Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Artois (suite)

Le style gothique a été particulièrement fécond en Artois ; il manque toutefois des jalons essentiels : la cathédrale de Thérouanne, détruite avec toute la ville en 1553 par ordre de Charles Quint, et surtout la cathédrale d’Arras*. Le plus important édifice conservé est Notre-Dame de Saint-Omer, au chœur et au transept du xiiie s., à la nef des xive et xve s., qui abrite plusieurs tombeaux et dalles funéraires intéressants ; sa tour romane fut rhabillée, de 1473 à 1521, dans un style proche de celui de la tour de Saint-Bertin. Celle-ci, avant de s’écrouler en 1947, était le dernier reste de la célèbre abbaye du viie s., qui fut à l’origine de la ville de Saint-Omer et avait été reconstruite à l’époque gothique ; c’est de son trésor que provient le pied de croix dit « de saint Bertin », célèbre ouvrage mosan de la fin du xiie s. conservé au musée de la ville.

L’Artois est resté longtemps fidèle à l’art gothique, comme en témoignent la collégiale Saint-Pierre à Aire-sur-la Lys, commencée en 1492 et terminée seulement au milieu du xviiie s., et l’église Saint-Martin à Auxi-le-Château, aux voûtes d’une grande richesse (début du xvie s.). Certaines églises illustrent le type de l’église-halle, à trois nefs égales en hauteur comme en largeur.

Les édifices civils conservés sont encore plus rares que les églises. Parmi les châteaux, celui d’Olhain a de bonnes parties du xve s. ; les autres ont subi des remaniements, ou il n’en subsiste plus rien, comme c’est le cas pour les « merveilles » et « surprises » du parc et du château de plaisance de Hesdin (fin xiiie - début xve s.). Typiques de la région et témoignant de ses liens étroits avec les Flandres sont les hôtels de ville et leurs beffrois, mais ils ont particulièrement souffert dans les récents conflits : l’ensemble d’Arras a été reconstruit après la Première Guerre mondiale ; le beffroi de Béthune, qui remonte à 1388 pour la partie basse et 1437 pour l’étage défensif, a également été très restauré. Au xvie s. apparaît une caractéristique de l’architecture civile artésienne, l’association de la brique et de la pierre. Le charmant bailliage ou « corps de garde » d’Aire-sur-la-Lys en donne un exemple à la fin du siècle.

Quelques beaux ensembles classiques du xviiie s. sont à signaler, l’hôtel de ville d’Aire-sur-la-Lys et surtout un certain nombre d’édifices religieux : ruines de l’église augustine de Mont-Saint-Éloi, bâtiments de l’abbaye cistercienne de Cercamp, abbaye bénédictine de Saint-Vaast à Arras.

Les maisons anciennes sont rares, décimées par les guerres successives : les meilleurs exemples se trouvent à Béthune, Aire-sur-la-Lys et surtout Arras.

M. E.

➙ Arras / Flandre / Nord (région du) / Pas-de-Calais (département du).

 A. Mabille de Poncheville, Histoire d’Artois (Boivin, 1935). / J. Dhondt, les Origines de la Flandre et de l’Artois (Impr. Nicolas, Arras, 1944). / Commission des Monuments historiques du Pas-de-Calais, Histoire des territoires ayant formé le département du Pas-de-Calais (Brunet, Arras, 1949). / J. Lestocquoy, Histoire de la Flandre et de l’Artois (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1949 ; 2e éd., 1966) ; la Vie religieuse d’une province : le diocèse d’Arras (Brunet, Arras, 1949). / A. Perpillou, L Machu, P. Maurois, A. Mabille de Poncheville et L. Bocquet, Visages de la Flandre et de l’Artois (Horizons de France, 1949). / P. Héliot, les Églises du Moyen Âge dans le Pas-de-Calais (Impr. centrale de l’Artois, Arras, 1954). / P. Pierrard, Flandre, Artois, Picardie (Arthaud, 1970). / L. Trénard, Histoire des Pays-Bas français (Privat, Toulouse, 1972-1974 ; 2 vol.).

Asam (les frères)

Artistes allemands : Cosmas Damian, peintre et architecte (Benediktbeuern 1686 - Munich 1739) ; Egid Quirin, sculpteur et stucateur (Tegernsee 1692 - Mannheim 1750).


Les deux frères, originaires de la Bavière méridionale, avaient pour père un peintre fresquiste, Hans Georg (1649-1711), qui les forma au métier. En 1712-13, on les trouve l’un et l’autre à Rome. Cosmas Damian y est l’élève de l’un des Ghezzi, mais il se forme sans doute lui-même au contact des œuvres d’Andrea Pozzo (voûte illusionniste de l’église Sant’Ignazio) et peut-être de Rubens. Il remporte en 1713 un prix de l’académie de Saint-Luc et retourne en Bavière à l’automne de la même année. Egid Quirin, revenu à son tour d’Italie, travaille jusqu’en 1716 chez le sculpteur stucateur Andreas II Faistenberger (1647-1736).

La première des commandes capitales qu’obtient Cosmas Damian est la décoration à fresque de la vaste église de l’abbaye bénédictine de Weingarten. Le marché est passé en 1718. Le résultat sera admirable tant pour les plafonds des travées de la nef que pour la coupole du chœur, dont les architectures feintes culminent vers l’ouverture circulaire, également feinte, d’où semblent descendre les nuages et les anges. Des effets analogues sont obtenus à l’église Sankt Jakob d’Innsbruck (1722-23) et à Einsiedeln (1724-1726) en Suisse. À Freising, il s’agissait de la « baroquisation » de la cathédrale, et les deux frères y ont procédé avec un sens merveilleux de l’illusion. À l’abbaye bénédictine de Weltenburg (sur le Danube), où, par exception, Cosmas Damian est qualifié d’« architecte » par les documents, le plafond de l’église a été conçu tout différemment de ceux de Weingarten. Ici, point d’architectures feintes : une peinture d’un seul tenant, formant un ovale bordé par une forte moulure. Derrière l’autel principal, dans une niche éclairée par la lumière naturelle, entre des colonnes torses, chevauche, en un savant contre-jour, un saint Georges en armure d’Egid Quirin (v. 1721). Dans l’église de l’ancienne abbaye de Rohr, une œuvre non moins théâtrale est le maître-autel du même artiste, constitué par le tombeau vide de la Vierge qu’entourent avec émerveillement les Apôtres, tandis que Marie plane au-dessus avec le groupe des anges qui l’emportent... Une autre église, familière et merveilleuse, où les deux frères ont collaboré, est celle d’Osterhofen (v. 1731-1733).