Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
R

rein (suite)

Certaines glomérulonéphrites sont secondaires à une maladie générale. Telles sont les atteintes glomérulaires survenant au cours de l’amylose rénale (infiltration du glomérule par une substance « amyloïde »), du diabète (glomérulosclérose de Kimmelstiel-Wilson), du lupus érythémateux disséminé, de la périartérite noueuse, du purpura rhumatoïde, des microangiopathies thrombotiques. Au cours des toxémies gravidiques, un aspect particulier et réversible à type de turgescence des cellules endothéliales caractérise la glomérulose gravidique.

La pathogénie des glomérulonéphrites a fait l’objet d’innombrables travaux expérimentaux qui ont démontré que le mécanisme de l’atteinte glomérulaire était immunologique. Il s’agirait de la fixation d’anticorps circulants sur la membrane basale : soit anticorps antimembrane basale, soit complexe antigène-anticorps non spécifique. Ce dernier mécanisme semble le plus souvent en cause chez l’homme.

Lorsque la protéinurie est massive, se trouve parfois réalisé un tableau clinique et biologique particulier, le syndrome néphrotique, qui associe, outre la protéinurie, des œdèmes, une hypoprotidémie (responsable des œdèmes), une hyperlipidémie. Il ne s’agit que d’un syndrome relevant d’étiologies très diverses (primitif ou secondaire à une amylose, à un diabète, à un lupus, à une thrombose des veines rénales, à une intoxication...). Dans le syndrome néphrotique primitif lui-même, les lésions histologiques sont variables, souvent très minimes chez l’enfant (ancienne néphrose lipoïdique), plus importantes chez l’adulte. Le traitement s’appuie, selon les cas, sur la corticothérapie, les anti-inflammatoires et les diurétiques.

• Les tubulopathies chroniques forment un groupe complexe d’affections rares, mais très intéressantes sur le plan physiopathologique. En effet, se traduisant par la faillite des diverses fonctions tubulaires, elles éclairent la physiologie rénale. La plupart d’entre elles sont héréditaires.

Certaines témoignent de la perte du pouvoir de concentration du rein, tel le diabète insipide pitressino-résistant, qui entraîne chez le nourrisson des accidents de déshydratation.

D’autres se traduisent par une anomalie des transferts tubulaires :
— transfert du glucose (diabète rénal, glycosurie avec glycémie normale) ;
— perte anormale de sel (pseudohypoadrénocorticisme congénital) ;
— fuite de potassium (hypokaliémie chronique familiale) ;
— faillite de la réabsorption de certains acides aminés (aminoacidurie), comme la cystinurie, la glycinurie et la xanthinurie ;
— perte de calcium (hypercalciurie idiopathique).

Le trouble tubulaire peut porter sur l’élimination des ions H+, réalisant une acidose tubulaire chronique idiopathique, ou syndrome de Butler Albright.

Dans certains cas, la tubulopathie est secondaire à une intoxication ou à un trouble inné du métabolisme ; tel est le cas de la cystinose.

• Les tubulopathies aiguës (appelées également néphropathies tubulo-interstitielles aiguës) ont pour traduction clinique principale une anurie (absence de diurèse) ou une oligurie extrême. Cette anurie va, évidemment, entraîner une azotémie rapidement croissante, une tendance à l’acidose par rétention d’ions H+ (tamponnés par les bicarbonates sanguins, dont le taux s’effondre), une élévation du taux sérique des phosphates, des sulfates, des acides organiques, du potassium, du magnésium... L’évolution spontanée, si la diurèse ne reprend pas rapidement, est mortelle.

Or, il est remarquable que l’anurie a une durée limitée : en moyenne de 10 à 15 jours. Après ce délai, la diurèse reprend spontanément, et l’évolution se fait vers la guérison sans séquelle en général. Le but du traitement sera donc de maintenir en survie les malades pendant la période anurique. Il sera atteint grâce aux méthodes d’épuration extrarénale, qui suppléent aux fonctions rénales abolies (dialyse péritonéale et hémodialyse).

Les étiologies des tubulopathies aiguës sont très variées, mais peuvent se classer en deux grandes catégories : d’une part les intoxications (la plus fréquente étant celle par le tétrachlorure de carbone, puis viennent les sels de mercure, le trichloréthylène, les opacifiants biliaires, l’oxyde de carbone...) et d’autre part les états de chocs. Parmi ces derniers, les plus fréquemment rencontrés à l’origine d’une tubulopathie sont ceux qui accompagnent les traumatismes, les brûlures, les septicémies post-abortum (à perfringens), les pancréatites et certains accidents postopératoires. On rattache actuellement l’arrêt de la diurèse à une modification de la circulation intrarénale : une ischémie corticale intense entraîne une chute de la filtration glomérulaire. Au cours de certaines étiologies s’y ajoute probablement un facteur supplémentaire : une coagulation intravasculaire aboutissant à des thromboses fibrineuses au niveau des glomérules.

La prévention de l’anurie a fait des progrès considérables, fondés sur une lutte plus efficace contre le choc, sur l’utilisation de solutés à charge osmotique élevée (mannitol) et surtout sur l’emploi de certains diurétiques modifiant probablement la circulation intrarénale, tel le furosémide.

• Les néphropathies interstitielles sont certainement les plus fréquentes de toutes les néphropathies (plus de 30 p. 100 de la totalité). Dans leurs formes aiguës, elles relèvent essentiellement d’un processus microbien et réalisent le tableau de la pyélonéphrite aiguë. Cette infection du rein et du bassinet, avec pyurie (pus dans les urines), fièvre et frissons, évolue le plus souvent favorablement grâce à l’antibiothérapie. Ces pyélonéphrites compliquent parfois une anomalie des voies excrétrices, qu’il faudra rechercher par la radiologie, la grossesse étant également un facteur favorisant. Plus rarement, les néphropathies interstitielles aiguës ont une origine toxique, médicamenteuse en particulier.

Dans les néphropathies interstitielles chroniques, le tableau clinique est souvent plus larvé, et la maladie évolue lentement. L’hypertension artérielle est inconstante, et les œdèmes sont toujours absents. Les reins sont de taille réduite, bosselés ; le sédiment est riche, contenant des leucocytes, des germes ; l’insuffisance rénale est tardive et peu évolutive. Trois étiologies se partagent l’origine des néphropathies interstitielles chroniques : 1o tout d’abord l’infection urinaire et rénale persistante, à l’origine des pyélonéphrites chroniques, le diabète étant un facteur favorisant ; 2o l’abus des analgésiques, l’usage immodéré des médicaments, comme l’acide acétylsalicylique et la phénacétine (souvent survient une complication redoutable, la nécrose papillaire, et il est probable que la liste des substances susceptibles d’entraîner une néphrite interstitielle n’est pas close) ; 3o les causes métaboliques, comme la goutte, l’hypercalcémie (avec précipitation de cristaux dans le tissu interstitiel). Bien souvent, la néphropathie apparaît primitive.