psychasthénie (suite)
Formes cliniques de la psychasthénie
• La psychasthénie permanente ou chronique, soit héréditaire ou congénitale, soit acquise pendant les premières années de la vie, apparaît comme une affection névrotique au sens strict. Elle suppose un tempérament bioneurologique particulier et une organisation pathologique fragile de la personnalité sous l’action de facteurs de milieu plus ou moins pathogènes. Elle se révèle parfois dès l’enfance, mais plus souvent à l’adolescence ou chez l’adulte jeune. Elle évolue par poussées avec des périodes de stabilisation ou de rémission parfois longues. La personnalité psychasthénique se révèle à l’occasion de difficultés d’adaptation à la vie professionnelle ou dans l’intimité familiale. Elle prédispose indiscutablement aux états dépressifs. À vrai dire, tous les degrés d’intensité ou de gravité s’observent, depuis le petit psychasthénique bien « compensé » qui réussit assez bien son existence jusqu’au grand psychasthénique qui se désocialise progressivement, véritable infirme, tôt ou tard à la charge d’une famille, d’un conjoint ou de la société.
• Les états ou syndromes psychasthéniques sont des affections transitoires, un peu accidentelles, quoique développées sur des personnalités fragiles. Citons certains syndromes d’épuisement physique et mental, à la suite d’un surmenage vrai, d’une maladie infectieuse, inflammatoire, métabolique, endocrinienne, d’un traumatisme crânien, d’une hépatite à virus, après des grossesses trop rapprochées ou des avortements effectués dans des conditions difficiles. Certains états psychasthéniques aigus ne sont que l’aspect superficiel d’une dépression névrotique ou mélancolique, voire l’amorce d’une psychose chronique.
Causes de la psychasthénie
Pour Janet, les symptômes et le comportement s’expliquent par une sorte de faiblesse psychologique subtile, une « maladie de la volonté », dit-on parfois, et plus exactement une faiblesse de la tension psychique. Il s’agit d’un déficit plus ou moins net d’une fonction énergétique maintenant les différents niveaux d’activité mentale dans une sorte de hiérarchie qui aboutit aux aspects les plus élevés du fonctionnement neuropsychique. La « fonction du réel », avec pour corollaire la volonté, la capacité de décision, d’action précise et synthétique sur le monde extérieur, semble affaiblie chez le psychasthénique. Si bien que ce dernier, au plus fort de ses états pathologiques, ne peut penser ou accomplir que des activités mentales de bas niveau : ruminations, doutes, vérifications, flottement dans des processus mentaux faits de distraction, de rêvasseries. Il manque en vérité à la théorie de Janet un support neurophysiologique et biochimique qui reste à prouver.
Pour les psychanalystes au contraire, le vrai psychasthénique se confond avec l’obsessionnel. Tout le secret des symptômes réside dans des mécanismes inconscients de défense contre l’angoisse, très inadaptés et responsables d’une perte considérable d’énergie. Les inhibitions, les doutes, les scrupules exagérés, les rites et les ruminations, le perfectionnisme stérile recouvrent des conflits inconscients remontant à la petite enfance et jamais résolus. Il y aurait surtout une agressivité, une combativité, un dynamisme demeurés sommaires et archaïques, et qui se trouvent cumulés, inversés et retournés contre le sujet du fait de la culpabilité inconsciente qu’ils entraînent.
D’autres théories psychologiques font appel à des modes de conditionnement pathogènes intervenus dans l’enfance ou l’adolescence, qu’ils soient d’origine familiale ou sociale.
Aucune de ces explications n’entraîne la conviction. Il y a probablement plusieurs facteurs, parmi lesquels les biologiques sont aujourd’hui les plus négligés et les plus mal connus.
Traitement
Il comprend des mesures d’hygiène nerveuse et mentale, notamment pour ce qui est de l’organisation de la vie, des fonctions professionnelles, de l’existence matérielle, du sommeil. Il faut toujours s’efforcer de maintenir le psychasthénique dans une activité qui, pour réduite qu’elle soit, lui est absolument nécessaire. Le désarroi s’empare vite des sujets quand ils sont inoccupés. On renonce de plus en plus aux psychotoniques majeurs de type amphétaminique ou apparentés. On utilise plus volontiers d’innombrables stimulants biologiques moins dangereux, quoique moins efficaces. En revanche, un certain nombre d’antidépresseurs ont une action favorable, mais plus ou moins satisfaisante. Il s’agit de dérivés de l’imipramine ou des dibenzoazépines en premier lieu, inhibiteurs de la mono-amine-oxydase en second lieu (I. M. A. O.), anxiolytiques ou tranquillisants doux, peu actifs sur la vigilance et donnés surtout le soir. Ces chimiothérapies sont nécessairement très prolongées, voire de durée indéfinie, avec des posologies très variables selon les bonnes ou mauvaises phases du psychasthénique.
On utilise dans tous les cas la psychothérapie sous toutes ses formes, y compris l’abord psychanalytique. Néanmoins, les psychanalystes savent bien que plus un « obsessionnel » a des aspects psychasthéniques, moins la psychothérapie a de chances d’obtenir des résultats de bonne qualité.
Citons aussi la relaxation dans les formes anxieuses plus ou moins somatisées avec troubles du sommeil, un certain nombre de thérapeutiques physiques individuelles ou collectives à base de connaissance du corps, de gymnastique adaptée, de sport, et les cures thermales.
G. R.
➙ Dépression ou état dépressif / Névrose.