Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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pop music

Abréviation de popular music, de Frank Sinatra à Ray Charles en passant par Elvis Presley, tout ce qui figure aux hit parades des meilleures ventes.


Avec l’arrivée des Beatles au début des années 60, le mot a pris un sens plus précis, surtout en France, où la pop music (variété rythmée anglo-américaine) se trouve confrontée au marché local de la chanson traditionnelle. Ce que l’on nomme rock aux États-Unis, c’est-à-dire une branche précise de cette « popular music », s’est retrouvé chez nous sous l’étiquette pop — avec une allusion au pop’art quand les Beatles en imposèrent l’idée par la synthèse réussie entre des mélodies populaires, diverses formes de musiques folkloriques et les effets électro-acoustiques.

Le terme de pop music a gardé sa valeur tout au long des années 60, jusqu’à la séparation des Beatles : depuis, l’utilisation de l’adjectif pop ayant pris, à des fins commerciales, des proportions aussi importantes qu’incontrôlables, les puristes préfèrent parler de « rock music ». Sous cette nouvelle dénomination, comme sous celle de pop music, cohabitent des tendances qui se mariaient chez les Beatles, mais qui sont parfois assez éloignées les unes des autres, du blues noir au folklore blanc en passant par le rhythm and blues, l’amplification électrique et les musiques ethniques, toutes tendances s’interpénétrant plus ou moins à la laveur des communications nouvelles.


Le renouveau anglais

Les années 50 virent la rencontre des deux grands courants de la musique populaire américaine, le blues et le country and western. Le prophète de cette union, Elvis Presley, reste la figure la plus marquante de cette première période du rock and roll, ce que l’on nomme maintenant le vieux rock ou le rock des pionniers. Assez mal reçu par le public du jazz, qui voyait en lui une caricature grossière du blues, le rock devait conquérir la jeunesse américaine, puis bientôt celle de tous les pays industrialisés. Elvis Presley avait mis à la portée d’un très large public l’emprise sensuelle et hypnotique du folklore noir mêlé au romantisme des ballades blanches. Lui-même s’imposait comme une vedette à l’image de ses fans, destiné à devenir bientôt un professionnel loin de ses convictions premières. C’est avec les Anglais que le rock and roll va connaître un second souffle, en même temps que se développera la notion de pop music. Communauté de langue, même sensibilité anglo-saxonne de part et d’autre de l’Atlantique ? Alors que les États-Unis semblent s’assoupir après l’explosion du premier rock, voici que l’on se met à parler des groupes anglais. Des jeunes gens, issus en général de famille ouvrière ou de la « middle class » anglaise, reprennent le flambeau après s’être enthousiasmés pour les disques d’Elvis. Ce sont les Beatles, les Rolling Stones, les Animals. Mais, plus que les premiers rockers américains, ils proclament leur dette envers la musique des Noirs, ils opèrent un rapprochement entre contexte social et musique, ils ressentent le contenu revendicatif de cette expression à la mesure d’un peuple. Certains (notamment les Rolling Stones, le tandem Mick Jagger-Keith Richard) souligneront par les textes de leurs chansons une révolte qu’ils veulent aussi faire leur, s’éloignant beaucoup des exclamations énamourées des premiers chanteurs de rock.

Les Beatles

Le 15 juin 1956, Paul McCartney rencontre John Lennon à l’occasion d’une fête paroissiale. Lennon (Liverpool 1940) a quinze ans et dirige un groupe de « skiffle » folklorique, les Quarrymen (du nom de son école Quarry Bank High School) ; McCartney (Liverpool 1942) en a treize et se passionne pour Bill Haley, Elvis Presley et Little Richard, héros du premier rock and roll. De cette rencontre naîtront les plus fameuses mélodies de la seconde moitié du xxe s. et le groupe qui va devenir le symbole de la pop music : les Beatles. George Harrison, seul Beatle issu d’un milieu familial équilibré (Liverpool 1943), se joindra aux Quarrymen en 1958.

Après s’être appelés Moondogs, Paul, John, George et Stuart Sutcliffe (guitare basse, le Beatle ami de John disparu prématurément) optent pour Silver Beatles, Beatle étant un mot inventé en hommage aux « Crickets » de Buddy Holly (Beetle = scarabée) et par référence au terme Beat, venu du jazz et en faveur à l’époque. Leur premier engagement sérieux date de 1960. Ils prennent un batteur (autre Beatle manqué), Pete Best, et partent à Hambourg, ville d’élection pour les plaisirs et le rock. Après un passage remarqué à la « Cavern » de Liverpool, ils y reviendront l’année suivante pour accompagner le chanteur Tony Sheridan (ils feront en tout cinq séjours à Hambourg, accueillis dans le célèbre « Star Club »). Stuart Sutcliffe se marie avec une jeune étudiante allemande, Astrid Kirchner, qui a l’idée des coiffures Beatles (avec une frange sur le front, « à la Jeanne d’Arc ») — Stuart décédera d’une hémorragie cérébrale en avril 1962. En 1961, un disquaire de Liverpool âgé de vingt-sept ans a l’attention attirée sur les Beatles par des demandes d’acheteurs. Il se nomme Brian Epstein. Devenu leur manager, il jouera un grand rôle dans la présentation et la promotion des Beatles. En 1962, John, Paul et George décident de remplacer Pete Best par un ami rencontré à Hambourg, le batteur de Rory Storm and the Hurricanes Ringo Starr (Liverpool 1940). Les véritables Beatles existent enfin.

Autre homme clé dans leur carrière, George Martin, rencontré à l’époque de leur premier 45 tours (Love me do en 1962) chez Emi, après que Decca les eut refusés. Martin deviendra leur producteur, l’homme qui supervise l’enregistrement des disques. Please, please me, From me to you, She loves you suivent, assurant aux Beatles une renommée qui va croître très rapidement, au point de déboucher, à partir de leur premier voyage aux États-Unis en 1964, sur la Beatlemania, phénomène d’adoration collective dont les quatre garçons allaient faire l’objet durant quatre ans.