Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

préciosité (suite)

Mais l’on comprendrait mal la préciosité si l’on ne voyait qu’elle implique une transformation profonde de la société au cours de la première moitié du siècle. Elle résulte de l’accession au pouvoir, à la puissance et à l’argent d’une fraction importante de la bourgeoisie qui, désormais, s’allie à la noblesse. Elle suppose le développement de l’instruction, la diffusion du savoir, le goût des belles-lettres, chez les femmes en particulier, dont l’émancipation est assurée. Elle s’épanouit à l’aube d’une nouvelle forme de civilisation. Elle résume en elle cinquante années d’efforts vers les belles manières, la distinction, la politesse, le raffinement. Dès lors, on apprécie mieux la place du mouvement précieux au sein du xviie s. On ne le confond plus avec le baroque*, incarné, par exemple, par Théophile de Viau, Saint-Amant et Tristan l’Hermite ; on ne voit plus des précieux en Nervèze ou Des Escuteaux. On a dit que le baroque est à la fois « monarchique, aristocratique, religieux et terrien ». La préciosité, quant à elle, naît dans le monde mesuré des salons ; elle vit à l’échelle humaine et n’a pas de préoccupations eschatologiques ; elle mêle indistinctement, selon les mérites de l’esprit, les classes sociales, noblesse et bourgeoisie ; elle est l’apanage d’une élite qui a reçu une forte culture, imprégnée de connaissances scientifiques, juridiques et philosophiques. Elle est urbaine, profane, égalitaire et intellectuelle. Quant au burlesque*, qui, selon É. Faguet, « est un précieux qui se moque de lui-même », il apparaît comme un genre littéraire aux procédés artificiels bien définis, alors qu’il n’y a pas de genre précieux proprement dit : le précieux est épars dans la poésie, le roman, le théâtre, les mémoires, la correspondance.

La préciosité a inspiré toute une littérature psychologique et morale, surtout abondante dans la poésie et le roman, mais représentée aussi à l’occasion par la tragédie ; elle a contribué même à l’essor d’un genre nouveau comme l’opéra. On retrouve son influence dans les vers de Racine comme dans les Maximes de La Rochefoucauld. La Princesse de Clèves rappelle par bien des traits le Grand Cyrus et la Clélie. L’art du portrait, mis à la mode par les précieux, s’épanouit dans les Caractères de La Bruyère. Molière, quelques critiques qu’il ait faites des précieuses, envisage comme elles la situation de la femme dans la société, sa place dans la famille, l’importance de son instruction, la question du mariage. La Fontaine, dans une part importante de ses œuvres, a subi l’attrait de la préciosité. Celle-ci nourrit encore les réflexions du chevalier de Méré et les remarques grammaticales du P. Bouhours. Au-delà du xviie s., jusqu’à Fontenelle et à Marivaux, elle fera sentir des effets nombreux et durables.

R. L.

➙ Salons, académies, clubs, cafés : l’espace littéraire.

 V. Cousin, Madame de Sablé, nouvelles études sur la société et les femmes illustres du xviie siècle (Didot, 1854) ; la Société française au xviie siècle d’après « le Grand Cyrus » de Mlle de Scudéry (Ladrange, 1858 ; 2 vol.). / C. L. Livet, Précieux et précieuses. Caractères et mœurs littéraires du xviie s. (Didier, 1859). / T. Joran, les Féministes avant le féminisme (A. Savaète, 1911 et Beauchesne, 1935 ; 2 vol.). / J. E. Fidao-Justiniani, l’Esprit classique et la préciosité au xviie siècle (Picard, 1914). / F. Baumal, le Féminisme au temps de Molière (la Renaissance du livre, 1924) ; Molière auteur précieux (la Renaissance du livre, 1924). / G. Mongrédien, les Précieux et les précieuses (Mercure de France, 1939). / R. Bray, Anthologie de la poésie précieuse de Thibaut de Champagne à Giraudoux (Libr. de l’Université, Fribourg, 1947 ; nouv. éd., Nizet, 1957) ; la Préciosité et les précieux de Thibaut de Champagne à Giraudoux (A. Michel, 1948). / A. Adam, Histoire de la littérature française au xviie siècle (Domat, 1948-1956 ; 5 vol.). / Y. Fukui, Raffinements précieux dans la poésie française du xviie siècle (Nizet, 1965). / R. Lathuillère, la Préciosité. Étude historique et linguistique (Genève, Droz, 1966).

précipitation électrostatique

Opération qui permet d’éliminer les poussières, brouillards, etc., contenus dans un gaz en communiquant à ces particules une charge électrique et en soumettant les particules chargées à un champ électrique qui les amène à se déposer sur un collecteur.


La charge est communiquée sans contact matériel en créant dans les gaz un flux d’ions unipolaires par des fils fins ou barbelés portés à un potentiel de – 30 à – 60 kV vis-à-vis d’une électrode à la terre. La polarité négative est presque toujours préférée en raison de la plus grande stabilité de l’effluve.

Dans le cas de sphérules conductrices (quand elles sont isolantes, la différence est peu importante), la charge limite est Qm = 12πє0 ER2 ; E étant le champ au point considéré, R le rayon. Cette charge est acquise suivant la loi Q = Qm t/(T + t), où t est le temps et T = 4є0ρ, où ρ représente la résistivité équivalente de l’air chargé d’ions. L’ordre de grandeur de constante est de 0,1 s. Le champ électrique moyen étant limité (quelques kilovolts par centimètre) en raison des risques de claquage, la force F = QE donne aux particules une vitesse de précipitation maximale U = 2є0 E2R/η (η viscosité du gaz) proportionnelle à leur rayon. Elle est de quelques centimètres par seconde pour un diamètre de l’ordre du micron. Pour les particules submicroniques, la formule donnant Q n’est plus valable et la vitesse reste du même ordre.

En raison de la petitesse de U, il est nécessaire que la largeur de la veine de gaz, parallèlement au champ électrique, soit limitée (de 20 à 30 cm). Pour la plupart des applications industrielles, on est ainsi conduit à utiliser des canaux métalliques de section très allongée, verticale, dans le plan médian desquels sont tendus les fils ionisants à un intervalle régulier comparable à la largeur du canal. Les parois verticales du canal, reliées à la terre, sont les électrodes collectrices. Le précipité, s’il est solide, tombe dans une trémie. On le décolle par frappage.