Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
P

polytechnique (École) (suite)

Les cours de la première promotion de 400 élèves, âgés de seize à vingt ans, débutent le 21 décembre 1794 dans les locaux du palais Bourbon ; le régime est celui de l’externat, mais le logement des élèves chez l’habitant entraînant absences et désordre, Napoléon décide en 1804 de transformer l’École en un bataillon formant corps, soumis à la discipline militaire et logé au Quartier latin, à l’emplacement de l’ancien collège de Navarre. Le bataillon participe à la défense de Paris en 1814, où il se distingue à la barrière du Trône.


1815-1945

La Restauration est mal accueillie par les élèves, dont les sentiments républicains sont affichés. Un incident fournit en 1816 l’occasion de licencier quelque temps Polytechnique, qui, à sa réouverture, perd son caractère militaire. Sous l’influence du marquis de Laplace*, l’École s’oriente alors vers la haute culture scientifique. Le régime militaire est rétabli en 1822 ; les polytechniciens s’engagent à fond aux côtés des insurgés en 1830, mais, lorsqu’en 1839 Barbes et Blanqui tentent un coup de force, les élèves ne les suivent pas. Sous le second Empire, l’École reste sourdement hostile à Napoléon III, mais, en 1871, pendant la Commune, elle demeure fidèle au gouvernement de Versailles.

La IIIe République renforce le caractère militaire de Polytechnique, qui fournit alors un fort contingent d’officiers d’artillerie et du génie de haute valeur à la reconstruction de l’armée : ceux-ci joueront, dans les services techniques comme dans le haut commandement, un rôle essentiel tant dans la préparation que dans la conduite de la Première Guerre mondiale (où 915 polytechniciens tomberont pour la France). En juin 1940, l’École polytechnique est repliée d’abord à Toulouse, puis installée à Lyon dans les locaux de l’École du service de santé militaire. Les circonstances la contraignent à perdre son caractère militaire en 1941. Après l’occupation de la zone libre, l’École polytechnique réintègre Paris en avril 1943, et de nombreux polytechniciens participent aux combats de la Résistance et de la Libération. Au cours de la Seconde Guerre mondiale, 345 polytechniciens trouveront la mort au service du pays.


Depuis 1945

En octobre 1945, près de 800 élèves appartenant à cinq promotions se présentent à l’École pour y faire ou y achever leurs études. Un gros effort est accompli pour rénover les bâtiments de la rue Descartes afin d’accueillir à partir de 1957 deux promotions d’environ 300 élèves. Dès 1950, une « grande commission » est créée pour adapter l’enseignement de l’X aux exigences du monde moderne et à l’évolution des sciences ainsi que pour chercher à mettre les futurs ingénieurs en contact direct avec la société. Adoptée par le Conseil de perfectionnement de l’École en 1956, cette orientation conduit à rendre plus libérales les conditions de travail à Polytechnique, dont l’internat devient moins rigoureux. En 1961, une nouvelle commission accentue cette tendance à transformer l’École en un important centre de recherche. Son emplacement parisien étant reconnu trop exigu, il est décidé de transférer celle-ci hors de Paris, à Palaiseau (Essonne), à proximité du plateau d’Orsay.


Nouvelle organisation de l’X

La loi du 15 juillet 1970 et ses textes d’application ont remanié profondément le statut de Polytechnique.

La mission de l’École, de nouveau précisée, est de « donner à ses élèves une culture scientifique et générale les rendant aptes à occuper, après formation spécialisée, des emplois de haute qualification ou des responsabilités à caractère scientifique, technique ou économique dans les corps civils et militaires de l’État et dans les services publics et, de façon plus générale, dans l’ensemble des activités de la nation ».

Établissement public doté de la personnalité civile et de l’autonomie financière, l’École est gérée par un conseil d’administration et par un directeur général, qui est un officier général. Le président du conseil d’administration est nommé par décret ; le général directeur est de droit vice-président. Les élèves français sont recrutés par voie de concours, entre dix-sept et vingt-deux ans. Les candidats étrangers ou naturalisés français peuvent concourir dans des conditions particulières jusqu’à l’âge de vingt-six ans. À leur entrée à l’École et durant une période de cinq mois, les élèves reçoivent dans les armées la formation d’élèves officiers de réserve. Nommés ensuite aspirants, ils poursuivent durant deux ans leurs études à Polytechnique et achèvent, durant sept mois, leurs obligations d’activité du service national dans une formation militaire. Ils perçoivent la solde de sous-lieutenant au cours des douze derniers mois accomplis comme élèves de Polytechnique.

Depuis 1972, l’École est également ouverte aux jeunes filles, qui sont soumises au même concours et au même régime que les jeunes gens ; elles participent au même classement et ont accès aux mêmes emplois.

Les élèves ayant satisfait aux conditions de sortie peuvent être admis, dans la limite des places disponibles (choisies suivant leur classement), soit dans un grand service public, soit à l’École nationale d’administration. Parmi les grands services publics, dont le recrutement est assuré par l’École polytechnique, on citera les corps d’ingénieurs du génie rural, des eaux et forêts, de la météorologie nationale, des ponts et chaussées, des instruments de mesure, des mines, de la navigation aérienne, des postes et télécommunications, de l’Institut géographique national, de l’Institut national de la statistique et des études économiques, ainsi que les corps d’officiers des trois armées, des ingénieurs d’armement et l’École nationale supérieure des techniques avancées.

Les anciens « X »

Au cours de son histoire longue de près de deux siècles, Polytechnique a donné au pays des personnalités remarquables dans les disciplines les plus diverses :

• aux armées, les maréchaux Bosquet, Fayolle, Foch*, Joffre*, Maunoury, Niel..., les généraux Cavaignac, Faidherbe*, Lamoricière..., les amiraux Courbet*, Rigault de Genouilly..., le lieutenant de vaisseau d’Estienne d’Orves ;

• aux lettres, l’historien C. de Saint-Aulaire..., le philosophe Auguste Comte*..., les écrivains É. Estaunié, M. Prévost..., l’économiste F. Le Play..., le père A. Gratry, de l’Oratoire... ;

• à la musique, Ch. Kœchlin... ;

• à la politique, des hommes tels que Sadi Carnot*, C. de Freycinet, V. Giscard d’Estaing, A. Lebrun, L. Loucheur, J. Moch... ;