Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Pologne (suite)

Les mécanismes de la vie politique


Les organes du pouvoir

Le « pouvoir du peuple » s’exerce par l’intermédiaire d’un système unique d’organismes représentatifs hiérarchisés : la diète et les conseils du peuple (qui sont les organes locaux du pouvoir d’État) élus au suffrage universel pour quatre ans et révocables. La collégialité des organes fondamentaux de l’administration est généralisée. Le parti paysan unifié (ZSL) et le parti démocrate (SD) sont « associés au pouvoir » du PZPR, dont le « rôle dirigeant » en tant que parti de la classe ouvrière est intangible. Bien qu’il ne soit pas stipulé expressis verbis dans la Constitution, le Front d’unité nationale constitue la plate-forme de « coopération » et le programme électoral commun (à l’échelle nationale comme à l’échelle locale) des partis alliés, des « associations socio-politiques » représentatives de l’opinion catholique (Znak, Pax) et des organisations de masse : syndicats (11 millions de membres), organisations de jeunesse (plus de 4 millions de jeunes), ligue des femmes, etc. Les candidats sont exclusivement proposés par ces organisations. C’est le PZPR qui choisit les candidats de la liste unique du Front d’unité nationale. Depuis 1956, l’électeur a une « possibilité légale de sélection » entre un nombre plus grand de candidats que de sièges à pourvoir, en rayant sur la liste des noms particuliers. Ainsi, aux élections de 1972, des candidats « sans parti » ou catholiques non conformistes (Znak) passeront de la fin des listes aux premières places.

La diète (Sejm) unicamérale, composée de 460 députés élus au suffrage universel pour quatre ans, est l’« organisme suprême du pouvoir de l’État ». Elle désigne parmi ses membres un Conseil d’État (Rada państwa) composé de 17 personnes qui assument collectivement depuis 1952 les fonctions de chef d’État. La diète nomme également et révoque le gouvernement, le procureur général et le président de la Chambre suprême de contrôle. Le Conseil d’État, le gouvernement et la diète sont dotés de l’initiative législative. Depuis 1956, le Conseil d’État ne fait pratiquement plus usage du droit de légiférer par décrets dans l’intervalle des sessions parlementaires. Mais la prédominance de fait des organes centraux du parti (comité central, bureau politique) restreint le rôle de la diète.

Le Conseil d’État exerce sa haute surveillance sur la hiérarchie des conseils du peuple. Ramenés au 1er janvier 1973 de 4 314 à 2 366, les nouveaux conseils communaux sont, depuis lors, à la fois des organes du pouvoir exécutif et des organes consultatifs, mais la responsabilité principale à leur niveau incombe désormais au maire, comme avant la guerre. Au niveau des autres conseils, un présidium élu et révocable dirige l’administration ; les « services » composés de fonctionnaires nommés lui sont subordonnés. La compétence des commissions de chaque conseil s’étend à la gestion de l’économie locale, des moyens de culture et du contrôle dit « social ». L’organisation hiérarchisée de l’appareil du parti correspond à celle des conseils du peuple, sur laquelle elle exerce son contrôle.


Gouvernement et administration

Si les postes ministériels sont compatibles avec les fonctions dirigeantes dans le parti, son premier secrétaire, véritable dirigeant politique du pays, n’est généralement pas membre du gouvernement.

Diverses commissions centrales, dont les présidents siègent au Conseil des ministres, coordonnent l’activité des organes de l’État dans des domaines déterminés de l’économie (planification, travail et salaire, science et technique).


Organisation économique et protection des droits

Jusqu’en 1956, la planification a été très centralisée et rigide. Puis les méthodes et les formes de direction se sont assouplies à travers les expériences tentées pour établir l’équilibre nécessaire entre la gestion étatique et les intérêts propres des entreprises. Les attributions et les responsabilités ont été étendues aux échelons inférieurs de la gestion (« unions industrielles » [1958] et conseils du peuple de voïévodies, de districts). Mais l’autogestion ouvrière, symbole des conquêtes de l’« Octobre polonais », a été placée dès 1958 sous la férule du parti et fortement limitée. Les grands desseins de réformes de l’équipe d’E. Gierek en vue de moderniser la gestion de l’économie et de l’organisation étatique ont été réduits par la consigne, commune à maint pays socialiste, de renforcer le système de planification centralisée. Le VIIe Congrès national des syndicats (nov. 1972) n’a pas décidé d’accroître l’autonomie de l’autogestion.

Depuis 1956, la Chambre suprême de contrôle (Najwyższa Izba kontroli), indépendante de l’exécutif, surveille les divers domaines de l’activité administrative. Ce contrôle concerne surtout l’exécution du budget et la réalisation du plan économique, mais il porte aussi sur la légalité, l’intégrité et l’opportunité de toute action de l’administration. En dehors de son rôle d’accusateur public dans les affaires pénales, le ministère public (Prokuratura) — qui ne dépend plus depuis 1950 du ministère de la Justice — surveille la légalité de l’administration et contrôle les activités des unités de l’économie nationalisée ; il ne peut cependant pas annuler les actes de ces organismes. La juridiction administrative supprimée en 1939 (sauf dans le domaine de la sécurité sociale) n’a pas encore été rétablie en dépit des promesses et projets. Les moyens de défense des administrés résident dans le contrôle « social » exercé par les conseils du peuple, le recours hiérarchique, les motions au pouvoir. La critique de la bureaucratie étatique est admise, voire encouragée quand elle dédouane le pouvoir politique, comme en 1971, où l’énorme vague de discussions oppositionnelles a été canalisée contre l’appareil intermédiaire des responsables locaux du parti et des conseils du peuple, ces « aparatchiki » que l’on nomme ici « chochoły ».