Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

pyramide (suite)

Mesurant à la base 440 coudées (230 m environ), cette dernière, qui couvrait plus de 5 ha et dont la hauteur, encore actuellement de 138 m, devait atteindre à l’origine 146,60 m, fut considérée par les Grecs comme l’une des sept merveilles du monde. Son volume de 2 600 000 m3 nécessita au moins 6 millions de tonnes de pierres, qu’il fallut extraire et transporter des carrières sur traîneaux et en partie par bateaux, puis hisser par de vastes rampes et mettre en œuvre en apportant un soin extrême à l’appareillage des faces de parement. Si pareil travail a toujours provoqué à juste titre l’étonnement et l’admiration, la disposition très particulière des appartements intérieurs, surtout de la « grande galerie » et des trois salles principales, n’a cessé d’intriguer les esprits et de susciter des explications fantaisistes. Or, ce dispositif compliqué résulte simplement des modifications apportées en cours de construction au plan initial, comme ce fut aussi le cas pour d’autres pyramides de cette période. Il y eut là trois plans successifs, comprenant chacun l’une des trois salles réservées à la sépulture du roi, avec son couloir d’accès. Quant à la « grande galerie » — avec sa fameuse voûte en encorbellement parallèle à sa pente —, prévue dès le deuxième plan pour entreposer les tampons de granit destinés au blocage du couloir ascendant, elle devint dans le plan définitif, où la salle sépulcrale fut transférée au-delà de son aboutissement supérieur, le passage d’accès à celle-ci. D’autres faits, comme la parfaite orientation des côtés de la pyramide ou la présence des rapports Φ (le « nombre d’or ») et π approché dans certaines des proportions du monument, ont suscité de nombreuses théories dont il n’y a généralement pas à tenir compte. Il est certain que ce ne fut pas pour obtenir l’un de ces deux rapports, alors ignorés, que l’angle de pente de 51° 50′ 35″ fut choisi pour l’apothème de cette pyramide. Cet angle, donné par le rapport

était déjà celui du revêtement final de la pyramide de Meidoum, où il fut simplement déterminé par parallélisme à la ligne joignant les sommets de deux gradins sur le profil primitif de ce monument. Les rapports Φ et π n’ont donc été là que des qualités de rencontre, inhérentes à toute pyramide de pente

Quant à l’extrême exactitude de l’orientation de la Grande Pyramide (décalage de 4′ vers l’ouest par rapport à la direction du nord), elle est comparable à celle des autres pyramides de la dynastie : 9′ à la rhomboïdale, 5′ 30″ à Khephren et 14′ à Mykerinus (mais vers l’est). D’aussi bonnes approximations n’ont pu être obtenues qu’astronomiquement. L’emploi des ombres solaires n’étant pas suffisamment précis, on a dû viser sur une étoile, et, comme l’α du Dragon était alors toute proche du pôle, il y a lieu de penser que c’est elle qui fut utilisée.

Après Kheops, son fils Khephren fit encore édifier une très grande pyramide ; de base moins longue d’une quinzaine de mètres que la précédente, elle approchait en revanche de sa hauteur à 4 m près grâce à sa pente un peu plus forte (53° 8′), obtenue par le « triangle sacré », triangle rectangle dont les côtés sont entre eux comme les chiffres 3, 4 et 5 (4 se rapportant à la hauteur). De plus, dans le complexe monumental de Khephren, le temple bas est encore bien conservé avec ses piliers et ses blocs de parement en granit, alors que celui de Kheops n’est plus visible ; quant au temple haut, sa surface est ici plus du double de ce qu’elle est dans le complexe de Kheops.

Mykerinus, fils de Khephren, donna à sa pyramide, la troisième de Gizeh, des dimensions plus modestes. Le côté de cette pyramide n’atteignit plus que 200 coudées, et, avec la pente de 51° 20′ choisie pour les faces et obtenue par le triangle rectangle où

le volume se trouva réduit à moins du dixième de celui de la Grande Pyramide. Quant au revêtement, prévu en granit, il ne fut exécuté que jusqu’au tiers de la hauteur, probablement en raison de la maladie et de la mort prématurée du roi, et complété ensuite en calcaire. De même, le temple haut, commencé en granit, dut être achevé simplement en briques crues par Shepseskaf, fils de Mykerinus, qui, renonçant pour sa propre tombe à la forme pyramidale, édifia au sud de Saqqarah un monument figurant un gigantesque sarcophage.

Avec la Ve dynastie, on assiste à un vif essor du culte solaire. Les rois construisent de nouveau des pyramides, mais celles-ci sont de dimensions plus réduites, et leurs temples, aux beaux dallages et soubassements de basalte et de granit, aux parois couvertes de remarquables bas-reliefs, prennent relativement plus d’importance dans le complexe funéraire. Seule la pyramide de Neferirkarê à Abousir égalera celle de Mykerinus, et la plus petite, édifiée à Saqqarah par Ounas, le dernier roi de la dynastie, ne mesurera plus que 110 coudées de côté, tout en atteignant encore plus de 43 m de hauteur grâce à sa forte pente de 56° 19′, déterminée par le triangle rectangle où Sous la VIe dynastie, à Saqqarah, les dimensions des pyramides se stabiliseront à 150 coudées de côté et à 100 coudées (52,40 m) de hauteur, proportion obtenue, comme à la pyramide de Khephren, par le triangle sacré ou

Quant au plan de l’appartement funéraire sous la pyramide, il tend à s’uniformiser dès la Ve dynastie. Le départ de la descenderie d’accès se situera désormais, jusqu’à la fin de l’Ancien Empire, dans une petite chapelle accolée au milieu du côté nord de la pyramide. Cette descenderie débouche dans un vestibule qui se prolonge par un couloir horizontal, barré successivement par trois herses de granit et aboutissant à une vaste antichambre ; celle-ci donne accès vers l’ouest à la salle contenant sarcophage de basalte et cuve à canopes en granit. Les voûtes étoilées de ces deux salles sont constituées par trois couches d’énormes dalles superposées en chevrons et pesant chacune une trentaine de tonnes. À partir d’Ounas, les fameux « Textes des Pyramides », de caractère magico-religieux, destinés à aider le roi défunt à triompher de tous les obstacles de l’au-delà pour parvenir jusqu’au séjour de Rê et des dieux, seront gravés sur les principales parois de l’appartement.