Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
Q

Quaternaire

Dernière ère géologique.



Caractères originaux

Le regroupement de l’ensemble des formations géologiques postérieures au Tertiaire a été proposé pour la première fois en 1829 pour parachever la stratigraphie du Bassin parisien. La limite du Tertiaire et du Quaternaire est restée longtemps controversée ; il est admis depuis 1948 que le Villafranchien constitue l’étage de base du Quaternaire. L’apparition des Hominidés (v. Hominiens) et la succession rapide de périodes climatiques très contrastées assurent au Quaternaire ses traits les plus originaux, qui le distinguent nettement des ères précédentes. Les industries préhistoriques suggèrent des divisions chronologiques ; elles prennent une valeur sûre lorsque la stratigraphie et les séquences climatiques ont été précisées. Glaciations et interglaciaires, pluviaux et périodes sèches rythment l’histoire de la Terre ; aussi distingue-t-on fréquemment le Pléistocène, qui correspond aux périodes glaciaires, et l’Holocène, postérieur aux périodes glaciaires, malgré l’inégalité excessive des deux périodes. Glaciaires et pluviaux sont coupés de stades, marqués par un refroidissement, ou d’interstades, correspondant à un réchauffement. Les modifications de la répartition de la flore et de la faune se multiplient ; la faune s’adapte parfois, mais aussi se renouvelle par l’apparition ou l’extinction de genres ou d’espèces. Les dépôts marins sont localisés en bordure des continents ; généralement de faible épaisseur, ils prennent une valeur exceptionnelle lorsqu’ils sont puissants et fossilifères comme ceux qui ont permis de définir le Calabrien et de préciser les distinctions entre faunes chaudes et faunes froides. Les formations continentales sont discontinues, mais beaucoup plus étendues. Les dépôts meubles d’origine glaciaire, éolienne, alluviale, éluviale ou colluviale représentent la plus grande partie des roches du Quaternaire. Par suite de la faible durée du Quaternaire, les témoins de l’évolution pédogénétique, encroûtements, cuirasses et paléosols, sont fréquemment conservés. Ces particularités du Quaternaire ont suscité une adaptation et parfois un renouvellement des méthodes de recherche traditionnelles en géologie.


Géologie et géomorphologie

Les terrasses marines et fluviales ont été mises en rapport avec les mouvements du niveau général des mers suscités par les alternances de glaciation et de déglaciation. Mais l’interprétation du glacio-eustatisme a été faussée par des excès de systématisation. Charles Depéret (1854-1929) et Léon de Lamothe (1849-1936) avaient défini, à partir de stations méditerranéennes, une série de niveaux marins étagés : le Sicilien, le Milazzien, le Tyrrhénien et le Monastirien. Selon cette théorie, les terrasses fluviales prolongeaient les terrasses marines et, se raccordant à l’amont à des moraines, correspondaient à des phases glaciaires, chaque terrasse s’emboîtant dans la précédente. La synchronisation des hauts niveaux marins et des glaciations était erronée : les hauts niveaux marins, correspondant à des périodes de déglaciation, datent des interglaciaires. De plus, l’eustatisme généralisé suppose l’absence de mouvements tectoniques, alors que la Méditerranée est, au Quaternaire, une aire de tectonique active. Enfin, la formation des terrasses fluviales dépend aussi des variations des apports alluviaux, liées aux modifications du climat et de la couverture végétale, ou même de causes locales. Bien que ces premières interprétations soient désormais périmées, les terrasses restent des éléments précieux pour l’établissement d’une chronologie locale ou régionale ; elles sont à l’origine de la chronologie des faunes marines méditerranéennes, qui conserve les noms des niveaux étages.

Les moraines et leurs altérations ont donné des indications plus sûres sur l’évolution climatique du Quaternaire. Les sols développés sur les moraines sont souvent épais ; les gros éléments sont très attaqués, couverts d’oxyde de fer, s’effritent ou ont disparu. Si le paléosol est détruit par l’érosion, il laisse parfois des témoins sous la forme d’éléments peu altérables, tels que les silex, les quartz ou les jaspes. Ces caractères authentifient l’ancienneté des formes d’accumulation glaciaires. Au contraire, des constructions de même nature, épargnées par le lessivage, restent très fraîches ; elles signalent une glaciation récente. Albrecht Penck (1858-1945) et Eduard Brückner (1862-1927) ont ainsi distingué quatre glaciations dans les Alpes : Günz, Mindel, Riss, Würm, auxquelles deux autres phases glaciaires, antérieures au Günz, ont été ajoutées (Biber et Donau). Trois glaciations seulement ont été reconnues en Europe du Nord. La première phase, la glaciation de l’Elster, correspondrait au Günz et au Mindel alpins. Les glaciations de la Saale et de la Vistule seraient l’équivalent septentrional du Riss et du Würm. Mais il est possible que les traces d’une première glaciation soient masquées par les dépôts de l’Elster. La découverte au Danemark de formations glaciaires peu altérées, recouvrant un étage marin et fossilisées par l’Elster, et d’une glaciation orientée vers l’est en U. R. S. S. corrobore cette hypothèse. En Amérique du Nord, quatre glaciations ont été reconnues : Nebraska, qui marque le début du Quaternaire, Kansas, Illinois, Wisconsin.

Sur les marges méridionales de la zone tempérée, dans l’hémisphère boréal, les moraines et les formes de relief qui leur sont associées se raréfient ; les glacis deviennent les principaux témoins de l’évolution du Quaternaire. Les pluviaux prennent le relais des glaciations. Les moraines sont en continuité avec des glacis encroûtés, élaborés au cours des pluviaux et des régressions marines, et incisés lors des interpluviaux. Aux abords de la zone intertropicale, les pluviaux correspondent au contraire aux transgressions, donc aux interglaciaires de la zone tempérée, et les périodes sèches aux périodes glaciaires. Au cours des glaciations, les déserts de l’hémisphère boréal ont reculé sur les marges de la zone tempérée et se sont étendus vers le sud ; l’équateur thermique, qui est décalé actuellement vers l’hémisphère Nord, devait être situé auparavant dans l’hémisphère Sud, près de la ligne de l’équateur.