Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

poudre (suite)

La balistique intérieure

C’est l’étude du mouvement d’un projectile sous l’effet de la combustion d’une charge de poudre.

Au xviiie s., Sébastien François Bigot de Morogues (1705-1781) et Daniel Bernouilli* jettent les bases de la théorie cinétique des gaz, et Patrice d’Arcy (1725-1779) constate que la vitesse de combustion de la poudre noire croît avec la pression, tandis qu’en Angleterre Benjamin Robins (1707-1751) et James Hutton (1726-1797) mesurent au pendule balistique la vitesse des boulets. En 1840, Guillaume Piobert définit la fonction de forme d’une poudre qui caractérise la surface de combustion d’une poudre censée brûler par couches parallèles, hypothèse que les grains de poudre noire, trop friables, suivent imparfaitement. On dit ainsi aujourd’hui qu’une poudre est dégressive (en bandes, cordes ou grains sphériques) à émission constante (tubulaire) ou progressive (en grains multitubulaires). En 1860, Henri Resal (1828-1896) applique les lois de la thermodynamique à la combustion de la poudre, tandis qu’Andrew Noble (1832-1915) met au point en 1870 la mesure de la pression au moyen de l’écrasement d’un petit cylindre en cuivre, ou crusher (on emploie aujourd’hui un capteur piézo-électrique). Simultanément, la vitesse initiale est mesurée au chronographe de Boulengé-Bréger (1860-1880). Ainsi, au début du xxe s., connaît-on les lois fondamentales de la balistique intérieure, que l’on exprime par trois relations :
— l’équation d’inertie, qui exprime que le projectile est mis en mouvement sous l’effet des gaz agissant sur son culot ;
— l’équation d’énergie, qui établit la correspondance entre l’énergie calorifique provenant de la combustion de la poudre, l’énergie potentielle concentrée dans les gaz chauds sous pression et l’énergie cinétique du projectile ; le rapport du dernier terme au premier donne le rendement — de l’ordre de 0,3 — de ce moteur à explosion particulier ;
— l’équation de combustion de la poudre, dans laquelle l’émission de gaz brûlés apparaît à chaque instant comme proportionnelle à la vivacité de la poudre (liée à son épaisseur), à sa fonction de forme et à la pression.

Au cours de leur détente derrière le projectile, les gaz suivent la loi de Clausius-Sarrau, qui diffère de celle de Mariotte par la seule présence du covolume (un gaz réel n’est pas indéfiniment compressible). Ces équations peuvent être intégrées et présentées sous forme de tables numériques dénommées outillages balistiques.

Une poudre donne en brûlant des gaz portés à une température T0 qui dépend de sa composition : elle est dite chaude ou froide selon que T0 dépasse ou non 2 400 K. Sa force, qui caractérise sa puissance balistique, croît proportionnellement à T0, mais son pouvoir érosif croît également. Ainsi, on peut choisir une poudre plus chaude pour un canon de char que pour une pièce d’artillerie, qui devra tirer un plus grand nombre de coups. Une poudre lente permet de réaliser sous une pression maximale donnée une vitesse initiale plus élevée qu’une poudre vive, sous réserve que la combustion demeure complète ; une combustion incomplète rend en effet le tir imprécis. La progressivité qui résulte de formes appropriées (grains à 7 ou à 19 trous) ou d’un lissage particulier permet aussi d’améliorer le rendement du canon sans accroître la pression. Dans les obusiers, on emploi des charges divisibles : un fond de charge en poudre vive et des appoints en poudre lente.

Depuis 1940, l’étude de la déflagration dans une chambre de combustion de roquette, qui débouche vers l’extérieur par une tuyère en produisant une poussée (v. autopropulsé [projectile]), a conduit à préciser la loi de combustion des poudres sous faible pression grâce aux travaux d’Henri Muraour (de 1935 à 1950) ; l’écoulement des gaz doit, en effet, être stable sans emballement ni extinction de la poudre. Enfin, l’allumage d’une charge ou d’un bloc de poudre est assuré au moyen d’une amorce à percussion ou électrique à base d’explosif primaire complétée sur un appoint, généralement en poudre noire, qui dégage une quantité suffisante de gaz chauds pour mettre le feu à l’ensemble de la charge.

R. S.

 F. Winter, Balistique intérieure théorique (Mémorial de l’artillerie française, 1939-1940-1946). / J. Corner, Theory of Interior Ballistics of Guns (Mémorial de l’artillerie française, 1955-1957-1958). / J. Corbeau, l’Autopropulsion des missiles et des roquettes (Cours de l’École nat. sup. de l’armement, 1964).

poudres (métallurgie des)

Ensemble des procédés d’obtention de pièces finies ou de semi-produits à partir de poudres métalliques.



Principe

Après leur agglomération, le plus couramment par compression, les poudres subissent un traitement thermique, appelé frittage, à une température telle que le produit reste totalement à l’état solide ou passe partiellement par une phase liquide. Les produits ainsi obtenus sont appelés produits frittés.


Historique

Les premières applications industrielles de la métallurgie des poudres datent de la fin du xixe s. avec la réalisation des filaments de tungstène ou d’osmium pour lampes à incandescence. Vers 1930, cette technique connut son véritable développement industriel avec la fabrication de coussinets autolubrifiants, de balais cuivre-graphite pour moteurs électriques, de contacts électriques et de carbures pour outils de coupe. Aujourd’hui, elle trouve des applications toujours nouvelles dans les domaines les plus variés des fabrications industrielles. Bien que limitée en général à la fabrication de pièces de masse réduite, souvent de l’ordre de quelques centaines de grammes, cette branche de la métallurgie permet néanmoins la fabrication de produits laminés en continu. Elle se développe également dans la réalisation d’ébauches frittées et filées de plusieurs centaines de kilogrammes.


Processus opératoires

Bien que tort variés, ils comportent toutes les phases successives suivantes : fabrication des poudres, agglomération, frittage, opérations de finition.