Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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recensement de la population

Opération statistique visant à connaître l’état de la population, c’est-à-dire son effectif et sa répartition selon diverses caractéristiques des individus qui la composent.



Historique

La pratique des dénombrements de population est très ancienne. Elle a d’abord répondu à des préoccupations d’ordre fiscal ou militaire ; on en trouve de nombreuses traces dans l’Antiquité, et c’est ainsi qu’à laide des documents qui nous sont parvenus on peut suivre avec une relative précision l’évolution de la population chinoise depuis les débuts de l’ère chrétienne.

Toutefois, ce n’est que beaucoup plus récemment que les recensements ont été conçus comme des moyens de connaissance générale de la population d’un pays et qu’ils ont été conduits selon des méthodes ayant quelque parenté avec les procédés modernes. Si l’on excepte le recensement de l’Islande en 1703 et celui de la Suède en 1749 (recensement nominatif d’après les registres des paroisses), il faut attendre la fin du xviiie s. pour voir se généraliser ces opérations, qui, de plus, deviendront une pratique régulière aux États-Unis à partir de 1790, en France et en Angleterre à partir de 1801, en Prusse à partir de 1810, en Autriche-Hongrie à partir de 1818, etc.

Jusqu’à une date récente, les recensements avaient, en France, la périodicité quinquennale et étaient exécutés durant les millésimes se terminant par 1 et par 6. Ils ont été marqués, tout au cours du xixe s., de progrès décisifs : ainsi l’utilisation des listes nominatives en 1836, l’introduction de la feuille de ménage en 1856, celle du bulletin individuel en 1876. En 1881, on introduit la distinction entre population légale ou de résidence habituelle et population présente, et le principe du recensement à jour fixe est adopté. Parallèlement, les renseignements recueillis se font de plus en plus nombreux : depuis 1851, on connaît la population par sexe, âge et état matrimonial.


Une immense entreprise

Un recensement général de la population est une énorme entreprise et suppose une préparation très minutieuse ; en France, quelque 100 000 agents recenseurs doivent, en un temps limité, collecter dans leurs secteurs respectifs des renseignements précis sur l’état de la population à une date donnée. Dans la plupart des pays, on s’oriente, selon les recommandations des Nations unies, vers la pratique des recensements décennaux, effectués dans les années de millésime multiple de 10. Depuis 1946, en France, aucun principe n’a encore prévalu, et des recensements ont eu lieu en 1954, en 1962, en 1968 et en 1975.

En France, actuellement, un recensement vise deux objectifs principaux :
a) définir la population légale des diverses circonscriptions administratives du pays : commune, canton, arrondissement, département (la population légale, authentifiée par décret, sert à l’application de maints textes législatifs et réglementaires concernant taxes et subventions*, élections*, loyers, rémunération du personnel communal) ;
b) fournir les statistiques de hase, en matière démographique et économique, concernant la population française : population selon le sexe, l’âge, la situation de famille*, la nationalité*, le niveau d’instruction, la profession, la branche d’activité, la qualification, la répartition en ménages... (de ce point de vue, avec la pratique de la planification* économique, les recensements ont pris un intérêt accru).


Les modalités d’un recensement

L’exécution correcte d’un recensement suppose le choix d’une date précise pour la définition de la population. Faute de pouvoir réaliser sur l’ensemble du territoire le dénombrement à jour fixe (dans certains pays, on s’est efforcé d’y parvenir, au besoin en consignant à domicile l’ensemble de la population), on donne des instructions aux agents recenseurs pour reconstituer, lors de leur enquête, ce qu’était la situation de la population à la date choisie. C’est ainsi qu’en France, en 1968, la date de référence choisie a été le 1er mars, alors que le travail des agents recenseurs s’est échelonné du 1er au 23 mars ; dans ces conditions, les personnes décédées postérieurement au 1er mars ont été incluses dans la population recensée, alors qu’en ont été éliminés les enfants nés après ce 1er mars.

Tout recensement distingue pour chaque commune entre la population de résidence habituelle (population de jure) et la population de fait (population de facto), cette dernière correspondant aux personnes se trouvant dans la circonscription au moment du recensement, sans que toutes y aient nécessairement leur domicile habituel.

Longtemps confondue avec la population de résidence habituelle, la population légale, en France, est désormais définie de façon un peu plus complexe. On considère en effet actuellement dans chaque commune la population municipale (population y ayant sa résidence principale et la population comptée à part (militaires du contingent, internes des établissements d’enseignement, personnes en établissement de soins, détenus...), celle dernière disposant le plus souvent d’une résidence principale dans une autre commune. Pour tenir compte équitablement des charges de chaque commune liées à l’effectif de la population, depuis 1962 on définit la population légale comme somme de la population municipale et de la population de résidence habituelle ; il en résulte des doubles comptes, que l’on s’efforce d’éliminer lors de la comptabilisation générale de la population du pays.

Les renseignements recueillis lors d’un recensement le sont à l’aide de bulletins variés, dont les principaux sont :
— le bulletin individuel, donnant des renseignements personnels sur les recensés (nom, sexe, âge, état matrimonial, nationalité, lieu de domicile*, niveau d’instruction, activité professionnelle) ;
— la feuille de logement, fournissant des précisions sur la composition de celui-ci (nombre de pièces, équipement...) et du ménage qui l’occupe ;
— le bordereau de maison, qui récapitule les ménages occupant cette maison et fournit les caractéristiques de celle-ci (type d’immeuble, ancienneté et caractéristiques de la construction, degré de confort).

Enfin, assez souvent et maintenant de manière facultative en France, on dresse la liste nominative des habitants de chaque commune.