Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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République (Ve) (suite)

Cependant, dès le printemps 1970, les conflits sociaux se multiplient. Les commerçants et les artisans, à l’instigation du C. I. D. - U. N. A. T. I. (Comité d’information et de défense — Union nationale des artisans et travailleurs indépendants) de Gérard Nicoud, s’estiment lésés par la fiscalité et par l’extension des grandes surfaces ; ils obtiendront finalement le vote, en 1973, de la loi Royer, garantissant leurs intérêts. Victimes de l’inflation accélérée par la crise du mark en mai 1971, par celle du dollar, dévalué le 18 décembre 1971 et le 12 février 1973, et par la hausse des matières premières, les travailleurs multiplient les grèves tant dans le secteur public nationalisé (Charbonnages, P. T. T., S. N. C. F., O. R. T. F.) que dans le secteur privé et adoptent des formes de lutte nouvelles (notamment chez Lip à Besançon, à la suite de la faillite de cette entreprise le 21 juin 1973). En réduisant le taux de la T. V. A. de 3 p. 100 le 1er janvier 1973, en lançant un emprunt d’État de 6,5 milliards de francs le 16 janvier, en proposant un nouveau plan de lutte contre l’inflation, en accord avec les autres membres de la C. E. E., en juillet, le gouvernement français tente de pallier les effets économiques de l’inflation, que relancent les hausses de prix du pétrole.

En janvier 1974, décision est prise de faire flotter le franc. Cependant, la situation de l’emploi s’aggrave et la hausse des prix correspond, dans le premier trimestre 1974, au rythme record de 13 p. 100 par an.


Les difficultés économiques

Après l’élection de Valéry Giscard d’Estaing à la présidence de la République, le gouvernement Chirac, dans lequel Jean-Pierre Fourcade est ministre de l’Économie et des Finances, met au point un programme d’austérité et d’assainissement économique, destiné à combattre l’inflation et le déficit de la balance commerciale (rationnement de l’énergie, majoration de l’impôt, lutte contre la hausse des prix, resserrement du crédit, etc.).

Cependant, au cours du dernier trimestre 1974, la crise frappe un certain nombre d’entreprises (l’automobile en particulier que le gouvernement doit aider) et les conflits sociaux se multiplient, à l’O. R. T. F. et aux P. T. T. entre autres (une grève des postiers paralyse le pays pendant plus d’un mois). Tandis que le chômage augmente fortement, est instituée une allocation supplémentaire d’attente aux salariés licenciés pour motif économique.


La politique étrangère de la Ve République

La politique étrangère du général de Gaulle, appliquée de 1958 à 1968 par le ministre des Affaires étrangères Maurice Couve de Murville, s’assigne pour but à la fois la remise en cause du système bipolaire américano-soviétique établi en 1945 à Yalta et à Potsdam, et le rétablissement du prestige extérieur de la France sur le triple plan économique (restauration du franc), militaire (création d’un armement nucléaire) et colonial (émancipation des territoires d’outremer).


Le désengagement

Dès 1958, le gouvernement prend les mesures susceptibles de restaurer le pouvoir d’achat du franc et de rembourser par étapes les dettes extérieures de la France, afin de la libérer de l’emprise américaine en matière économique et financière, et de rendre possible un premier abaissement de 10 p. 100 des droits de douane entre les Six à la date prévue du 1er janvier 1959. Pour accélérer la réalisation d’une force nationale de dissuasion, il fait éclater le 13 février 1960 la première bombe atomique française à Reggane, puis le 24 août 1968 la première bombe thermonucléaire française à Fangataufa, en Polynésie. Complétée par la multiplication et la diversification des engins vecteurs, cette politique permet au général de Gaulle d’entamer un processus de dégagement à l’égard non pas de l’Alliance atlantique, mais de l’O. T. A. N. ; ce processus trouve son terme lorsque la France se retire définitivement de cet organisme le 7 mars 1966. Parallèlement, la création de la Communauté, acceptée par tous les pays africains et malgaches de l’ancienne Union française, à l’exception de la Guinée, par le référendum du 28 septembre 1958, ainsi que la reconnaissance par le général de Gaulle, le 10 novembre 1959, du droit de ces pays à l’indépendance facilitent la signature, en 1960, des accords de transfert de compétences avec les anciennes colonies françaises ; les nouveaux États reçoivent dès lors tous les attributs de la souveraineté, deux ans avant que les accords d’Évian du 18 mars 1962 ne libèrent le régime du poids de la guerre d’Algérie* (v. Empire colonial français).


La France et le monde occidental

Dès lors, le général de Gaulle a les mains libres pour promouvoir une politique qui rende à la France son rang international en mettant un terme à la double hégémonie américano-soviétique instaurée à Yalta. Dans ce dessein, il propose, dès le 24 septembre 1958, de doter l’alliance occidentale d’un directoire franco-américano-britannique, à la constitution duquel s’oppose le président Eisenhower*. Ce refus, auquel s’associe le Premier ministre britannique Harold Macmillan, amène le chef de l’État à resserrer les liens de la France avec l’Allemagne (signature du traité de coopération franco-allemand le 22 janvier 1963). L’alliance de ces deux pays doit, en effet, être la pierre angulaire autour de laquelle le président de la République veut construire l’Europe des réalités, c’est-à-dire l’« Europe des États » ; celle-ci doit affirmer sa personnalité, face à l’U. R. S. S. et face aux États-Unis, par la mise en œuvre d’un projet de coopération politique, le plan Fouchet, qui est rejeté par le ministre belge des Affaires étrangères Paul Henri Spaak le 17 avril 1962. N’en condamnant pas moins une nouvelle fois l’Europe « intégrée », dite « supranationale », lors de sa conférence de presse du 15 mai, au prix de la démission des ministres M. R. P., le général de Gaulle rompt avec les cinq partenaires de la France en refusant, le 1er juillet 1965, d’attribuer des pouvoirs financiers à la commission exécutive unique du Marché commun, qui doit être mise en place le 1er juillet 1967, ces pouvoirs portant, selon lui, atteinte à la souveraineté des États.