Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

Pouchkine (Aleksandr Sergueïevitch) (suite)

 Z. Schakhowskoy, Vie d’Alexandre Pouchkine (Éd. de la Cité chrétienne, Bruxelles 1938). / L. Lambert, Puschkin, Poet and Lover (New York, 1946). / H. Troyat, Pouchkine (A. Michel, 1946 ; 2 vol.). / M. et R. Hofmann, Pouchkine et la Russie (Éd. du Chêne, 1947) ; le Drame de Pouchkine (Corrêa, 1949). / W. Weidlé, Pouchkine (Unesco, 1950). / H. Juin, Pouchkine (Seghers, 1956). / I. L. Andronikov, les Derniers Jours de Pouchkine (trad. du russe, Éd. de Moscou, 1959). / V. Setschkareff, Alexander Puschkin. Sein Leben und sein Werk (Wiesbaden, 1963). / J. L. Backès, Pouchkine (Éd. du Seuil, coll. « Microcosme », 1966). / A. Tertz, Promenades avec Pouchkine (Éd. du Seuil, 1976).

Poudovkine (Vsevolod Illarionovitch)

Metteur en scène de cinéma soviétique (Penza 1893 - Riga 1953).


Mobilisé comme artilleur pendant la Première Guerre mondiale, fait prisonnier en Poméranie, d’où il parvient à s’évader, Vsevolod Poudovkine, sitôt les hostilités terminées, s’oriente vers une carrière de chimiste. Mais, brusquement, il décide de s’inscrire à l’École du cinéma de Moscou (la première en date du momie entier), après avoir assisté à une projection du film de Griffith Intolérance. Tout en suivant l’enseignement de V. R. Gardine, il s’essaie dans toutes les branches du cinéma : acteur (dès 1920 dans Pendant les journées de lutte [V dni borby] de I. N. Perestiani), coscénariste et coréalisateur (notamment en 1921 pour Faim... faim... faim [Crolod... golod... golod...] de Gardine). Mais la, rencontre déterminante sera celle de Lev V. Koulechov, qui vient de fonder son propre collectif, le Laboratoire central. Poudovkine travaille en étroite collaboration avec lui pour les Aventures extraordinaires de Mister West au pays des Bolcheviks (1924) et le Rayon de la mort (1925), où il joue également un rôle (on le retrouvera encore acteur quatre ans plus tard dans des films de G. M. Kozintsev, de L. V. Koulechov et surtout de F. A. Otsep [le Cadavre vivant, 1929] et après la Seconde Guerre mondiale chez Eisenstein dans Ivan le Terrible). Encouragé par Koulechov, il tourne en 1925 un court métrage, la Fièvre des échecs (Chakhmatnaïa goriatchka) et en 1926 un documentaire scientifique sur les réflexes de Pavlov, les Mécaniques du cerveau (Mekhanika golovnogo mozga). Dès cette époque, il cherche avec une sorte de passion fébrile à établir une codification du langage filmique. Il se persuade peu à peu que le « fondement artistique du film est le montage ». « Le lien organique entre l’intense complexité de notre époque et le caractère spécifique de l’art cinématographique ne peut être nié. Et la tendance à l’incorporation dans le film du maximum de réalité possible pour la totale exploitation des possibilités effectives du cinéma conduit fatalement à la méthode spécifique de l’art cinématographique : le montage de plans courts. »

Poudovkine met en application avec un indéniable bonheur ses théories dans trois films tournés à la fin de l’époque muette, qui forment une trilogie sur la prise de conscience politique et sociale d’un individu face à la révolution : la Mère (Mat, 1926, d’après Gorki) ; la Fin de Saint-Petersbourg (Konets Sankt-Peterbourga, 1927) et Tempête sur l’Asie (Polomok Tchinguiskhana, 1928). Ces trois films ont fait dire au critique Léon Moussinac : « Un film d’Eisenstein est semblable à un cri, un film de Poudovkine est comparable à un chant. »

En 1928, Poudovkine signe avec Eisenstein et G. V. Aleksandrov le Manifeste sur le contrepoint orchestral. C’est alors que survient la révolution du film parlant. Conçu pour être un film sonore, mais finalement tourné en muet, Un simple cas (Prostoï sloutchaï, 1930), connu également sous le titre de La vie est belle (Otchen khorocho jivetsia), ne sera présenté au public qu’en 1932. Après le Déserteur (Dezertir, 1933), le cinéaste, qui éprouve quelques difficultés à faire coïncider ses théories avec les servitudes du film parlant, n’entreprendra plus que des œuvres relativement mineures, qui apparaissent avec le recul du temps singulièrement prisonnières des conventions idéologiques du dogmatisme qui s’abat sur la plupart des artistes soviétiques au cours des années 30, freinant, interrompant ou anéantissant de nombreux projets.

Poudovkine, après s’être un temps consacré à la formation de jeunes réalisateurs à l’Institut du cinéma de Moscou, revient à la mise en scène en 1938 avec la Victoire (Pobeda). Il signe ensuite Minine et Pojarski (1939), Souvorov (1941), Festin à Jirmounka (Pir v Jirmounke, 1941), Les assassins prennent le large (Oubitsy vykhodiat na dorogou, 1942, d’après Brecht ; film tourné en collaboration avec I. V. Taritch et qui ne sera jamais programmé), Au nom de la patrie (Vo imia rodiny, 1943 ; film en coréalisation avec D. I. Vassiliev), Amiral Nakhimov (1947), Trois Rencontres (Tri vstretchi, 1950 ; film en coréalisation avec S. I. Ioutkevitch et A. L. Ptouchko), Joukovski (1950 ; film en coréalisation avec D. I. Vassiliev) et la Moisson (Vozvrachtchenie Vassilia Bortknikova, 1953).

Cinéaste éminent visuel, Poudovkine commit-il l’erreur de trop se fier à la démonstration d’une méthode qui privilégiait limage signifiante aux dépens d’un lyrisme plus désordonné, plus intuitif, moins « dirigé » ? Sans doute. « L’image visuelle, déclarait-il, demeure une force que l’art filmique n’utilise pas à plein. La force du muet vient de l’homme ; sur le visage, dans les yeux de l’interprète, le public lit la vérité des sentiments qui suscitent la parole. Dans le muet, la parole était réduite aux intertitres, et c’est le spectateur qui lui conférait l’intonation juste. Le muet révélait avec une clarté surprenante et inconnue du théâtre la vie intérieure du personnage, montrant le lieu, la source des paroles au moment même où elles naissent. » Ses trois films muets resteront probablement dans l’histoire du cinéma comme des exemples particulièrement caractéristiques du « triomphalisme » de l’image. On ne s’étonnera pas de voir le souffle métaphorique, si convaincant dans la Mère, ou la Fin de Saint-Pétersbourg, s’anémier peu à peu lorsque le cinéma parlant imposera dans les dialogues des films en tournage le reflet de l’académisme officiel.

J.-L. P.

 A. Mariamov, Vsevolod Poudovkine (en russe, Moscou, 1952). / U. Barbaro, Vsevolod Pudovkin : la settima arte (Rome, 1961). / L. et J. Schnitzer, Vsevolod Poudovkine (Seghers, 1966). / B. Amenguab, Vsevolod Poudovkine (Serdoc, Lyon, 1968).