Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

acier (suite)

Le fer α et le fer δ, cristallisant tous deux dans le système cubique centré, ne peuvent dissoudre qu’une quantité infime de carbone ; ainsi, le maximum de solubilité du fer α vers 700 °C est seulement de 0,025 p. 100 de carbone. Cette solution solide α, cubique centrée, faiblement alliée en carbone, constitue la ferrite, malléable et de faible dureté (aciers extra-doux et doux).

À 720 °C, l’austénite à 0,85 p. 100 de carbone subit au refroidissement une réaction eutectoïde donnant naissance à un agrégat d’aspect finement lamellaire et perlé, la perlite, constitué de ferrite et de carbure de fer très dur, la cémentite Fe3C. À température ambiante, les propriétés mécaniques des aciers ordinaires recuits sont en relation directe avec leur structure micrographique :

Par trempe directe des aciers ordinaires, il n’est pas possible de maintenir à température ambiante le constituant austénite. Le refroidissement rapide par trempe à l’huile ou à l’eau fait apparaître un constituant très dur métastable, la martensite aiguillée (du nom du métallurgiste allemand Adolf Martens, 1850-1914), solution solide sursaturée de carbone dans le fer α. Un acier à 0,85 p. 100 de carbone, trempé à l’huile, a une charge de rupture de 250 hbar, mais avec un allongement inférieur à 1 p. 100. Le réchauffage du produit trempé, par revenu, permet une meilleure adaptation des propriétés. La martensite se décompose en un agrégat très fin, la sorbite (du nom du métallurgiste anglais Henry Clifton Sorby, 1826-1908), formée de ferrite et de cémentite. Suivant les conditions de revenu (température et temps), il est possible d’obtenir un compromis entre les diverses propriétés.

Lorsque la décomposition de l’austénite s’effectue en condition isotherme par traitement de trempe atténuée ou par trempe dite « isotherme » ou « étagée », on obtient des agrégats fins de ferrite et de cémentite, soit sous forme de troostite (du nom du chimiste français Louis Troost, 1825-1911), soit sous forme de bainite (du nom du chimiste américain E. C. Bain), soit encore sous forme de granulite. Ces structures sont caractérisées par leur dureté combinée à une notable résilience.

Des traitements physico-chimiques, suivis de traitements thermiques, permettent de conférer aux pièces en acier des caractéristiques mécaniques locales en relation avec leurs conditions de service. Ainsi, par cémentation ou par nitruration, on obtient des pièces ayant une grande dureté en surface, de 800 à 1 100 vickers, alors que le cœur reste malléable avec une dureté de 100 à 150 vickers seulement. Certains aciers alliés peuvent subir des traitements superficiels de diffusion de chrome (chromisation) ou d’aluminium (calorisation) afin d’améliorer à la fois leur dureté et leur tenue à l’oxydation, à la corrosion ou à l’usure.


Les différents aciers et leurs emplois industriels

Après leur élaboration en aciérie, les aciers sont utilisés à partir de lingots, soit sous forme de moulages de fonderie (acier moulé), soit sous forme de produits obtenus par les divers procédés mécaniques de mise en forme (aciers forgé, laminé, filé, étiré, tréfilé, matrice, comprimé, fritté, etc.). Plus particulièrement pour les produits laminés et étirés, le type de refroidissement et de solidification, lors de la coulée des lingots, influe sur la qualité et l’homogénéité des aciers. Lorsque la solidification s’effectue avec dégagement gazeux, par effervescence, le lingot a une peau saine, et les impuretés sont concentrées à cœur (acier effervescent ou mousseux). Si l’on empêche le dégagement gazeux par fixation de l’oxygène grâce à des additions dans la poche de coulée (aluminium, titane), le produit est plus homogène et n’est pas sensible, comme l’acier effervescent, à l’évolution des caractéristiques mécaniques avec le temps par vieillissement : c’est l’acier calmé. D’autres procédés permettent d’interrompre l’effervescence par action mécanique (acier bloqué ou claveté).

En raison du grand nombre de nuances, une classification des aciers a d’abord été établie par des organismes d’industries utilisatrices (aéronautique, marine, automobile), puis par l’Association française de normalisation, en liaison avec les organismes étrangers correspondants afin de normaliser les nuances au niveau européen dans le cadre de la Communauté européenne du charbon et de l’acier. On distingue deux grands groupes de nuances suivant la composition chimique : les aciers ordinaires non alliés et les aciers alliés.


Aciers ordinaires

Les aciers ordinaires, ou aciers au carbone non alliés, dont la teneur en carbone est inférieure à 1 p. 100, sont désignés par leur niveau de dureté à l’état recuit.


Aciers alliés

Ceux-ci contiennent un ou plusieurs éléments d’addition ; ils sont dits faiblement alliés lorsque aucun élément n’atteint 5 p. 100 et fortement alliés ou spéciaux lorsqu’un des éléments est supérieur à 5 p. 100.

L’influence des éléments d’addition s’explique soit par les modifications structurales, soit par l’action plus directe sur la constitution chimique des aciers.

Certains éléments entrent facilement en solution solide avec le fer γ et élargissent ainsi le domaine de l’austénite ; c’est le cas du nickel et du manganèse, éléments dits gammagènes (aciers austénitiques). Le chrome et le silicium, éléments alphagènes, favorisent le domaine de la ferrite (aciers ferritiques). Quant à certains éléments et au-delà d’une teneur notable, comme le tungstène et le vanadium, ils forment avec le carbone des carbures stables et durs.

De plus, ces éléments modifient les domaines d’équilibre des phases en fonction de la température et déplacent les lignes de transformation, ce qui est primordial pour les traitements thermiques. Ainsi, pour un acier contenant 0,3 p. 100 de carbone, 5 p. 100 de nickel et 2 p. 100 de chrome, un refroidissement à l’air permet d’obtenir une structure martensitique de trempe et des caractéristiques correspondantes (acier autotrempant). Pour un acier contenant 0,2 p. 100 de carbone et une addition de 26 p. 100 de nickel, il ne se produit plus de transformation au cours du refroidissement, et l’acier conserve sa structure austénitique, même à température ambiante.

Les additions sont aussi nombreuses que variées.