Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
R

radiocristallographie (suite)

Une face cristalline (plusieurs millimètres) servant de plan réflecteur, est réglée sur l’axe du goniomètre (fig. 6). On a d’abord choisi une lame de clivage de chlorure de sodium. La maille cubique, d’arête a, de volume a3, contient 4 atomes Cl et 4 atomes Na ; en désignant par D la masse spécifique

(N étant le nombre d’Avogadro, ACl et ANa les masses atomiques), on calcule a et l’intervalle des plans réticulaires parallèles au clivage. On a ainsi analysé dès 1912 le rayonnement sortant d’un tube à rayons X. Le Suédois Manne Siegbahn (né en 1886) a décrit avec une grande précision les spectres de raies de la plupart des éléments chimiques. Comme le cristal NaCl est trop imparfait pour donner d’une fente fine F une image aussi fine en P, il a pris comme repère de longueur l’intervalle des plans réticulaires parallèles au clivage de la calcite CaCO3 et, en utilisant les masses atomiques de Ca, de C et de O, la densité et le nombre d’Avogadro, il a défini une unité X conventionnelle (uX) par la relation d = 3 029,04 uX à 18 °C.

Les longueurs d’onde, exprimées en uX des spectroscopistes, ont une valeur relative. On a, depuis, mesuré ces longueurs d’onde, mais avec une précision moindre, avec un réseau gravé sur verre ; et entre les longueurs exprimées en angströms et en unités kX (1 kX = 1 000 uX) existe la relation
l (Å) = l (kX) × 1,002 03.

La spectrographie X est surtout utilisée actuellement dans un but d’analyse chimique et sous deux aspects. Dans la spectrographie par émission, l’échantillon à analyser est disposé sur l’anticathode du tube à rayon X, au point d’impact des électrons. La plupart des éléments chimiques découverts depuis 1912 ont été ainsi identifiés par application de la loi de Moseley.

Dans l’analyse chimique par fluorescence X, très utilisée dans les laboratoires de recherche et dans l’industrie, la substance est placée près de la fenêtre de sortie des rayons X. L’absorption photoélectrique est accompagnée d’un rayonnement de fluorescence caractéristique des éléments chimiques.


Analyse cristalline par la méthode du cristal tournant

Le repère de longueur est ici la longueur d’onde du rayonnement monochromatique provenant d’une anticathode convenablement choisie. Le cristal, de quelques dixièmes de millimètre, baigne dans le faisceau X, délimité par un collimateur cylindrique, avec une ouverture angulaire de l’ordre du degré. Dans le montage le plus classique, il est disposé au centre d’une chambre cylindrique et oscille, dans un domaine angulaire déterminé, autour de l’axe du cylindre (fig. 7). Appliquée sur le cylindre, une pellicule photographique recueille tous les faisceaux successivement diffractés au cours de la rotation du cristal.

Les clichés se simplifient si le cristal est réglé de telle sorte qu’une rangée cristalline (par exemple une arête du cristal) soit parallèle à l’axe de rotation. Si l’on a choisi la rangée [100], de période , la condition de Laue relative à cette rangée s’écrit (fig. 8)

(h entier avec h < a/λ).

Les faisceaux diffractés sont des arêtes de cônes de révolution, dont l’axe est l’axe du cylindre, dont les traces sur le cylindre sont des cercles, de sorte que le cliché montre des taches de diffraction réparties sur des strates parallèles. Pour h = 0, α = π/2, c’est la strate équatoriale ; la distance, sur le cliché, de la strate h à la strate équatoriale est Zh = R cotg αh, (R étant le rayon de la chambre) [fig. 9].

Chacune des valeurs mesurées de Z fournit l’angle α et, d’après (11), la valeur de a. L’interprétation des clichés de cristal tournant consiste dans la détermination des indices hkl de chacune des taches de diffraction, ce que l’on réalise aisément avec la construction d’Ewald, et aussi du noircissement photographique, proportionnel au carré du module du facteur de structure.

Différents dispositifs facilitent le dépouillement des clichés. Chacune des strates correspond à un plan réticulaire de l’espace réciproque. En disposant convenablement des diaphragmes métalliques, on peut isoler successivement chacun de ces plans, ce qui conduit à la chambre de Weissenberg ou à la chambre de précession, ou au rétigraphe. Mais, de plus en plus, comme les cristaux de structure plus compliquée fournissent des centaines, voire des milliers de faisceaux diffractés, les laboratoires utilisent des diffractomètres automatiques, qui enregistrent à la fois les notations des réflexions et les intensités mesurées à l’aide d’un compteur.


Méthode de Laue

C’est historiquement la première méthode de la diffraction cristalline des rayons X, réalisée à Munich en 1912 par Friedrich Walther (né en 1883) et Paul Knipping (1883-1935). Le cristal, immobile, est placé devant un pinceau linéaire polychromatique. On utilise donc le fond continu de l’anticathode, qui débute brusquement, du côté des courtes longueurs d’onde, par un rayonnement de longueur d’onde λ0 (Å) = 12 400/V (volts). Comme le rendement en rayons X croît avec le nombre atomique de l’anticathode, on utilise un métal lourd comme le tungstène et l’on applique au tube un voltage élevé pour disposer d’un faisceau intense et d’une gamme élevée de longueurs d’onde. Le cristal, convenablement orienté, est appliqué à la sortie d’un collimateur cylindrique, et l’on recueille les rayons diffractés sur une plaque photographique dont la distance D à la face d’entrée du cristal est déterminée avec précision. Une famille de plans réticulaires, d’intervalle d, inclinés suivant l’angle θ sur le faisceau incident, réfléchit, comme le ferait un miroir, les fractions du rayonnement incident, dont les longueurs d’onde satisfont à
 = 2d sin θ.

En T (fig. 10) sont confondues les réflexions des différents ordres correspondant aux longueurs d’onde λ1 pour n = 1, pour n = 2, pour n = 3, ... ; encore faut-il que λ soit supérieur à λ0, c’est-à-dire que le voltage soit suffisamment élevé. Il apparaît aussitôt que les informations sont celles d’un goniomètre optique, avec l’avantage de pouvoir utiliser un solide sans formes cristallines extérieures. On peut obtenir la projection, sur un plan parallèle à la plaque photographique, des traces N des normales aux différentes familles de plans réticulaires ; il suffit de prolonger la droite TO′ (O′ trace du faisceau direct) jusqu’au point N, tel que O′N = D cotg θ avec O′T = D tg 2θ. Il est facile de montrer qu’aux plans, dits en zone, ayant en commun une même arête il correspond des taches de diffraction réparties sur des ellipses passant par O′.

Si le faisceau incident est confondu avec un axe de symétrie du cristal, cette symétrie se manifeste sur les clichés. La méthode de Laue est surtout utilisée dans l’industrie pour tailler dans un cristal des lames d’une orientation bien déterminée.