Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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réanimation (suite)

Les voies d’abord

Lorsque la voie orale est interdite par l’état du patient, ce qui est le plus souvent le cas, la voie d’apport est la voie veineuse. Celle-ci est utilisable dans toute son étendue : on peu être amené à injecter les liquides nourriciers dans les très grosses veines de la base du cœur ou même dans la partie droite du cœur. (La voie rectale, qui a été très employée au cours des siècles passés, est illusoire, sauf en ce qui concerne l’absorption de l’eau.)

Suivant la rapidité avec laquelle on s’efforce de rétablir le volume et la qualité du sang, on a recours soit à des aiguilles de divers calibres, soit à des cathéters plastiques capables de parcourir une longueur déterminée du vaisseau, quelquefois impressionnante. Cette voie d’abord, avec des variantes plus rares, telles que la ponction sternale ou tibiale, est naturellement utilisée pour l’introduction complémentaire des médicaments éventuellement indiqués. Elle peut être employée pendant des jours, des mois et même des années en cas de besoin. En général, elle est aussi vite que possible remplacée par la voie naturelle.


L’assistance ou « prothèse » respiratoire

Non seulement elle est essentielle lorsque le patient est incapable d’assurer sa propre ventilation et sa propre hématose, mais elle a vu ses moyens instrumentaux progresser au point qu’elle peut être mise à profil dans toutes les circonstances des accidents les plus graves. Elle existe sous deux formes opposées en apparence, mais aux buts identiques. Les poumons d’acier et les cuirasses dans lesquels les patients sont placés aident ceux-ci à aspirer l’air atmosphérique. Les respirateurs mécaniques insufflent dans la trachée de l’air ou de l’air enrichi d’oxygène, imitant ainsi l’inspiration. Le résultat cherché est la ventilation correcte des alvéoles pulmonaires, collabés ou envahis et exclus temporairement du point de vue de leur fonction. La voie d’entrée de l’air dans le poumon peut rester la voie naturelle, nez et bouche, ou bien devenir plus « courte » fonctionnellement, et surtout plus sûre sous la forme de la trachéotomie on de l’intubation oro- ou naso-trachéale.


La réanimation cardiaque

Devenue, elle aussi, utilisable on toutes circonstances (par exemple sur le lieu d’un accident ou dans l’ambulance de réanimation polyvalente), elle a recours, immédiatement après que la question de l’hématose a été réglée, à des appareils maintenant miniaturisés, capables de restaurer un rythme myocardique efficace ou de défibriller un cœur affolé, ou d’accélérer une fréquence insupportablement basse, cependant que la voie d’abord veineuse servira à la correction chimique des divers troubles du métabolisme, de la conduction nerveuse intracardiaque, de l’envahissement du myocarde par des produits de déchets nocifs, aidée en cela par les diurétiques et la réhydratation supplétive.

La réanimation sur les lieux de l’accident et pendant le transport des patients

L’idée de procéder au ramassage et au transport des blessés, sous surveillance (presque) médicale, est d’abord venue à l’esprit de Dominique Larrey, chirurgien des armées de Napoléon Ier. La rudimentaire « ambulance » de 1812 a évolué au cours de chacun des conflits ultérieurs, puis son emploi s’est généralisé dans le civil. Actuellement, les ambulances de réanimation, dont plusieurs organismes sont dotés (brigade de sapeurs-pompiers, sociétés de secourisme, Croix-Rouge et similaires, et surtout les services d’assistance médicale d’urgence [S. A. M. U.]), sont de véritables petites salles d’opérations, équipées en vue de porter un secours efficace à des blessés, à des malades, dont le sort était jusqu’ici lié à la rapidité de leur admission dans un service compétent, c’est-à-dire à la proximité de l’établissement de soins et à la promptitude des agents chargés de la réception des victimes. Non seulement le brancardage a fait d’énormes progrès, non seulement les conditions de température, d’aération, de suspension ont été considérablement améliorées, mais le médecin dispose d’une source d’oxygène sous pression et d’un moyen pratique d’aspiration, comme de toutes les drogues et tous les solutés ou sangs indispensables au soutien des organismes affectés. Les voitures les plus modernes sont, en outre, reliées par télétransmission sans fil à l’hôpital mère de façon à pouvoir prévenir celui-ci ou à demander l’aide de ses spécialistes, à distance. Une bande de longueurs d’onde réservée permet de surmonter la plupart des obstacles habituellement rencontrés pendant les transmissions par ondes hertziennes.


La réanimation du nouveau-né

Très spécialisée, en raison des particularités de l’organisme du nouveau-né, surtout quand il est « prématuré », cette réanimation est pratiquée la plupart du temps dans les services d’accouchement ; elle est parfois indispensable en dehors de l’hôpital, par exemple pendant le transport d’une maternité vers un service de chirurgie d’urgence. Les principes de bases demeurent, mais l’application demande une instrumentation proportionnée aux dimensions du patient et un personnel spécialement entraîné, connaissant la pathologie pulmonaire, cardiaque et neurologique propre au très petit enfant.


L’hémorragie et la transfusion sanguine

La spoliation excessive de sang peut aboutir à la mort et est toujours la cause d’un état pathologique lent à guérir, bien que la moelle osseuse se mette à former des globules rouges de remplacement dès que l’hémorragie se produit (à condition de disposer d’une certaine réserve de protides et de fer). Sauf circonstances très spéciales, il n’est plus de mise d’espérer de la seule action de la nature l’arrêt de l’hémorragie ou la reconstitution de la masse et de la qualité sanguines. Les perfusions rétablissent le volume de sang circulant, mais seule la transfusion peut restaurer les propriétés nutritives et de transport d’oxygène, qui n’appartiennent qu’au plasma et aux globules rouges, blancs, etc. Le sang total est très employé et il est devenu disponible en assez grandes quantités depuis que l’organisation des centres et des banques a été mise au point. Le fait que le sang peut être conservé à la température de 4 °C à 8 °C, en flacons spécialement préparés ce qui est possible aujourd’hui dans tous les pays du monde, a rendu possibles le stockage et le transport du précieux liquide. Mais il est des cas où seule une partie du sang est nécessaire, et il en est d’autres où une partie du sang est indésirable. Aussi existe-t-il dans tous les centres modernes des réserves de globules rouges déplasmatisés ou, au contraire, de plasma sans globules rouges. Le fractionnement peut être poussé plus loin, et il est possible de prescrire telle ou telle fraction séparément ou d’injecter surtout des globules blancs ou surtout des plaquettes.