Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

asepsie et antisepsie (suite)

L’asepsie ou méthode aseptique

C’est l’ensemble des mesures préventives destinées à éviter la contamination des plaies, et en particulier des plaies qui résultent d’une intervention chirurgicale.


La salle d’opération

Ses murs ne devraient présenter aucune aspérité capable de retenir la poussière. L’air devrait y être conditionné et stérilisé, l’air vicié étant renouvelé toutes les minutes par un air humide et bactériologiquement stérile, et cela en hyperpression, pour que les fuites se fassent vers l’extérieur. Ces conditions ne sont pas encore réalisées dans toutes nos salles d’opération, alors qu’elles le sont déjà dans l’industrie pharmaceutique, et les laboratoires spéciaux, où existent dès maintenant de vastes locaux « sans germes ni poussières ».

La salle d’opération fait partie du bloc opératoire, qui comprend en outre le vestiaire, les bureaux d’infirmières et de médecins, la salle d’anesthésie et de réanimation, la salle de stérilisation. Ces locaux doivent être conçus de telle sorte que celui qui y entre laisse à la porte la plus grande partie des causes d’infection qu’il porte avec lui : vêtements, bas, chaussures. Pour ce faire, le vestiaire doit précéder la salle d’opération et y être relié par un système de sas, des vêtements stériles pouvant être revêtus entre deux sas.


Le chirurgien et ses aides

Revêtus de pantalons, de blouses et de bottes stériles, le nez et la bouche protégés par un masque efficace, les cheveux recouverts d’une calotte, ils procèdent à l’aseptisation des mains et des avant-bras, brossage au savon, insistant sur les ongles, qui doivent être courts, sur les commissures des doigts. Après rinçage à l’eau stérilisée, nouveau rinçage à l’alcool. À ce moment, les opérateurs endossent une blouse stérilisée à l’autoclave, puis mettent des gants stérilisés.


La stérilisation

Elle peut être effectuée par la chaleur humide ou par la chaleur sèche. Le matériel doit être porté à une température déterminée pendant le temps nécessaire à la destruction des germes. En théorie, les microbes sporulés, qui sont les plus résistants, exigent une température de 120 °C maintenue un quart d’heure. En pratique, la chaleur ne pénètre pas toujours d’égale façon dans l’intérieur des boîtes ; il faut donc attendre une température plus forte et la maintenir plus longtemps que la théorie ne le demande.

La stérilisation par la chaleur humide se fait soit par ébullition de l’eau, procédé employé dans les pays germaniques, mais qui nécessite l’usage immédiat des instruments ainsi stérilisés, soit dans les autoclaves, appareils où circule sous pression la vapeur d’eau et dont le type est l’autoclave de Chamberland. Les premiers autoclaves étaient verticaux ; maintenant, ils sont en général horizontaux.

La stérilisation par la chaleur sèche se fait dans des étuves dites « de Poupinel », chauffées au gaz ou à l’électricité pendant trois quarts d’heure à 140-150 °C. Elle est moins sûre que la méthode précédente ; elle ne peut, en tout cas, assurer que la stérilisation des instruments : verrerie, seringues, cupules, aiguilles, qui ne craignent pas ces hautes températures.

La supériorité de l’autoclave sur tous les autres moyens de stérilisation est depuis longtemps démontrée. Si l’on y recourt pour le linge et les compresses, on préfère souvent l’étuve sèche de Poupinel pour la stérilisation des instruments. Il est cependant possible de stériliser ceux-ci à l’autoclave.

Dans les deux cas, on vérifie que la chaleur a bien atteint la partie centrale des objets par des « témoins », petits tubes de verre contenant un réactif qui change de couleur à une température connue.

« Les instruments après usage sont brossés un à un sous un jet d’eau courante. Ils sont ensuite bouillis dans l’eau de cristaux (carbonate de sodium), passés dans le savon liquide (pour préserver les articulations), enfin rangés dans les boîtes métalliques, où ils sont recouverts d’une solution boratée (eau distillée, 1 000 g ; borate de soude, 10 g). Ces boîtes sont mises à l’autoclave et chauffées à 134 °C pendant une demi-heure. » (E. Quénu.)

Les casaques, les gants, les compresses, les fils de ligature sont également stérilisés à 134 °C pendant une demi-heure à l’autoclave. Il en est de même des gants de caoutchouc, des drains, des sondes, des brosses à ongles.

L’eau avec laquelle est effectué le brossage des mains a subi une température de 134 °C pendant une heure.

Ainsi, un certain nombre de facteurs peuvent jouer dans la contamination de la plaie opératoire : depuis le contact des mains des opérateurs, des instruments, des compresses, des champs, du matériel de ligature, bien qu’ils soient en principe stériles.

L’air ambiant de la salle d’opération peut également être une cause de souillure. On a même proposé, la respiration du personnel étant assurée par un scaphandre autonome relié à l’extérieur, de réaliser une atmosphère de la salle d’opération en hyperpression constituée exclusivement par un mélange de gaz inertes et antiseptiques. On y viendra peut-être.

L’idée est naturellement venue d’aseptiser la plaie opératoire elle-même, et, pour ce faire, les liquides antiseptiques, puis les sulfamides et enfin les antibiotiques ont été préconisés à titre préventif. La question a été traitée en détail par Henri Rouvillois et Jean Van-de-Casteele dans un rapport au Congrès français de chirurgie de 1961. On y montre qu’en favorisant la sélection des souches microbiennes les plus pathogènes, l’antibiothérapie « préventive » a abouti à augmenter le nombre d’infections postopératoires. Son emploi change l’allure de l’infection postopératoire plus qu’elle ne la prévient ; il est même probable que certaines infections graves, telles des septicémies, ou septicopyémies, sont à mettre au passif de cette méthode.

La conclusion est que les antibiotiques doivent être réservés au traitement de l’infection déclarée et, en connaissance de cause, après étude du germe et de l’antibiogramme, et non pas à la prévention.

J. P.