Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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régate (suite)

Le bateau de compétition

L’intérêt principal de la régate réside dans l’extrême complexité des éléments qui interviennent pour parvenir à aller plus vite que ses concurrents et pour adopter une tactique plus rationnelle, afin de franchir en vainqueur la ligne d’arrivée. Le choix de la série à laquelle on décide de se consacrer pour une période donnée est une question de tempérament : on peut préférer la course en solitaire, seul à bord, ou la course en équipe. Il s’agit également d’une question de moyens financiers (plus les bateaux sont importants, plus leur prix est élevé) et de qualités athlétiques, la course en solitaire nécessitant un effort physique plus grand que la course en équipe.

Le bateau étant acquis, il convient de le mettre au point. C’est un travail délicat, qui requiert le sens marin, les connaissances de la compétition, le goût du bricolage et l’habileté manuelle.

• Coque. La construction en matière plastique, qui se généralise de plus en plus, supprime le problème des peintures qui, au moment de l’armement et tout au cours de l’existence d’un bateau, était autrefois pour les yachtsmen un sujet constant de préoccupation. Une coque en plastique ne peut être poncée fortement sans perdre sa surface extérieure, dite « gel-coat », qui tient lieu de peinture. Tout au plus peut-on appliquer des produits qui maintiennent le parfait état d’entretien des œuvres vives. Il existe cependant des séries, tel le « Flying Dutchmann », qui sont encore surtout fabriquées en bois. La coque doit être soigneusement poncée, ainsi que quille ou dérive et gouvernail qui, même lorsque la coque est en plastique, sont généralement en bois.

La coque doit être aussi légère que possible. Chaque règlement de série prévoit un poids minimal au-dessous duquel il n’est pas permis de descendre. Lorsque la coque est en bois, un patient travail de ponçage permet d’en réduire le poids, de l’amener au minimum ou de l’en rapprocher. La répartition du poids est de même importance que le poids lui-même : il est particulièrement nuisible à l’avant et à l’arrière, ainsi que dans les parties hautes. Un poids excessif à l’avant empêche la coque de se lever à la lame et de planer aux allures portantes.

L’accastillage constitue la partie primordiale de l’équipement et du réglage d’une unité neuve ou de l’amélioration d’une embarcation qui a déjà servi. Les constructeurs livrent de plus en plus des bateaux équipés pour la compétition, mais les champions ont leurs habitudes, pour ne pas dire leurs manies, et ils ont à cœur de fixer à la place de leur choix les tackets, poulies, winchs, commandes diverses qu’ils sont habitués à utiliser. Ces pièces d’accastillage permettent de manœuvrer le bateau et de modifier son réglage avant la compétition, mais également pendant le cours même de celle-ci, si les conditions de mer et de vent viennent à se modifier. Par exemple, dans un dériveur, on peut agir sur le plan de dérive en abaissant ou en relevant la dérive selon les allures. Au plus près, on navigue dérive basse, au vent arrière dérive relevée ; au largue, la dérive est placée dans une position intermédiaire.

• Voilure. En tant qu’agent moteur du bateau, la voilure doit faire l’objet du principal effort de réglage, tant avant que pendant la régate. En coupe horizontale, une voile présente un profil qui n’est pas sans parenté avec celui d’une aile de planeur. En coupant les laises qui, cousues les unes à côté des autres, composent la voile, le voilier détermine le creux de celle-ci, c’est-à-dire la courbe, s’étendant du mât à la chute. La flèche maximale doit se trouver à peu près au tiers avant. Par son souffle, le vent gonfle la voile et lui permet de prendre la forme prévue lors de sa fabrication. Entrent alors en action une série de forces qui font avancer le bateau.

Par vent faible, il faut utiliser des voiles aussi creuses que possible, car elles impriment à l’embarcation la plus grande vitesse. Par vent fort, il convient d’établir des voiles plates parce que, faisant moins gîter la coque, elles permettent d’obtenir les meilleurs résultats. En effet, la gîte elle-même est un facteur de ralentissement : les coques des bateaux de course sont dessinées pour atteindre leur maximum de vitesse quand elles sont droites. D’autre part, dès lors qu’une voile plus creuse fait gîter anormalement, il faut la filer, ce qui ralentit la marche et fatigue l’équipage, qui doit border de nouveau. Le moyen le plus simple pour creuser ou aplatir une grand-voile consiste à modifier la tension selon laquelle elle est établie sur le mât et sur la bôme. Par vent léger, il ne faut pas étarquer la drisse, mais placer la voile un peu à l’intérieur de ses marques : elle conserve ainsi l’intégralité de son creux. Par vent fort, il est recommandé de hisser la voile à bloc : la tension exercée par la drisse et par l’étarquage sur la bôme l’aplatit. On remplace également les lattes souples du petit temps par des lattes épaisses et rigides. Un autre procédé utilisé pour aplatir la grand-voile consiste à faire plier le mât et la bôme, la courbe qu’ils prennent tendant le tissu et réduisant le creux. Dans certaines séries, le « Finn » par exemple, le mât n’est pas haubané : il plie sous l’effet du vent dans la voile, laquelle s’aplatit ainsi automatiquement. Dans d’autres séries, comme le « Soling », on agit sur certaines parties du gréement, étai et pataras, pour courber artificiellement la mâture. L’hypothèse d’un choix prémédité entre voilure creuse ou plate n’est pas toujours réalisable. Le temps change souvent en cours de régate et il faut alors tenter de modifier la forme de la voile en fonction des nouvelles conditions de vent. Un bateau de régate doit disposer de manœuvres qui permettent d’obtenir ce résultat.

Le bateau étant convenablement accastillé et muni d’une voilure aussi bien coupée et établie qu’il est possible, il faut procéder à un réglage tel qu’il ne soit ni mou ni ardent. Un bateau mou tend à abattre et à passer de lui-même aux allures portantes lorsqu’on lâche la barre. Un bateau ardent tend au contraire, la barre étant libre, à lofer, c’est-à-dire à venir debout au vent. Pour trouver l’équilibre favorable, il faut placer le plan de voilure en bonne position par rapport au plan de dérive. Lorsque le bateau porte trop de toile à l’avant, il est mou, lorsqu’il en porte trop à l’arrière, il est ardent. Une action sur le gouvernail permet de maintenir le cap, au détriment toutefois de la vitesse, l’angle du gouvernail par rapport au plan de dérive faisant l’effet d’un véritable frein. On rend un sloop ou un cotre mou ou ardent en agissant sur la surface du foc et de la trinquette, ou sur la place de leurs points d’amure. On peut également avancer ou reculer le mât, ou en changer la quête. Sur un cat-boat, qui ne comporte qu’une seule grand-voile, seule une action sur le mât est possible. Il faut d’autre part noter que tout voilier, au fur et à mesure que le vent fraîchit, a tendance à devenir plus ardent. Un bateau bien équipé doit donc offrir la possibilité de modifier le réglage du plan de voilure au cours de la régate.