Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Puy (Le) (suite)

Le site du Puy est lui-même une véritable valeur touristique : au débouché des gorges de la Borne, non loin de celles de la Loire, dominé par les orgues du mont Denise, étalé dans un bassin ceinturé de hauteurs et où pointent les deux célèbres rochers Corneille et Aiguilhe, l’un et l’autre lieux de culte. La vieille ville, très serrée, enveloppe, surtout au sud, le rocher Corneille, mais c’est plus au sud, aux bords de la célèbre place du Breuil, que se trouvent les principaux quartiers commerçants. Plus au sud encore, autour des jardins Vinay, et à l’est, autour de la gare, s’étendent des quartiers assez mornes du xixe s. Une vaste expansion pavillonnaire se fait sur les collines dominantes, au sud (Vals-près-Le-Puy) et à l’ouest (Espaly-Saint-Marcel). Vers l’est (Chadrac et Brives-Charensac) alternent les vieux quartiers, les villas et la zone industrielle nouvelle (qui compte surtout des entrepôts) de Brives-Charensac. Incluse dans la Région Auvergne, la ville a peu de relations avec Clermont-Ferrand*, malgré les remarquables améliorations récentes de la R. N. 102. Elle est avant tout sous l’influence de Saint-Étienne, malgré la médiocrité de la R. N. 88 et les difficultés du col du Pertuis. Les relations avec la région d’Alès-Nîmes (vente de bestiaux) empruntent aussi une route difficile. Même insuffisance des routes de la Margeride, alors qu’à l’est, malgré l’altitude, les communications faciles avantagent Le Puy dans un rayon de 60 km. Il ne fait aucun doute que, par sa situation dans un bassin fertile, aux abords des campagnes céréalières du Devès et de plateaux d’élevage, la ville est le centre indiscutable du Velay. Mais elle se contente de vivre de sa région et, compte tenu de la pauvreté, du dépeuplement et du vieillissement des campagnes vellaves, son avenir ne peut être que limité.

P. B.


L’histoire

Une femme guérie d’un mal mystérieux après s’être allongée sur la table d’un ancien dolmen, dite « pierre des fièvres », et qui reçoit en songe mission d’intervenir auprès de l’évêque des Vellaves pour qu’il construise une église en haut du mont Anis, un cerf qui trace en courant dans la neige le plan de l’édifice, des vieillards vêtus de blanc qui apportent des reliques de la Vierge, telle est la légende chrétienne, imprégnée des cultes celtiques et marquée d’influences orientales, que l’on trouve à l’origine du Puy. La ville est née du pèlerinage. Le Puy d’Anis devient en 593 siège d’un évêché, puis capitale du Velay. Aux approches de l’an 1000, l’évêque Gui tente d’obtenir l’adhésion des féodaux de la région à « la paix de Dieu ». Le culte de la Vierge existait depuis longtemps quand a lieu, le vendredi saint 25 mars 992, le premier jubilé. Toutes les fois, au cours des âges, que le vendredi saint coïncidera avec l’Annonciation, d’immenses foules envahiront la ville.

Au xie s., Le Puy exerce un rayonnement considérable en Occident et dans le monde arabe, et devient « tête » du chemin de Compostelle, qui passe par Aubrac, Conques, Cahors et Moissac. L’évêque Pierre de Mercœur fait en 1063 la route de Galice.

Raimond de Saint-Gilles, comte de Toulouse, qui commandera l’armée des croisés méridionaux à la première croisade, se rend au Puy en 1087 pour s’incliner devant la Vierge et rencontrer l’évêque Adémar de Monteil. En 1095, le pape Urbain II lance du Puy la bulle de convocation au concile de Clermont et nomme Adémar de Monteil légat apostolique pour la croisade.

Les papes Pascal II, Gélase II, Calixte II, Alexandre III viennent se prosterner devant Notre-Dame du Puy, ainsi que les rois de France Louis VII et Saint Louis. La papauté et la monarchie capétienne encouragent le pèlerinage pour enrayer l’hérésie cathare. Le troubadour Peire Cardenal dénoncera quand même à la cour poétique de Notre-Dame du Puy les atrocités de la croisade contre les albigeois.

Le Puy recevra d’autres visiteurs illustres : notamment Philippe le Hardi, Philippe le Bel, Charles VI, Charles VII, Louis XI, Louis XII, François Ier, du Guesclin, saint Vincent Ferrier.

Aux plus sombres jours de la guerre de Cent Ans, en 1429, la mère de Jeanne d’Arc, Isabelle Romée, se rend au Puy, resté fidèle au roi légitime, pour implorer la Vierge de sauver le royaume en péril.

Des ateliers de drapiers et de pelletiers fonctionnent au xiiie s. La fabrication de la célèbre dentelle qui portera loin le renom de la ville commence au xive s. Au xviiie, le Génevois Grenus crée une fabrique d’indiennes.

Pendant la crise de la Réforme, Le Puy demeure catholique et ne reconnaît Henri IV roi de France qu’après son abjuration.

À la Révolution, Le Puy qui faisait partie du Languedoc, devient chef-lieu du département de la Haute-Loire.

En 1860 est érigée sur le mont Corneille la gigantesque statue de Notre-Dame de France, fondue avec les 213 canons pris à la bataille de Sébastopol.

Le plus émouvant des pèlerinages du xxe s. fut celui des milliers de jeunes qui, à l’appel des mouvements catholiques et de Mgr Martin, arrivèrent à pied, du 13 au 15 août 1942, de toutes les villes de la zone libre et même, en dépit de la ligne de démarcation, de plusieurs villes de la zone occupée, et qui prièrent pour la libération du territoire, le retour des prisonniers et la paix.

J. P.

➙ Auvergne / Loire (Haute-).


L’art au Puy

Deux admirables monuments polychromes font du Puy un des hauts lieux français de l’art roman*.

La cathédrale Notre-Dame domine la ville. Sa façade, rouge, noire et blanche, à cinq étages, s’élève en haut de cent deux marches dans l’axe de la pittoresque rue des Tables, aux trottoirs en escaliers. Construite au xiie s., restaurée au xixe, c’est un robuste édifice à trois nefs voûté de six coupoles octogonales sur trompes. Les bras courts du transept se terminent par des absidioles jumelées ; le chevet rectangulaire est flanqué de deux chapelles. Les sculptures des chapiteaux — feuillages, animaux fabuleux, apôtres agenouillés, Christ bon pasteur entre le soleil et la lune — s’imposent par leur vigueur. Chapelles et tribunes conservent plusieurs fresques romanes d’une grande beauté, dont les saintes Femmes au tombeau, sainte Catherine d’Alexandrie suppliciée sur la roue, saint Étienne écrasant un dragon et un chef-d’œuvre justement célèbre, l’archange saint Michel, au visage d’une lumineuse gravité, le corps mince vêtu d’une longue tunique ocre à bandes tissées (5,50 m de hauteur). Voûtée en berceau brisé sur doubleaux, la chapelle des Reliques est ornée de fresques du xve s. représentant les arts libéraux.