Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Résistance française (la) (suite)

La Bretagne et Saint-Marcel (9-18 juin 1944)

Le 6 juin 1944, des éléments du 2e régiment de chasseurs parachutistes (commandant Pierre Bourgoin [1907-1970]) sont largués en Bretagne pour effectuer des missions de sabotage et d’appui des maquis. Trois compagnies sont ainsi parachutées à Saint-Marcel les 9 et 10 juin, où elles sont rejointes par le 2e bataillon O. R. A. (commandant Le Garrec) et les 1 200 hommes du 8e bataillon F. F. I. (commandant Caro). En quelques jours, grâce aux parachutages, 8 000 hommes sont équipés. Le 18, les Allemands attaquent en force le camp de Saint-Marcel, défendu par 2 400 hommes ; Bourgoin fait appel à l’aviation alliée, qui intervient à 16 h. Le soir, le combat fait toujours rage, et Bourgoin doit prescrire le décrochage : 560 Allemands et 42 Français tués, une cinquantaine de blessés français, dont plusieurs seront massacrés, tel est le lourd bilan de la journée de Saint-Marcel, dont le retentissement fut grand en Bretagne.


La guérilla

Les grands combats, devenus légendaires (quoique inadaptés à ce genre de guerre), ne doivent pas faire oublier l’importance et l’efficacité de la guérilla qui s’est développée sur tout le territoire : de janvier à octobre 1943, par exemple, 3 800 sabotages ont été réalisés par la Résistance.


Les F. T. P. en Corrèze

Si toutes les formations participent à cette guérilla, elle est le mode privilégié d’action des F. T. P., rarement engagés par leurs chefs dans de grands combats. Dès le printemps de 1943, époque où se forment les premiers maquis de réfractaires au Service du travail obligatoire, la Corrèze comprend plusieurs camps F. T. P. qui, durant un an, se défendent contre les attaques des Allemands, de la police et de la Milice. Le 30 mars 1944, ordre leur est donné de passer à l’attaque. Jusqu’au 30 mai, 200 actions sont à mettre au compte des 700 maquisards F. T. P. de la Corrèze : 50 p. 100 sont des sabotages (voies ferrées, lignes électriques), 20 p. 100 des coups de main nécessaires à la vie des maquis, 30 p. 100 des attaques contre la police ou les Allemands. Si les combats défensifs de l’A. S. et de l’O. R. A. ont dépassé les possibilités des maquis, la guérilla présentait aussi le risque d’un déclenchement prématuré de l’insurrection. Les 7 et 8 juin, les F. T. P. de la Corrèze attaquent la garnison allemande de Tulle, mais doivent se replier le 8 au soir devant la division SS das Reich. Les représailles allemandes coûteront à la ville 114 civils tués et 150 déportés.


L’apport de la Résistance à la Libération

Dans la grande bataille qui chassera les Allemands de France, le général Eisenhower reconnut aux F. F. I. et à la Résistance l’efficacité de 15 divisions. En dehors de leur action spectaculaire à Paris* (où le colonel Henri Rol-Tanguy [né en 1908], chef régional F. F. I., a joué un rôle essentiel) et dans les métropoles de Marseille et de Lyon, il faut mentionner les remarquables organisations de guérilla de l’Ain (qui ont occupé Oyonnax le 11 nov. 1943), de Bourgogne, du Morvan, du Var, l’exécution du plan Tortue contre les blindés allemands envoyés en Normandie, l’activité du corps franc du capitaine Jean Pommiès (1904-1972), armature militaire du Sud-Ouest, la reddition, en septembre, des 25 000 Allemands de la colonne Elster...

La clandestinité débouchait sur des opérations de type classique auxquelles les F. F. I. apportaient le témoignage de la volonté des Français de participer à leur libération. Dans cette bataille qui effaçait la défaite de 1940, il ne pouvait plus y avoir qu’une seule armée ; c’est ce que voulut le général de Lattre de Tassigny en réalisant en plein combat l’amalgame dans la Ire armée de 137 000 F. F. I. Dès novembre, leurs unités, qui portent encore le nom de leurs maquis d’origine, participent à la bataille de haute Alsace. D’autres sont engagées contre les poches allemandes de l’Atlantique ou sur le front des Alpes.

A. de D.


Les chefs militaires de la Résistance


Charles Antoine Delestraint

(Biache-Saint-Waast 1879 - Dachau 1945). Saint-cyrien et fantassin devenu entre les deux guerres spécialiste des chars, dont il commande une brigade à Metz en 1936, puis un groupement sur la Somme en 1940. Mis par de Gaulle à la tête de l’Armée secrète en octobre 1942, le général Delestraint est arrêté le 9 juin 1943 et déporté au Struthof, puis à Dachau, où il est abattu le 19 avril 1945.


Aubert Frère

(Grévillers, Pas-de-Calais, 1881 - Struthof 1944). Sorti de Saint-Cyr en 1902, il sert longtemps au Maroc et est trois fois blessé entre 1914 et 1918. Commandant l’École des chars (1925-1930), Saint-Cyr (1931-1935), puis la VIIe armée sur la Somme en 1940, il est mis à la tête de la division militaire de Lyon dans l’armée d’armistice. Désigné par Giraud en novembre 1942 comme chef clandestin de l’armée, il prend la tête de l’O. R. A. Arrêté le 13 juin 1943, le général Frère est déporté au Struthof, où il meurt le 13 juin 1944.


Georges Revers

(Saint-Malo 1891 - Saint-Mandé 1974). Artilleur, officier de réserve passé dans l’active en 1918, il commande une artillerie divisionnaire en 1940. Après l’armistice, il est chef d’état-major du général Frère, sert auprès de l’amiral Darlan comme chef de cabinet au ministère de la Guerre (1941), puis comme chef d’état-major quand Darlan devient commandant en chef (avr. 1942). Passé à l’O. R. A. dès sa création, il succède à sa tête au général Verneau en octobre 1943 et la commande jusqu’à la Libération. Adjoint de De Lattre, puis chef d’état-major général de l’armée (1946), le général Revers est chargé d’une mission en Indochine en 1949 et rédige à son retour un rapport dont la divulgation entraîne sa mise à la retraite en 1950. Cette mesure est annulée par le Conseil d’État en 1962.


Jean Verneau

(Vignot, Meuse, 1890 - Buchenwald 1944). Sorti de Polytechnique dans le génie en 1914, il sert au Levant, à l’état-major de l’armée, et est en 1939 chef d’état-major des forces d’Afrique du Nord. Sous-chef, puis chef d’état-major de l’armée en 1941, il crée l’O. R. A. en décembre 1942 et la met aux ordres de Frère, à qui il succède en juin 1943. Arrêté le 23 octobre 1943, le général Verneau meurt en déportation.