Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Romanov (suite)

➙ Alexandre Ier / Alexandre II / Alexandre III / Catherine II / Moscovie / Nicolas Ier / Nicolas II / Pierre Ier le Grand / Révolution russe de 1905 / Révolution russe de 1917 / Russie.

 M. de Saint-Pierre, le Drame des Romanov (Laffont, 1967-1969 ; 2 vol.). / D. Olivier, les Romanov (Rencontre, Lausanne, 1968). / V. Alexandrov, la Fin des Romanov (Alsatia, 1969).

romantisme

Certainement le plus populaire des mouvements littéraires et, de ce fait, le moins facile à cerner dans les profondeurs : omniprésent d’un bout à l’autre de l’Europe sans revêtir jamais les mêmes formes ni recouvrir les mêmes significations, réduit dans bien des cas à de simplistes manifestations d’un épanchement de sensibilité, le romantisme souffre autant qu’il bénéficie de son prestige.


Généralités


Un terme difficile à cerner

L’origine du mot romantisme renvoie au substantif roman, qui, en ancien français, était synonyme de « langue vulgaire », par opposition à « langue noble », le latin. D’où un glissement sémantique qui, dès le xiie s., a réduit l’extension du vocable romant, aux seuls récits composés en « langue vulgaire » et, à partir du xive s., n’a plus servi qu’à désigner des récits de chevalerie en vers, puis en prose.

Emprunté par l’anglais, le mot donne le dérivé romantic (attesté dès 1650), dont le sens recouvre celui de l’adjectif français romanesque. C’est avec cette signification qu’il revient en France dès 1661 : son emploi est alors exceptionnel. Ignoré des dictionnaires, des traducteurs même, qui lui préfèrent soit le général romanesque, soit l’inexact pittoresque (abbé J. Le Blanc, 1745), le terme fait une entrée remarquée dans la préface des Œuvres de Shakespeare, que vient de traduire Pierre Le Tourneur (1776). Si ce dernier parle « du paysage aérien et romantique des nuages », Rousseau, pour sa part, trouve dans la « Cinquième Rêverie » « les rives du lac de Brenne [...] plus sauvages et romantiques que celles du lac de Genève » (1782). On le voit, même s’il pénètre dans la langue littéraire, l’adjectif romantique n’existe alors que comme doublet, encore que, déjà, il s’oppose au romanesque comme la fable à la situation. Mais cela demeure flou. Certains prétendent alors le mot indéfinissable, et le Dictionnaire de l’Académie française, qui l’accueille enfin en 1798, semble de cet avis, puisqu’il se contente d’entériner l’existence du terme sans en préciser le sens. Louis Sébastien Mercier résume ainsi cette paradoxale situation en 1801 : « On veut le romantique, on ne le définit point. »

C’est d’Allemagne que va venir la lumière : la même année, Friedrich von Schlegel oppose l’adjectif romantisch (emprunté, lui aussi, à l’anglais romantic à la fin du xviie s.) à toute la littérature classique (l’Antiquité et son héritage moderne). Le mot romantique vient de trouver sa première signification véritable : il désignera toute force d’opposition du modernisme à la tradition qu’incarne le classicisme. Par là même, en rejetant l’exemple de l’Antiquité gréco-romaine, le romantisme s’affirme comme le courant moderne et national puisant ses forces dans l’histoire : ainsi s’explique le rôle politique joué par ce mouvement dans les pays en quête d’unité, en Italie particulièrement, où le romanticismo sert de fer de lance aux revendications des nationalistes en lutte contre le joug autrichien.

Il n’en demeure pas moins que, malgré de profondes originalités dans les manifestations particulières des romantismes nationaux, des thèmes communs et une même volonté de rupture avec la littérature « classique », il est possible de parler, à l’échelle du Vieux Continent, d’un mouvement romantique et d’un romantisme européens.


Dans la foulée de l’histoire : ruptures romantiques

Il est devenu traditionnel d’opposer le siècle romantique à celui des Lumières* : et pourtant comment expliquer l’influence exercée par les philosophes sur les artistes de la première moitié du xixe s. Contradiction inhérente à tout mouvement. Il serait plus juste d’y voir une même attitude de refus, l’une dans l’ordre esthétique, l’autre dans l’ordre moral et politique (au sens le plus large du terme) devant un caractère d’obligation qui prenait vite l’aspect d’un carcan tyrannique.

Le classicisme*, si parfaitement ordonné au xviie s. dans l’art français, n’a pas connu le même essor dans les autres pays : courant d’importation, il a duré quelques années (1720-1740) en Angleterre sous l’influence de Pope et n’a été qu’une brève phase transitoire dans les pays germaniques (1760-1780). La médiocre qualité de la poésie française du siècle philosophique, poésie le plus souvent didactique et ennuyeuse, traduit la persistance du goût classique pour l’impersonnalité. Et si quelques figures accompagnent J.-J. Rousseau dans l’épanchement de la subjectivité et du lyrisme naturel, il est impossible de trouver en France un véritable courant préromantique comme le Sturm und Drang allemand ou la période de 1770 à 1790 en Angleterre. Cette persistance du classicisme explique que l’éclatement romantique français ait été à la fois plus tardif et plus violent qu’ailleurs : il lui fallait déraciner deux siècles de raison et de logique, et cela supposait un changement général des esprits.

Cette tâche fut facilitée par le bouleversement révolutionnaire : la tourmente républicaine, puis l’épopée napoléonienne marquèrent en vingt ans le monde d’un sceau irréversible. Malgré le dégoût général pour les horreurs de la Terreur, en dépit de l’hostilité de beaucoup aux régimes non monarchiques, tous subiront la fascination de cette époque, jusqu’à en faire un véritable mythe artistique.

L’espoir né de ce bouleversement d’une société ouvrait une brèche dans l’équilibre classique et semblait appeler une révolution esthétique : « Le goût en France attend son 14 juillet », pourra s’écrier Ludovic Vitet au plus fort de la bataille romantique.