pop’art (suite)
Le pop’art américain
Le pop’art proprement dit fut précédé aux États-Unis, à partir de 1950, d’une préface de caractère néo-dadaïste illustrée, sur la côte californienne, par les assemblages* qui furent à l’origine du funk* art et, à New York, par les combine-paintings de Rauschenberg et les drapeaux de Jasper Johns. Jim Dine (né en 1935) fait le lien entre ces derniers et le pop’art dans des peintures-objets pleines d’humour, qui souvent semblent des hommages à Picabia*. On peut distinguer globalement « new dada » du pop’art par le fait que, dans le premier, le coup de pinceau expressionniste demeure et que c’est l’objet réel, souvent abîmé, qui est utilisé, tandis que, dans le second, la touche est impersonnelle et que l’objet se trouve soit idéalisé, soit tiré vers l’abstraction. Si l’on met à part les fantômes blancs de George Segal (né en 1924), les représentants les plus spécifiques du pop’art américain sont au nombre de cinq.
Roy Lichtenstein
(né en 1923) est l’aîné. D’abord étalagiste et dessinateur de mode, il va s’imposer dès 1961 par le traitement simplificateur qu’il fait subir à des images de bandes dessinées de caractère sentimental ou militaire. La tendance au schématisme s’accuse jusqu’à l’abstraction lorsque, en 1964, il étend ses références à des paysages marins ou à des temples grecs, puis plus tard à des compositions de style 1925. On sent chez lui un effort progressif pour se défaire du contenu émotionnel de l’image et n’en plus conserver que l’austère ordonnance.
Claes Oldenburg
(né en Suède en 1929) dessine pour les journaux avant de créer, sous l’influence de Dubuffet* et de Céline*, des sortes de ruines d’objets urbains. Puis il jette son dévolu sur les charcuteries et les pâtisseries, dont il donne des transpositions tantôt fidèles, tantôt démesurément agrandies et métamorphosées par les matériaux employés. Viennent ensuite les objets « mous » et les objets « fantômes », dont la relation avec la réalité (aliments, meubles, équipement sanitaire, pièces d’automobile, outils, téléphones, etc.) se fait de plus en plus aberrante, au point que l’on peut tenir Oldenburg (quand ce ne serait que pour ses projets de monuments géants) pour le plus surréaliste des pop’artistes.
James Rosenquist
(né en 1933) a acquis dans l’exécution de panneaux publicitaires géants sa prodigieuse habileté technique. Plus encore qu’Oldenburg, il fait figure de grand expérimentateur du pop’art, ne cessant de proposer de nouvelles solutions plastiques (ainsi avec Forest-Ranger, fait de panneaux peints sur plastique que le spectateur peut traverser). Mais l’essentiel de sa démarche réside dans la juxtaposition de fragments d’images en eux-mêmes presque illisibles, qui se révèlent prendre un sens esthétique et peut-être symbolique du fait de leur réunion. La surprise, dont joue admirablement Rosenquist, le conduit souvent aux portes d’un merveilleux difficilement analysable.
Andy Warhol
(né en 1930), qui s’illustra d’abord comme dessinateur de chaussures, est le plus célèbre des peintres « pop » et aussi le plus systématique. Qu’il s’agisse de la répétition à perte de vue de la même image (boîte de soupe Campbell ou bouteille de Coca-Cola, portrait de Marylin Monroe ou de Mao Tsö-tong), de l’usage de la sérigraphie et du report photographique sur toile ou enfin, au cinéma (auquel il se consacre de plus en plus depuis 1963), du recours à un vérisme intransigeant, toute son activité tend à substituer à la personne de l’artiste des instruments d’enregistrement visuel ou sonore.
Tom Wesselmann
(né en 1931), le plus puissant tempérament du pop’art avec Oldenburg, procède du collage. Il avait auparavant étudié le dessin animé. Sa série des Grands Nus américains (1961-1967) juxtaposait à des nus simplifiés inspirés de Modigliani et de Matisse des fragments de publicité photographique, puis des éléments en relief (tables, radiateurs, natures mortes, etc.). Un érotisme vulgaire, mais d’une grande efficacité caractérise le principal apport de Wesselmann.
J. P.
M. Amaya, Pop as Art : A Survey of the New Super-Realism (Londres, 1965). / R.-G. Dienst, Pop Art : eine kritische Information (Wiesbaden, 1965). / J. Rublowski, Pop Art (New York, 1965). / E. Crispolti, La Pop Art (Milan, 1966). / L. R. Lippard, Pop Art (Hazan, 1969). / J. Russell et S. Gablick, Pop Art Redefined (Londres, 1969). / Depuis 1945. L’art de notre temps, t. II (La Connaissance, Bruxelles, 1970). / F. Pluchart, Pop Art et Cie, 1960-1970 (Martin-Malburet, 1971). / J. Pierre, le Pop Art (Hazan, « Dictionnaires de poche », 1975).