Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Puvis de Chavannes (Pierre) (suite)

Certain de sa vérité, froid et grave, austère, du moins dans sa maturité, Puvis de Chavannes « aimait l’ordre parce qu’il aimait passionnément la clarté ». C’était un classique. Deux faits dominent sa formation. C’est d’abord un séjour de deux ans en Italie, où il a la révélation de la peinture murale, surtout devant les décorations de Pompéi et les fresques de Giotto. Puis, à Paris, après un court séjour dans l’atelier de Delacroix*, dont les leçons succèdent à celles de Scheffer, c’est l’inclination qui le porte vers Chassériau*.

L’influence des fresques de ce dernier à la Cour des comptes est sensible dans les forgerons du Travail, l’une des peintures murales exécutées de 1860 à 1865 pour le musée de Picardie à Amiens (et que complétera en 1882 une autre composition, Ludus pro patria).

Avec ses nudités et ses drapés antiques, cette série développe une symbolique de l’existence et des activités humaines prenant pour décor les beautés de la province picarde. Au musée des Beaux-Arts de Marseille (1868-69), les origines de la cité sont évoquées, tandis qu’à l’hôtel de ville de Poitiers le peintre conte l’histoire régionale à travers les figures de Sainte Radegonde (1872) et de Charles Martel (1874).

À Lyon, pour le palais des Arts, il donne ensuite le célèbre Bois sacré (1884), la Vision antique (1885) et l’Inspiration chrétienne (1887). À Paris, trois ensembles sont fort connus. À l’Hôtel de Ville, entre plusieurs groupes, on retient l’Été et l’Hiver (1891-92) ; le grand amphithéâtre de la Sorbonne renferme les Sciences et les arts ; au Panthéon sont les principaux épisodes de la vie de sainte Geneviève, le plus célèbre (et la dernière œuvre de l’artiste, en 1898) représentant l’héroïne veillant sur Paris endormi. Les États-Unis possèdent l’unique ensemble de Puvis de Chavannes qui soit hors de France ; il fut exécuté en 1894-1896 pour le grand escalier de la bibliothèque de Boston.

Rigidité, impassibilité, intransigeance et traditionalisme ont été reprochés au peintre. Beaucoup de ses contemporains n’ont pas compris sa sobriété, qui s’impose pourtant à un muraliste — mais qui demeure chez lui dans la peinture de chevalet (le Pauvre Pêcheur, 1881, musée du Louvre). Faite pour être vue de loin, la peinture murale fait corps avec l’ordre architectural. Ainsi s’expliquent les couleurs volontairement mates, ternes même et peu nombreuses de Puvis. S’il avait peint directement sur la muraille, il n’aurait pu être plus fidèle à cette discipline ; car ses œuvres ont été peintes en atelier, sur des toiles des dimensions voulues, et marouflées ensuite.

À cette frugalité correspondent la rigueur et l’unité, une attention entièrement tournée vers l’essentiel, vers l’expression et non la narration. Par là, Puvis de Chavannes est un classique, mais un classique qui appartient à son temps : un moderne qui crée un langage symbolique simple, compréhensible de tous, dont les matériaux sont non pas l’anecdote, l’allégorie complexe ou la référence culturelle, mais bien la ligne, la couleur et la forme. Par là, il a influencé Gauguin*, Maurice Denis et les nabis*, voire Picasso.

M. B.

 CATALOGUE D’EXPOSITION : L. d’Argencourt et J. Foucart, Puvis de Chavannes (Paris-Ottawa, 1976).

Puy (Le)

Ch.-l. du départ. de la Haute-Loire* ; 29 024 hab. L’agglomération, avec Brives-Charensac, Espaly-Saint-Marcel, Chadrac, Vals-près-Le-Puy, rassemble environ 45 000 hab.



La situation

Bien que le site ait été occupé depuis au moins l’époque romaine, l’importance du Puy ne date que de la christianisation : auparavant, c’était Revessium, ou Ruessio (auj. Saint-Paulien), qui était la capitale du Velay. L’annexion au christianisme de l’ancien culte des hauteurs et le développement du culte à la Vierge ont suscité l’expansion médiévale du Puy, un des principaux centres de pèlerinage de l’Europe occidentale dès le xie s. L’afflux des pèlerins développa le commerce du Puy, qui en a gardé une empreinte indélébile de centre du catholicisme avec ses couvents et ses écoles confessionnelles, et son atmosphère fermée et conservatrice de ville bourgeoise. Par-delà le commerce sur place, la religion est à l’origine de l’industrie de la dentelle, qui naquit dès le Moyen Âge pour orner les châsses et les habits sacerdotaux, et qui, mobilisant une main-d’œuvre très nombreuse et très misérable, fit du Puy une grande ville à l’époque moderne (estimation de 10 000 à 15 000 hab. au xvie s., de 20 000 à la fin du xviiie s., chiffre demeuré ensuite stable jusqu’au début du xxe s.). Le Puy diffusa l’industrie dentelière sur les plateaux environnants, jusqu’à Langeac, Craponne-sur-Arzon, Saint-Bonnet-le-Château (Loire), Yssingeaux, donc surtout au nord et à l’ouest, et concentra son commerce en un négoce qui demeura fructueux jusqu’à la fin du xixe s., mais qui fut ensuite ruiné par la concurrence du métier mécanique et des dentelles étrangères, par l’exode rural et la hausse du prix de la main-d’œuvre. Le caractère artisanal de cette activité, l’absence de relais industriel expliquent la longue stagnation du Puy. Les seules industries traditionnelles, implantées depuis longtemps, étaient la papeterie et la liquorerie. Actuellement, une très grosse tannerie (plus de 1 000 travailleurs) concentre une part croissante de cette industrie en France, cependant son avenir n’est pas sans souci. Mais Le Puy reste avant tout une ville tertiaire et commerçante. Si son rayon d’action ne dépasse pas Yssingeaux au nord-est du fait de la concurrence stéphanoise, elle s’étend jusqu’à La Chaise-Dieu au nord, Langeac à l’ouest, Langogne (Lozère) au sud, et elle domine tous les hauts plateaux vivarois, mais la plus grande partie de cette zone, purement rurale, est très dépeuplée, surtout au sud. Il reste que le commerce du Puy s’est récemment développé avec l’inclusion croissante des campagnes dans l’économie monétaire. La ville est, en outre, un centre touristique très important : outre les pèlerinages, moins importants qu’autrefois, elle a un rôle de redistribution touristique dans une région où se développe rapidement la fréquentation estivale, en provenance des régions de Lyon, de Saint-Étienne et du Midi rhodanien et provençal.