Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
R

rétroaction (suite)

Une caractéristique fondamentale de la rétroaction est que son intervention est toujours postérieure à la variation d’effet qui l’engendre, les anticipations de correction n’étant que des prédictions. Ce facteur temps est fondamental ; c’est lui qui est essentiellement à l’origine des phénomènes de pompage, soigneusement évités par les automaticiens, mais qui au contraire se retrouvent à tous les niveaux des phénomènes naturels. Il est même vraisemblable qu’ils soient inséparables des systèmes vivants. En outre, la correction d’erreur est « coûteuse » en énergie. Dans de nombreux cas, on peut choisir pour une même correction entre une dépense surtout en temps ou une dépense surtout en énergie.

L’organisation cybernétique d’un système est un palliatif onéreux qui n’a d’utilité que lorsque le contrôle ou la connaissance d’une partie des facteurs d’un événement ne sont pas assurés.

En biologie, on a constaté que les mouvements fins, rapides et précis étaient contrôlés par une rétroaction en tendance « explosive » destinée à fournir une puissance instantanément disponible, cette rétroaction étant modulée, et au besoin inhibée, par une rétroaction négative. Cette combinaison est particulièrement efficace. D’autre part, contrairement à l’univers technique, pour lequel les systèmes dits « d’asservissement » sont des accessoires (régulateur de Watt), il semble bien que, d’un certain point de vue, la matière vivante ne soit constituée que de servomécanismes imbriqués les uns dans les autres. Une analyse grossière fait apparaître des niveaux d’organisation avec subordination de chaque niveau aux valeurs de consigne qui lui parviennent du niveau supérieur. En réalité, il est extrêmement probable que des analyses plus fines mettront en évidence de multiples croisements de contrôle et que la notion de niveau ne constituera plus qu’un modèle commode par les facilités de compréhension qu’il apporte.

J. S.

➙ Automatique / Automatisme / Autonomie / Cybernétique / Intelligence artificielle / Modèle.

 N. Wiener, The Human Use of Human Beings, Cybernetics and Society (Boston, 1950 ; trad. fr. Cybernétique et société, Deux Rives, 1952, nouv. éd., U. G. E., 1962). / P. Naslin, les Systèmes asservis (Éd. de la Revue d’optique, 1951) ; Technologie et calcul pratique des systèmes asservis (Dunod, 1954 ; 3e éd., 1968). / P. de Latil, la Pensée artificielle (Gallimard, 1953). / A. Ducrocq, Logique générale des systèmes et des effets (Dunod, 1960).

Retz (Jean-François Paul de Gondi, cardinal de)

Homme politique et écrivain français (Montmirail 1613 - Paris 1679).


Petit-fils du maréchal Albert de Gondi et fils de Philippe Emmanuel de Gondi, général des galères de Louis XIII, et de Françoise Marguerite de Silly, Jean-François Paul naît au château de Montmirail en septembre 1613. En 1622, à la mort de son frère Henri de Gondi, marquis des Isles-d’Or, deuxième fils de Philippe Emmanuel, voué à l’Église et à la succession de son oncle, l’archevêque de Paris, il reçoit ses abbayes et, bien qu’il se proclame lui-même 1’« âme la moins ecclésiastique qui soit dans l’univers », il est à son tour destiné au clergé et tonsuré (1623).

Il fait de brillantes études au collège de Clermont (Vincent de Paul, quoi qu’on en ait dit, n’a jamais été son précepteur, mais celui de ses deux frères aînés) et est pourvu d’un canonicat à Notre-Dame de Paris (1627). Bachelier en théologie en 1631, il est licencié en 1638. À vingt-deux ans, il prêche son premier sermon devant la Cour. Ses études ne l’empêchent pas de mener une vie de plaisirs et de luxe ponctuée de nombreux duels et d’aventures amoureuses.

Il était déjà l’auteur d’une histoire, la Conjuration du comte Jean-Louis de Fiesque, écrite vers 1632. Il étudie l’histoire de l’Antiquité romaine avec plus de passion que les Évangiles, les intrigues politiques de l’ancienne Rome surtout le fascinent ; il écrira plus tard : « Je suis persuadé qu’il faut plus de grandes qualités pour former un bon chef de parti que pour faire un bon empereur de l’univers. »

Aussi complote-t-il contre Richelieu* et est-il probablement mêlé à la conspiration avortée du comte de Soissons contre le ministre (1641). Richelieu le tient en piètre estime et se méfie de lui : « Voilà un dangereux esprit », a-t-il dit de lui. Aussi lui refuse-t-il la coadjutorerie de son oncle, l’archevêque de Paris, et exile-t-il son père à Lyon.

Après la mort de Richelieu et de Louis XIII, Anne d’Autriche le nomme cependant coadjuteur de l’archevêque et archevêque in partibus de Corinthe. Il est sacré à Notre-Dame de Paris le 31 janvier 1644 et se dépeint à ce moment « aussi homme de bien pour le salut des autres qu’il pourrait être méchant pour lui-même ». Aussitôt, il se rend populaire parmi le peuple parisien par ses aumônes, son talent de prédicateur, sa piété, qu’il sait rendre démonstrative, et il entreprend même avec zèle de réformer son clergé.

À l’Assemblée du clergé, en 1645, son attitude le rend suspect à Mazarin*, et la Cour commence à se méfier de lui. Au début de la Fronde, il veut se poser en médiateur entre le gouvernement royal et le peuple de Paris révolté, mais à la journée des Barricades (26 août 1648) il est mal reçu par Anne d’Autriche, qui le rabroue et lui dit : « Allez vous reposer, vous avez bien travaillé. » Furieux, il se lie aux rebelles et espère devenir gouverneur de Paris. Durant les troubles de la Fronde*, tour à tour allié ou opposé aux différentes factions, il ne sert en définitive que lui-même et ses ambitions. Il contribue au départ de Mazarin le 7 février 1651 et réussit, par ses intrigues, à se faire nommer cardinal (févr. 1652). « Comme vous avez toujours été un grand fourbe, je ne fais point de doute que vous ne vous démêliez fort bien de ces commissions », telles sont les instructions qu’il expédie à son agent à Rome, l’abbé Guillaume Charrier, pour cette affaire.

Mais ces trahisons et ces volte-face successives lui ont aliéné le peuple de Paris. La Cour veut en profiter pour l’éloigner : elle lui offre l’ambassade de Rome et, sur son refus, le fait arrêter au Louvre le 19 décembre 1652 et enfermer au donjon de Vincennes.