Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Polynésie française (suite)

Toutefois, les passions s’éteignent quand le gouvernement de Louis-Philippe indemnise le pasteur, tout en conservant à la France le protectorat. À Tahiti, par contre, l’effervescence s’accroît. De 1844 à 1846, la révolte, entretenue en sous-main par les Anglais, se propage dans toute l’île. Il faudra de nombreux combats pour en venir à bout, et les derniers rebelles se soumettront enfin le 1er janvier 1847.

La reine Pomaré IV, après la reddition, se montre fidèle envers les Français et s’éteint après cinquante ans de règne en 1887. Son successeur, Pomaré V, n’ayant pas d’enfants, abandonne en 1880 ses droits à la France, qui annexe Tahiti et ses dépendances.

Les îles Sous-le-Vent, qui ont suivi une évolution parallèle à celle de Tahiti (troubles occasionnés par les Mamaia, soutien à Pomaré, refus anglais d’y reconnaître le protectorat français), sont déclarées indépendantes en 1847. Devant la menace d’une implantation allemande sur ces îles à partir de 1878, la Grande-Bretagne accepte en 1887, en échange du départ des troupes françaises des Nouvelles-Hébrides, leur annexion par la France.

Les îles Gambier, sous protectorat français depuis 1844, sont annexées en 1881, et les Tuamotu en 1880. Les îles Australes sont réunies en 1900, et l’îlot désertique de Clipperton, revendiqué depuis 1858, est reconnu définitivement à la France en 1931, grâce à l’arbitrage du roi d’Italie.

Papeete est bombardée en septembre 1914 par les navires de guerre allemands Gneisenau et Scharnhorst, commandés par l’amiral von Spee. Les Tahitiens contribueront pendant le conflit à la formation du « Bataillon du Pacifique ».

En septembre 1940, la Polynésie se rallie à la France libre, et le « Bataillon du Pacifique » est reformé. Il combat en Libye, en Tunisie, en Italie et en France. En 1942, l’île de Bora Bora sert de place forte à la marine et à l’aviation américaines dans sa campagne du Pacifique.

En 1956, une loi-cadre est établie afin de conduire peu à peu la Polynésie française vers l’autonomie revendiquée par le Rassemblement démocratique du peuple tahitien (R. D. P. T.) de Puvanaa-a-Oota, mais, après un vote, en 1958, favorable au statut de territoire d’outre-mer, la loi-cadre est en partie supprimée. En 1963 et en 1964, la France installe à Papeete le siège du Centre d’expérimentation du Pacifique, chargé d’effectuer des expériences atomiques sur certains îlots polynésiens (Fangataufa, Mururoa).

La tendance majoritaire actuelle réclame l’autonomie, mais est hostile à une complète indépendance de la Polynésie.

P. P. et P. R.

➙ Tahiti.

 J. P. Faivre, l’Expansion française dans le Pacifique de 1800 à 1842 (Nouv. Éd. latines, 1955). / Tahiti et la Polynésie française, numéro spécial du Journal de la Société des Océanistes (1960). / F. A. Hanson, Rapan Lifeways. Society and History of a Polynesian Island (Boston, 1970 ; trad. fr. Rapa. Une île polynésienne hier et aujourd’hui, Soc. des Océanistes, 1974).


Le Centre d’expérimentation du Pacifique (C. E. P.)

Créé en 1962 pour remplacer les sites sahariens de Reggane et d’In-Eker, il a été installé en 1964 et en 1965 et comprend une base arrière à Papeete, une base avant à Hao (à 900 km plus à l’est) et deux champs de tir dans les îles de Mururoa et de Fangatauta (à 350 km au sud-est de Hao).

La responsabilité de l’ensemble dépend d’un officier général directeur des centres d’expérimentation nucléaires, placé sous l’autorité directe du ministre des Armées. Cet officier est assisté de deux adjoints : l’un, technique, relève de la Direction des applications militaires (D. A. M.) du Commissariat à l’énergie atomique (C. E. A.) et assure la direction de la chaîne technique ; l’autre, militaire, est un amiral, chargé notamment du support logistique, des liaisons et de la sécurité de l’ensemble. Le directeur dispose en outre d’un important état-major, composé d’officiers des trois armes et de personnel du C. E. A. Aux époques de tir, l’ensemble des participants constitue le Groupement opérationnel des expérimentations nucléaires.

Malgré le grand éloignement des lieux habités, une des tâches essentielles du C. E. P. est d’assurer la sécurité des explosions avant et après les tirs. Une mesure essentielle, prise dès le début, a consisté à placer les bombes sous d’énormes ballons captifs, de manière que la boule de feu ne touche pas le sol et donc ne provoque pas d’importantes retombées. D’autre part, de nombreuses stations météorologiques, installées à de grandes distances des champs de tir, ont pour mission d’étudier constamment la force et la vitesse des vents au sol et en altitude. Si le temps paraît favorable, des « avis aux marins et aviateurs » sont diffusés pour signaler les dangers qu’il y aurait à survoler des zones de tir ou à naviguer à proximité. De leur côté, un Service mixte de sécurité radiologique (S. M. S. R.) a pour mission principale de prévoir les retombées possibles, et un Service mixte de sécurité biologique (S. M. S. B.) étudie aussi bien les produits de consommation locale que la végétation. Une force navale, appelée Force Alpha, est spécialement chargée de la sécurité en mer.

De 1966 à 1976, il y a eu quarante-neuf explosions, soit six en 1966, trois en 1967, cinq en 1968 (dont le premier tir mégatonnique le 24 août), zéro en 1969, huit en 1970, cinq en 1971, trois en 1972, cinq en 1973, huit en 1974, deux en 1975 et quatre en 1976. Cette gamme d’expérimentation permit d’étudier différents types d’explosions correspondant à une grande variété d’engins. Mais, en 1974, la France décidait de ne plus procéder qu’à des expérimentations souterraines : la première de celles-ci a eu lieu le 5 juin 1975.

Les effectifs mis en jeu par le C. E. P. sont très variables : c’est ainsi que, de 2 500 hommes en période creuse, ceux de la marine s’élèvent à 7 500 en période d’activité. La présence de ce personnel, les travaux d’infrastructure réalisés par le C. E. P., tels que les aérodromes de Faaa (Papeete) et de Hao, et l’emploi d’une main-d’œuvre locale nombreuse ont modifié la situation économique de la Polynésie.