Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
R

Robert le Sage (suite)

La fin du règne

N’intervenant plus dans les conflits de l’Italie du Nord et de l’Italie centrale, Robert de Naples en est néanmoins victime. Ainsi perd-il en 1335 la seigneurie de Gênes, qui chasse les chefs guelfes, mais à laquelle il enlève pourtant Vintimille le 25 mai ; de même il ne peut empêcher le soulèvement d’Asti, qui chasse ses partisans en 1339 et qui se donne au Milanais Luchino Visconti en 1342. Par ailleurs, il commet l’erreur de refuser d’acheter à Humbert II le Dauphiné, dont la possession lui aurait permis de consolider l’ensemble de ses possessions occidentales : Provence et Piémont. Il se montre incapable de mener à bien la reconquête de la Sicile malgré une minutieuse préparation d’expéditions, qui se transforment en raids de pillages, lui aliénant alors les populations siciliennes. Il se heurte par ailleurs à la mauvaise volonté de ses alliés italiens : celle de Pise, qui se soustrait à l’obligation d’engager dix galères dans les expéditions contre la Sicile ; celle de Venise, dont les marchands combattent les siens en mer ; celle de Florence, enfin, qui se rapproche de Louis de Bavière après avoir sollicité en vain son aide contre les Pisans qui assiègent Lucques, que la seigneurie a achetée le 7 août 1341. Retirant alors précipitamment leurs capitaux des banques florentines, les déposants angevins provoquent la faillite de celles-ci.

Robert de Naples, privé de l’alliance de Florence, hostile à la tutelle pontificale, lègue donc un royaume affaibli à sa petite-fille Jeanne Ire, que son testament du 16 janvier 1343 place jusqu’à l’âge de vingt-cinq ans sous l’autorité d’un conseil de régence présidé par la reine Sancia et dont sont exclus les Angevins de Tarente et de Durazzo. Entré dans l’ordre de Saint-François le 2 janvier, il peut alors mourir dans la paix, entouré des spirituels auxquels il avait été très attaché pendant toute sa vie.

P. T.

➙ Florence / Guelfes et gibelins / Italie / Marseille / Milan / Naples / Provence / Savoie / Sicile / Toscane / Visconti.

 G. Yver, le Commerce et les marchands dans l’Italie méridionale au xiiie et au xive siècle (Fontemoing, 1903). / R. Caggese, Roberto d’Angio e i suoi tempi (Florence, 1922-1930 ; 2 vol.). / E. G. Léonard, les Angevins de Naples (P. U. F., 1954).

Robert (Hubert)

Peintre et graveur français (Paris 1733 - id. 1808).


Issu d’une famille bourgeoise qui voulait le voir entrer dans les ordres, il put cependant fréquenter l’atelier du sculpteur Michel-Ange Slodtz*, qui lui reconnut des dons et l’incita à aller en Italie. Il put y accompagner en 1754 le comte de Stainville (futur duc de Choiseul), nommé ambassadeur près du pape, dont la famille avait employé comme intendant M. Robert père.

Élève de Giovanni Paolo Pannini (v. 1691-1765) et de Pierre Antoine Demachy (1723-1807), il peint les monuments célèbres de Rome et, grâce à son protecteur, peut devenir pensionnaire de l’Académie de France (1759). En compagnie de Fragonard* et de l’abbé de Saint-Non (Jean-Claude Richard, archéologue et graveur [1727-1791]), il parcourt la campagne romaine, son carnet de croquis à la main. En 1760, Saint-Non l’emmène à Naples ; les trois hommes visitent ensemble Portici et Pouzzoles. En 1762, les années d’internat d’Hubert Robert sont écoulées et un autre protecteur, le bailli de Breteuil, le fait aller à Florence, où il travaille autant qu’à Rome. Au retour, il rencontre Claude Henri Watelet (1718-1786), un receveur général des finances qui pratique la gravure et l’eau-forte et l’initie à cette discipline.

Il reste en tout onze années en Italie, s’y faisant une solide réputation ; pendant tout ce temps, il envoie à Paris nombre d’œuvres qui vont dans le sens du goût antiquisant alors en train de se propager. Précédé de ces envois, il entre, à son retour, dans les faveurs du marquis de Marigny, directeur général des Bâtiments. Ses paysages de ruines obtiennent un franc succès auprès du public. Il est élu dès 1766 à l’Académie avec le Port de Ripetta à Rome (Paris, École des beaux-arts), où il a groupé des monuments éloignés les uns des autres selon une habitude qu’il conservera : ainsi, peignant les antiquités romaines du midi de la France, il rassemble dans une même vision des monuments de Nîmes, d’Orange et le pont du Gard. Il ne se soucie pas trop de vérité et interprète ses sujets, quand il ne les invente pas. Il expose au Salon pour la première fois en 1767, avec succès. Diderot le découvre : il le loue et le louera, mais saura aussi le critiquer.

Ce joyeux vivant, ce mondain est bien l’homme du xviiie s. avec ses paysages peuplés de personnages pittoresques et empreints de sentimentalité gracieuse. On lui a reproché un manque de profondeur, une trop grande rapidité d’exécution, qui ont nui à sa réputation. En réalité, son travail est sérieux, pensé, même s’il est exécuté prestement. Hubert Robert a laissé d’innombrables dessins, qu’il offrait parfois en remerciement d’invitations ; certaines séries sont de véritables reportages (sanguines des années italiennes au musée de Valence). Trop occupé, il n’a exécuté que dix-huit gravures, mais ses œuvres ont été beaucoup reproduites de son temps (« griffonnis » de Saint-Non). Si son acte de décès le qualifie de « ruiniste », il est aussi peintre de parcs et de jardins. Il s’est d’ailleurs occupé de tracés et d’aménagements de jardins pour Versailles, Compiègne, Méréville. Enfin, il a exécuté des panneaux décoratifs pour de grandes demeures. Ses tableaux sont notamment conservés au Louvre, aux musées d’Amiens, de Besançon, de Rouen, au Metropolitan Museum de New York...

La Révolution n’apporte aucun trouble à son prestige ; Hubert Robert occupe même plusieurs fonctions officielles. Mais, le 29 octobre 1793, il est emprisonné pour n’avoir pas fait renouveler sa carte de civisme. Il se peut qu’il s’agisse d’une vengeance de David*, bilieux et jaloux. Hubert Robert ne perd pas sa belle humeur, continue à dessiner, redresse le moral des détenus. Libéré par Thermidor, il reprend son existence. Mais la fatigue se fait sentir, et il expose pour la dernière fois au Salon de 1798, dix ans avant de mourir d’apoplexie.

M. B.

 P. Sentenac, Hubert Robert (Rieder, 1930). / G. K. Loukomski et P. de Nolhac, la Rome d’Hubert Robert (Vincent et Fréal, 1931). / M. Beau, la Collection des dessins d’Hubert Robert au musée de Valence (Impr. Audin, Lyon, 1969).