux besoins des habitants de la ville même, mais de ceux de l’ensemble d’une vaste zone d’influence s’étendant à l’État de São Paulo et à une partie des États voisins de Paraná et Santa Catarina au sud et de Minas Gerais au nord.

Ainsi s’explique la vertigineuse augmentation de la population pauliste, à un rythme sans cesse accéléré. Actuellement, l’immigration internationale est en diminution. La croissance relève de la conjonction de l’accroissement naturel et de la migration de populations rurales ou urbaines en provenance des autres régions brésiliennes ; attirés par ce foyer exceptionnel d’activités, ces migrants constituent un apport de plus en plus considérable pour la ville et ses environs ; São Paulo est le premier point d’attraction, en particulier de la population pauvre du Nordeste. Pendant longtemps, l’essor exceptionnel des fonctions permet à la ville d’absorber l’essentiel de cet apport migratoire : après une phase de difficultés, relativement courte, ces migrants s’insèrent dans l’économie urbaine. Aussi la grande ville comprend-elle, certes, des quartiers pauvres, mais non les bidonvilles qui caractérisent, d’une façon générale, les autres grandes cités brésiliennes et qui résultent de la rupture d’équilibre entre les croissances économique et démographique. Pourtant l’accélération du mouvement de migration risque fort de compromettre cette situation.

L’importance de la fonction industrielle se traduit dans la répartition de la population active de l’agglomération de São Paulo : 47 p. 100 des habitants sont employés dans l’industrie et la construction ; ce taux est tout à fait exceptionnel dans les villes brésiliennes et, d’une façon plus générale, dans les villes du continent latino-américain, caractérisées par une énorme prépondérance du secteur tertiaire, qui, en vérité, cache les petits emplois et la marginalité d’une partie de la population active. À São Paulo, le tertiaire n’occupe que 51 p. 100 de la population active ; ce taux se répartit entre le commerce et la banque, qui emploient 19 p. 100 des habitants, les transports, 8 p. 100, et l’administration, 24 p. 100.


L’organisation de l’espace urbain

Contrairement à la plupart des autres grandes cités latino-américaines, qui se sont développées dans des sites de bord de mer, São Paulo est installé dans un haut bassin ouvert au milieu des hautes terres du Brésil tropical atlantique. De tous côtés en effet, des éléments plus élevés du relief, bosses ou pitons, ferment l’horizon ; la topographie même dans laquelle s’est développé le tissu urbain se situe entre 725 et 850 m d’altitude. Le site urbain comprend d’abord la plaine alluviale du haut Tietê et de ses affluents, située vers 720-725 m d’altitude. Ces zones basses ont longtemps été des marécages, et la poussée urbaine a dû les conquérir en les assainissant. Au départ, elles ont été un élément répulsif, et la ville ancienne s’est installée dans le second élément du site urbain, c’est-à-dire sur les collines ou lignes de hauteurs situées dans les interfluves entre ces vallées affluentes et la vallée principale du Tietê. Pendant longtemps, l’ensemble urbain est donc resté assez fragmenté et a posé de sérieux problèmes pour les axes de communication, qui permettent maintenant d’aller sans difficultés d’un quartier à un autre en franchissant les vallées par des viaducs. Le centre-ville occupe encore la colline historique qui fut à l’origine de la cité, mais, à la place des petites maisons de type colonial entourées de jardins, des alignements de gratte-ciel bordent des rues souvent étroites ; c’est là que se concentrent les banques et les sièges sociaux des grandes maisons de commerce. L’extension de ce centre des affaires s’effectue essentiellement le long des grands axes formés par les avenues qui partent de cette colline et la relient aux quartiers résidentiels. De plus en plus, ces grandes voies sont surplombées par de très hautes constructions qui abritent des bureaux et symbolisent la fonction dirigeante de la métropole.