Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Arnolfo di Cambio (suite)

La partie la mieux connue de son œuvre est certainement la suite de ses grands monuments funéraires qui, fondant admirablement architecture et sculpture, créèrent un type nouveau de sépulture, repris notamment par le sculpteur Tino da Camaino (v. 1285-1337). Ces monuments sont assez bien datés : tombeau du cardinal Annibaldi (1276) à Saint-Jean-de-Latran, dont il reste une admirable frise représentant la procession liturgique des funérailles ; tombeau d’Adrien V à San Francesco de Viterbe, sensiblement contemporain ; tombeau du cardinal de Braye à San Domenico d’Orvieto (1282)... Son activité romaine, autant que celle d’un sculpteur (Nativité de Santa Maria Maggiore, statue de bronze de saint Pierre à Saint-Pierre du Vatican), est d’ailleurs celle d’un architecte, comme en témoignent le ciborium de San Paolo fuori le Mura (v. 1285), celui de Santa Cecilia in Trastevere (1293) et surtout les aménagements, en partie disparus, de Santa Maria in Aracoeli, d’où provient la célèbre statue de Charles* d’Anjou (musée du Capitole). Peut-être aurait-il donné son plus grand chef-d’œuvre au dôme de Florence. On lui doit le projet initial du chevet à coupole et la partie inférieure de la façade, détruite à la fin du xvie s., mais dont les fragments sculptés dispersés entre le musée de l’Opera del Duomo, le musée de Berlin et diverses collections privées suffiraient à sa gloire.

De sa formation, Arnolfo garda le sens de la majesté des volumes et une admiration pour l’art antique qui pourra aller jusqu’au pastiche (Vierge de la tombe du cardinal de Braye). Toutefois, il joua surtout un rôle dans l’évolution de l’art italien par la facilité avec laquelle il assimila les découvertes du gothique nordique. À la tension dramatique de Giovanni Pisano et aux formes pleines mais statiques de Tino da Camaino, il oppose des figures élégantes, où le drapé aux plis cassés, nettement transalpin dans son inspiration, contraste avec le classicisme des visages, très éloignés des joliesses de l’art français contemporain. De même, en matière d’architecture, n’hésite-t-il pas à habiller parfois des édicules purement gothiques dans leur dessin d’un précieux revêtement de mosaïques « cosmatesques » (dans la manière des Cosma, ornemanistes romains des xiie et xiiie s.). Connut-il directement l’art français ? On ne sait, mais ses liens avec les Angevins de Naples suffisent peut-être à expliquer qu’Arnolfo soit l’un des plus grands représentants du gothique italien, dont l’existence même fut parfois mise en doute.

J. R. G.

 V. Mariani, Arnolfo di Cambio (Rome, 1943).

aromatiques (hydrocarbures)

Composés dont la molécule renferme au moins une fois l’arrangement hexagonal qui caractérise le benzène.


Plusieurs parfums naturels, parmi les premiers identifiés, s’étaient révélés comme des dérivés d’un hydrocarbure C6H6, le benzène, constituant du goudron de houille. C’est là l’origine de l’adjectif « aromatique », peu à peu étendu à toutes les substances, odorantes ou non.


Benzène

Le benzène est un liquide bouillant à 80 °C, se solidifiant à 4,5 °C, extrait à la fois du gaz (débenzolage) et du goudron de houille. Il constitue, en partie, certains pétroles (Bornéo), et plusieurs synthèses en ont été faites : polymérisation de l’acétylène à 600 °C (Berthelot), déshydrogénation cyclisante de l’hexane du pétrole. Ces synthèses ne sont pas encore compétitives.

Le nom du benzène dérive de celui du baume de benjoin, dont l’hydrolyse libère l’« acide benzoïque », lequel, vers 300 °C, en présence de chaux, se décompose en benzène et carbonate de calcium.

Le benzène est très réfringent et très dispersif. À peu près insoluble dans l’eau, il est miscible en toutes proportions à l’éthanol absolu. C’est un solvant des huiles et des graisses, de nombreux composés organiques pas trop riches en oxygène ou en azote, de l’iode, du chlorure ferrique. Par contre, les sels minéraux alcalins y sont rigoureusement insolubles.

Il est caractérisé par une forte bande d’absorption vers 2 100 Å en ultraviolet, par une bande intense à 1 600 cm–1 en infrarouge, et par une bande très forte à 1 000 cm–1 en spectrographie Raman.

Sa combustion
(C6H6 + 15/2 O2 → 6 CO2 + 3 H2O + 815 kilocalories)
est très exothermique. Possédant également un « indice d’octane » élevé, il est un excellent carburant, mais il convient de l’additionner d’alcool absolu afin d’éviter sa congélation dans le carburateur.

La formule du benzène a été très discutée. Kekule, le premier, a proposé une formule hexagonale, comprenant 3 doubles liaisons afin de respecter la quadrivalence du carbone, soit :

C’était alors une hypothèse hardie, qui n’a pu être vérifiée que plus tard, en identifiant le cyclohexane provenant de l’hydrogénation du benzène avec le carbure résultant de l’action du zinc sur le dibromure
CH2Br—(CH2)4—CH2Br.

Mais la formule de Kekule résistait mal à certaines critiques ; on connaît un seul dérivé « ortho » bisubstitué du benzène, alors que la formule de Kekule en prévoit deux, soit :

Thiele proposa le schéma à « valences partielles » (I) [les hydrogènes et les carbones ne sont pas représentés],

dans lequel les tirets ponctués représentent une demi-liaison, qui élimine cette critique ; mais la question n’a pu être résolue que par la théorie quanto-mécanique de la valence ; on arrive à la structure mésomère (II), qui ne diffère de celle de Thiele qu’en ce que les liaisons pointillées de l’hexagone représentent un peu moins d’un électron, le déficit créant, sur chaque atome de carbone, une fraction de valence libre représentée par des tirets ponctués. On condense généralement le schéma II en le schéma III, que nous adopterons par la suite, ce schéma impliquant les 6 atomes de carbone et les 6 atomes d’hydrogène.